Par Éric Belouet, Michel Dreyfus, Jean-Claude Paul-Dejean
Né le 24 novembre 1888 à Bizanos (Basses-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques), mort le 17 juin 1971 à Pau (Pyrénées-Atlantiques) ; ouvrier du gaz ; une des figures les plus marquantes du mouvement socialiste, syndicaliste et coopérateur béarnais entre les deux guerres ; résistant.
Ouvrier plombier, employé à l’usine à gaz de Pau de la Compagnie France et Étranger, Jacques Alliez s’inscrivit en 1919 au Parti socialiste SFIO et à la CGT ; il milita dans leurs rangs jusqu’à la Seconde Guerre mondiale ainsi que dans le mouvement coopérateur (il siégea au conseil d’administration des coopérateurs du Bassin de l’Adour).
Jacques Alliez était membre du bureau de la section socialiste de Pau (1929) et en assuma le secrétariat de mars 1933 à la fin de 1936 ; il représenta son parti sans succès à de nombreuses compétitions électorales.
À trois reprises (1925, 1929, 1935) Jacques Alliez fut candidat aux élections municipales de Pau, la première fois sur une "liste républicaine d’action municipale" de type cartelliste (2002 voix au 1er tour soit 36 % des suffrages exprimés ; 2 359 voix au 2e tour) ; lors des deux autres consultations, il figura sur une liste SFIO homogène et il obtint respectivement 1 621 voix (27 % des suffrages exprimés) et 1 733 voix (26 % des suffrages exprimés).
En 1934, dans le canton de Mauléon, Jacques Alliez brigua le siège de conseiller d’arrondissement (475 voix soit 18 % des suffrages exprimés). Il se présenta aux élections législatives générales dans la circonscription de Mauléon en 1928 (967 voix : 8 % des suffrages exprimés), en 1932 (1 933 voix : 15 % des suffrages exprimés), en 1936 (1 875 voix : 14,5 % des suffrages exprimés). Cette progression des suffrages obtenus par le candidat socialiste, remarquable dans le « fief » d’Ibarnégaray, est due, en partie, à la personnalité de Jacques Alliez « parfaitement qualifié pour faire l’union de toutes les bonnes volontés républicaines ».
Secrétaire inamovible du syndicat CGT du gaz et de l’électricité, Jacques Alliez fut élu secrétaire de l’Union locale des syndicats confédérés de Pau qui groupait treize syndicats et plus de 1 600 adhérents en 1930 et, en 1933, l’Union des syndicats confédérés de l’Adour le délégua à la propagande pour les départements des Landes et des Basses-Pyrénées. À ce titre il fut élu au comité de la Fédération CGT de l’Éclairage lors de son XIIIe congrès (Pau, 1934) et réélu aux deux congrès suivants (1936 et 1937). Dans l’hebdomadaire le Travail, Jacques Alliez fit paraître des articles sur l’activité syndicale et le rôle des prudhommes (il fut président du conseil des prudhommes de Pau après 1935).
Lors du congrès de 1937, il fut également élu au bureau l’un des trois secrétaires généraux adjoints de la Fédération nationale CGT du Gaz et de l’Électricité, jusqu’en novembre 1939.
Bien avant 1936, Jacques Alliez était déjà un actif partisan de l’unité syndicale. De 1937 à 1939, il participa à toutes les discussions avec le groupement des secteurs, l’organisme patronal de l’époque, pour améliorer les statuts existants avec la volonté de faire aboutir la revendication d’un statut unique adoptée lors du XVe congrès à Lyon en juin 1937.
C’est pour se consacrer à ses responsabilités syndicales que Jacques Alliez demanda en 1936 à ne plus être secrétaire de la section SFIO de Pau où il resta jusqu’en 1940.
En rappelant lors de la réunion du comité fédéral du 5 novembre 1939 qu’il avait désapprouvé les accords de Munich, Jacques Alliez se rapprochait alors des communistes. Il s’affirma cependant hostile au Pacte germano-soviétique tout en se prononçant en faveur du maintien de l’unité syndicale. Cependant, il fut exclu du bureau de la Fédération. Clément Delsol* estimait en effet qu’il n’avait « pas une grande énergie ni beaucoup de volonté ; si Alliez restait, ce serait en fait Pasquier* qui dirigerait... On ne peut faire confiance à Alliez qui n’a pas suffisamment d’indépendance d’esprit ». Il continua à participer à la vie fédérale, fut présent à une réunion organisée par la Fédération "légale" à Saint-Étienne, le 22 décembre 1940. Avec Lucien Barthes*, Jacques Alliez aurait été convoqué au comité fédéral du 9 mai 1942 par la réunion de la commission exécutive tenue le 8 novembre 1941 mais on ne sait s’il se rendit à cette invitation.
En fait, Jacques Alliez s’était engagé dans la Résistance et semble avoir été un de ceux qui, comme Lucien Baujard*, "infiltrèrent" la Fédération "légale" au profit des syndicalistes illégaux.
En 1945, alors qu’il avait toujours sa place au secrétariat fédéral, il demanda à en être relevé, se jugeant trop âgé pour tenir ce poste avec les déplacements de Pau à Paris que cela lui imposait. Jacques Alliez resta à la CGT et s’opposa à la scission en 1948, ce qui explique peut-être que dans cette ville, peu de militants rallièrent la Fédération Force ouvrière des industries de l’énergie électrique et du gaz. Il milita à la Caisse mutuelle complémentaire d’action sociale (CMCAS) de Pau et à la section des retraités CGT de cette ville.
Par Éric Belouet, Michel Dreyfus, Jean-Claude Paul-Dejean
SOURCES : Arch. Nat. F7/13013. — Arch. Dép. Basses-Pyrénées 10 M 1. — Le Travail. — La Dépêche du Midi. — Le Coopérateur de France, 17 juillet 1971. — Force Information, n° 193, septembre 1971. — B. Weiss, La Fédération légale de l’Éclairage CGT (1936-1944), mémoire de maîtrise, Université Paris VII, 1995. — Témoignage de P. Delplanque.