Par Nicole Racine
Né le 21 mai 1901 à Paris, mort le 27 novembre 1960 à Paris ; journaliste à L’Humanité (1922-1929), à Monde (1928-1932), au Progrès de Lyon (1932-1942) ; résistant ; après la Libération, rédacteur en chef de Franc-Tireur (1944-1957) qu’il avait dirigé clandestinement pendant l’Occupation.
Georges Altman était fils de Josué Altman et de Sophie Mirkès. D’origine russe, sa famille avait émigré en France aux alentours de 1900. Son père s’était établi d’abord comme médecin de campagne en Lorraine avant d’exercer la médecine à Paris, 20, avenue Reille dans le quartier Montsouris. Georges Altman naquit à Paris, dans le XIVe arr., et perdit son père très jeune, à l’âge de cinq ans. Après avoir quitté l’école primaire de la rue Prisse-d’Avennes, XIVe arr., où il eut comme camarade André Sévry* qui le retrouva plus tard à Monde, il entra au lycée Louis-Le-Grand. Georges Altman fit ses études à la Sorbonne (licence ès-Lettres, diplôme d’études supérieures de la Faculté des Lettres) et appartint aux Étudiants socialistes révolutionnaires fondés en janvier 1919 par Jean de Saint-Prix* et Marcel Ollivier.
Attiré par le communisme naissant, par l’idéal de la fraternité et de la libération incarné par la Révolution russe, Georges Altman entra dans le journalisme d’extrême-gauche. Il était proche de la revue Clarté qui, en ce début des années vingt, fut un des lieux d’expression de la jeune génération ralliée au communisme. En 1922, Georges Altman entrait à L’Humanité comme reporter ; membre du Parti communiste, rédacteur à L’Humanité, et aux Cahiers du Bolchevisme, il resta au quotidien communiste jusqu’en 1929 (en juin 1927, il remplaça Maurice Parijanine à la rubrique "La Vie littéraire" et y donna de substantielles chroniques de livres). Le bureau politique l’avait confirmé dans ses fonctions le 29 mars 1928 (IMTh., bobine 302). Le 2 septembre 1929, Georges Altman fut licencié du journal pour "inapplication" de la ligne politique tracée par le Parti (voir Robert Digne*).
Georges Altman avait été candidat communiste aux élections législatives d’avril 1928 dans la circonscription de Saint-Lô (Manche). Il devint, au moment de la fondation de Monde par Henri Barbusse*, un des artisans de l’hebdomadaire, avec Augustin Habaru*, A. Rossi (Angelo Tasca*). Il collaborait aussi à la partie artistique et littéraire de La Lumière, l’hebdomadaire de Georges Boris (le 9 janvier 1937, il fit paraître un long article sur l’œuvre de Céline ; il rompra avec Céline lors de la publication de Bagatelles pour un massacre).
Passionné de cinéma, Georges Altman publia en 1931 un ouvrage sur le cinéma soviétique, Le Cinéma russe, qui s’inscrivait dans la voie tracée par Léon Moussinac*, ainsi que le recueil Ca, c’est du cinéma ! qui se terminait par un hommage à Charlie Chaplin.
En décembre 1932, Georges Altman entrait à la rédaction parisienne du Progrès de Lyon. En 1940, l’annonce de l’armistice le surprenait à Cahors (Lot) où il était replié avec son unité ; ayant entendu parler de l’appel du général de Gaulle, à Toulouse en juillet 1940, il pensa alors rejoindre l’Angleterre. Apprenant que l’équipe parisienne du Progrès s’était repliée à Lyon, il rejoignit Lyon et demeura rédacteur en chef du Progrès jusqu’en décembre 1942.
Hostile au régime de Vichy dès les lendemains de l’armistice, le Progrès de Lyon accueillit les premiers résistants lyonnais et le bureau de Georges Altman et Yves Farge* devint une plaque tournante pour les premiers résistants. Georges Altman entra en contact par l’intermédiaire d’Élie Péju avec le groupe « Franc-Tireur » et avec le journal Franc-Tireur lancé à la fin décembre 1941 par Jean-Pierre Lévy et Antoine Avinin. « Aussi, lorsque Élie Péju lui fait part du désir de Jean-Pierre Lévy de trouver un journaliste de métier qui puisse prendre en main la parution du journal, Georges Altman accepte de donner son concours et s’intègre au mouvement, en mars 1942 » (D. Veillon). Georges Altman secondé par Élie Péju, allait faire de Franc-Tireur un remarquable instrument d’information et de propagande. « Malgré l’absence de signature, son style brillant et ironique suffisait à l’identifier auprès de ses camarades et de ses amis » (D. Veillon).
Entré dans l’action clandestine, Georges Altman amena à Franc-Tireur Marc Bloch, professeur d’Histoire du Moyen Age à la Sorbonne, révoqué de ses fonctions et réfugié à Lyon. Georges Altman rendit un émouvant hommage à Marc Bloch, fusillé par les Allemands à Trévoux près de Lyon, le 16 juin 1944, en préfaçant L’étrange défaite après la Libération. Georges Altman amena également à Franc-Tireur, Albert Bayet. Georges Altman écrivit aussi dans le Père Duchesne, journal satirique lancé en avril 1942 par Élie Péju, édité et diffusé par Franc-Tireur. Il eut l’idée de faire paraître La Revue Libre dans le but de « faire mieux comprendre l’élément nouveau et révolutionnaire que la Résistance française entendait représenter et de dégager un état d’esprit commun à tous ceux qui veulent aller de la Résistance à une République épurée ».
En février 1944 sortait la première édition parisienne de Franc-Tireur. Albert Bayet* et Georges Altman en rédigèrent les articles et organisèrent le service de propagande et de diffusion. Ce fut dans les locaux où il supervisait la sortie du numéro 34 de Franc-Tireur clandestin que Georges Altman fut arrêté, le 7 juillet 1944. Incarcéré à la Santé, il fut libéré le 18 août 1944 à la veille de l’insurrection parisienne. Georges Altman assurait alors, le 21 août 1944, la parution "au grand jour" de Franc-Tireur. Après la Libération, il restait rédacteur en chef du « Quotidien populaire issu de la Résistance ».
En 1948, Georges Altman soutenait le Rassemblement démocratique révolutionnaire (RDR) ; hostile à la fusion de Franc-Tireur avec Libération, il resta rédacteur en chef après le départ de Marcel Fourrier*. Au début de 1958, Élie Péju et Georges Altman démissionnaient de Franc-Tireur, peu après l’achat par Cino del Duca du journal transformé en Paris-Journal (novembre 1957).
Georges Altman collabora au Figaro littéraire en 1958-1959. Il dirigea quelques mois le service de presse d’André Malraux* lorsque celui-ci était ministre des Affaires culturelles.
Georges Altman était marié et père de trois enfants.
Il a été élu membre du conseil national provisoire du Syndicat national des journalistes Force Ouvrière, constitué le 7 février 1948.
Par Nicole Racine
ŒUVRE : Le Cinéma russe, Paris, F. Alcan, 1931, 156 p. — Avant-propos à Bloch (Marc), L’étrange défaite, témoignage écrit en 1940. Paris, Société des Éditions Franc-Tireur, 1946, XIX-196 p. — Ca, c’est du cinéma ! Paris, Éditions les Revues, 1931, 269 p. — La correspondance de L.-F. Céline à Georges Altman a été publiée, ainsi que l’article de Georges Altman dans La Lumière du 9 janvier 1937, dans Les Cahiers de L’Herne consacrés à L.-F. Céline (n° 2, 1965).
SOURCES : Arch. PPo. B/A 1715. — Arch. RGASPI, Moscou, 495 270 8920 (dossier personnel peu riche, documents en russe). — Dictionnaire biographique français contemporain, Pharos, Paris, Centre international de documentation, 1950, 499 p. — Catalogue des périodiques clandestins diffusés en France de 1939 à 1945, Paris, Bibliothèque Nationale, 1954. — Le Monde, 29 et 30 novembre 1960. — Histoire générale de la presse française, publiée sous la direction de Cl. Bellanger, Pierre Guiral, Fernand Terrou, Paris, Presses Universitaires de France, tome IV, De 1940 à 1958, 1975, 486 p. — Veillon Dominique, Le Franc-Tireur. Un journal clandestin, un mouvement de Résistance. 1940-1944, Paris, Flammarion, 1977, 428 p. — Renseignements biographiques fournis par Mme Irène Allier. — Jean-Pierre Lévy, Mémoires d’un franc-tireur. Itinéraire d’un résistant (1940-1944), Bruxelles, Éditions complexes, 1998. — Force Ouvrière, hebdomadaire de la CGT-FO, 12 février 1948.