BESSAND Joseph, Arsène

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 10 janvier 1865 à Gréoux-les-Bains (Basses-Alpes/Alpes-de-Haute-Provence), mort le 19 juillet 1957 à Riez (Basses-Alpes/Alpes-de-Haute-Provence) ; instituteur ; militant socialiste puis communiste des Basses-Alpes.

Les deux frères Bessand, Joseph et Frédéric, appartenaient à une famille "rouge" de Gréoux, comprenant trois générations de militants républicains, socialistes puis communistes. Souvent dans les rapports de police et dans la presse, leurs prénoms n’étaient pas mentionnés, d’où les risques de confusions. La bibliothèque de la famille Bessand, déposée aux Archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence, constituait un fonds précieux pour l’histoire du syndicalisme enseignant et du mouvement ouvrier en général.

Le père Michel, Casimir Bessand, menuisier et propriétaire-cultivateur à Gréoux, insurgé en décembre 1851, avait été déporté en Algérie jusqu’en mars 1853, tout comme son frère, leur oncle, Joseph Bessand, lui aussi menuisier, adjoint au maire du village sous la Seconde République, qui en était revenu en mai 1854.

Joseph Bessand dont le prénom d’usage était Arsène fit ses études à l’école primaire supérieure de Riez, puis fut admis à l’École normale d’instituteurs de Barcelonnette en 1882. De santé fragile, réformé, il resta célibataire et vécut avec sa sœur cadette Annette, née en 1870, qui, restée elle aussi célibataire, lui servit de gouvernante. Instituteur très consciencieux, soucieux de pédagogie, mais visant un peu haut d’après les rapports d’inspection, il s’occupa également de cours d’adultes. Il enseignait à Castellane avant la guerre. Il y resta jusqu’en 1917. Il fut alors muté à l’école de La Pérusse à la suite de plaintes de parents. Sa très forte myopie l’empêchait en effet de "tenir" une classe. Il enseigna dans cette école vétuste, où régnait "une forte odeur de bergerie" (rapport d’inspection du 3 mai 1920) jusqu’en 1920. Il fut mis à la retraite d’office à partir du 1er octobre 1920 à la suite d’un rapport d’inspection qui faisait état de ses difficultés. Il se retira à Gréoux.

Membre de la Ligue des Droits de l’Homme, militant syndicaliste, il adhéra au Parti socialiste SFIO en 1908, puis s’orienta vers le communisme à la sortie de la guerre. En mai 1919, à Sainte-Tulle, il intervint pour soutenir une grève des terrassiers de la Société des grands travaux de Marseille. Dans une réunion d’ouvriers grévistes, il prit la parole et déclara leur apporter le salut de la Fédération socialiste du Sud-Est dont il se dit le secrétaire (AN, F7/13744, rapport du 23 mai 1919). Les syndicats des Basses-Alpes n’étant pas organisés en Union départementale, il prit l’initiative d’une réunion le 27 juillet 1919 à Manosque avec un dirigeant de la CGT. Ce projet n’aboutit immédiatement. À l’assemblée générale du Syndicat de l’enseignement laïque des Basses-Alpes, signalé "parmi l’élément extrémiste", il condamna l’intervention française en Russie et vota des subsides pour les mineurs en grève et les instituteurs sanctionnés. Il adhéra au Parti communiste dès sa création avec toute la Fédération socialiste et lui resta fidèle. Il fut présenté par ce parti aux élections législatives de 1924 consécutives à la mort brutale de Frédéric Aillaud contre le "renégat" Louis Gardiol. Il obtint 4% des suffrages exprimés. Au début des années trente, il présidait le Syndicat des membres de l’enseignement laïque des Basses-Alpes créé en mai 1925 et adhérant à la CGTU. Rendant compte de son intervention au congrès antifasciste bas-alpin de Malijaï, le 15 avril 1934, l’organe de la SFIO, Le Travailleur des Alpes du 21 avril, écrivait : "on ne peut pas partager en tous points les façons de juger de Bessand, mais dans les Basses-Alpes, tous les militants de gauche ont la plus profonde estime pour ce vieux militant dont le nom est synonyme de droiture et de dévouement à la sainte cause du prolétariat". En mars 1943, les Renseignements généraux considéraient que son frère et lui « avaient été à un moment donné les véritables dirigeants du parti communiste dans le département des Basses-Alpes ». Inscrit au Carnet B des Basses-Alpes le 29 décembre 1934, comme sa famille, il fut particulièrement surveillé après la dissolution du Parti communiste en 1939.

Comme son frère Frédéric et sa belle-sœur, il fut astreint à résider à Colmars-les-Alpes, à plus de 1 000 mètres d’altitude, par un arrêté préfectoral du 2 mai 1940. Annette l’y accompagna. Comme son frère, il sollicita avec sa sœur, dès l’été 1940, la possibilité de retourner à Gréoux, arguant du climat de Colmars, plus rigoureux l’hiver. Annette fut déplacée à Reillanne, dans le sud du département, par un arrêté du 9 octobre 1940, mais elle refusa de laisser de laisser son frère. Dans une nouvelle sollicitation, le 29 juin 1942, Arsène et sa sœur indiquaient que lui ne pouvait vivre seul étant presque infirme et n’y voyant guère à cause de la cataracte et qu’elle, qui n’avait jamais été membre d’un parti politique, était malade. Comme leur frère Frédéric, ils ne purent regagner Gréoux qu’en avril 1944. Annette y mourut peu après la Libération, le 3 octobre 1946. Son frère lui survécut un peu plus de dix ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article99857, notice BESSAND Joseph, Arsène par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 2 décembre 2022.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat., F7/12971, 13130, 13132, 13357, 13744, préfet des Basses-Alpes, Digne le 9 août 1921. — Arch. Dép. Alpes-de-Haute-Provence, Fonds Bessan (18 J). — Le Travailleur des Alpes, 1920-1934. — L’Avant-Garde Bas-Alpine, 27 janvier 1924. — Nathalie Boyer, Le Front Populaire dans les Basses-Alpes 1934 – 1938, mémoire de maîtrise d’Histoire (Aix-Marseille I), 2 vol., 1997 – Pierre Girardot, La lavande et le Palais-Bourbon. Souvenirs pour une histoire du Parti communiste dans les Basses-Alpes, Paris, Éditions sociales, 1980. — Renseignements Colette Chauvin. — Notes de Jean-Marie Guillon et de Jean Signoret.

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