JOLLY Geneviève [née FORGET Geneviève, Marie, Émilie]

Par Florence Regourd, Annie Pennetier, Claude Pennetier

Née le 13 août 1900 à Nantes (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), morte le 16 mars 1988 à Luçon (Vendée) ; lingère ; militante communiste des Deux-Sèvres, de Haute-Vienne, de Loire-Inférieure et de Vendée.

Geneviève Jolly et Robert Jolly en 1928, à Limoges.
Geneviève Jolly et Robert Jolly en 1928, à Limoges.

Fille d’une ménagère, Émilie Bertru et d’un forgeron, Edouard Forget mort en mars 1917, originaires de Redon (Ille-et-Vilaine), Geneviève Forget cadette d’une fratrie de quatre enfants, perdit un de ses trois frères, René, à la guerre, en décembre 1917. La famille était de tradition républicaine, laïque et communisante. Son frère, André Forget* était « bon militant syndicaliste ». Travaillant dans une usine de métallurgie à Nantes, il était syndiqué CGTU, y exerça des responsabilités puis fut déporté politique à Auschwitz où il mourut en novembre 1942.

Elle fréquenta l’école primaire de 7 à 13 ans 1/2 mais elle ne précisait pas dans son autobiographie si elle avait eu le certificat d’études. Ses enfants affirment qu’elle l’avait et rappellent qu’elle ne faisait pas de fautes d’orthographe. La mention « parle quelques mots d’anglais » fait penser à une formation complémentaire, mais ce n’est pas le cas. Toute la famille était soucieuse de s’instruire et ses frères, André et Henri ont pu lui inculquer ces quelques notions. (Henri Forget devint greffier au tribunal de Nantes dans les années 1930). Cependant, elle précise qu’elle parle le français « imparfaitement » et elle ajoute en parlant de ses lectures militantes : « je n’avais pas les bases pour m’instruire seule ; J’ai dû interrompre la lecture [de certains livres théoriques] car je ne pouvais rien assimiler ». Elle s’instruisit « en lisant et surtout en discutant ». Ses connaissances politiques venaient de la presse, particulièrement de l’Avant- garde (« je le trouve parfait ») mais elle dut renoncer aux abonnements des revues pour des raisons financières. Il lui manquait, dit-elle quelqu’un « pour la guider ».

Geneviève Forget commença son apprentissage de lingère repasseuse en février 1914, travaillant dix heures par jour et devient ouvrière trente mois plus tard. Elle gagnait en 1923-1926 (manufacture de lingerie à Nantes) 12 F par jour et en 1928-1929 (Limoges, Manufacture de vêtements, payée aux pièces), 25 F comme presseuse.

Elle adhéra au Parti communiste en mai 1925 à Nantes, après avoir vu une pièce de théâtre de Marcel Thoreux, Quand les gueux viendront et « qu’Ernest Le Goff* a su me commenter » en la « travaillant » politiquement. Sa cellule la délégua à la conférence régionale de Rennes en 1926. Lingère dans la succursale nantaise des Galeries Lafayette, elle fut déléguée, en septembre 1927 à une conférence nationale féminine de la CGTU.

Elle rencontra son futur époux lors d’une réunion tenue par Le Goff en Vendée. Mariée le 29 octobre 1927 à Nantes avec Robert Jolly, elle le suivit à Limoges fin 1927, et y milita activement. Elle y donna naissance à sa première fille, Suzanne, en août 1929 et cessa alors de travailler en usine. Le Parti communiste envoya Robert Jolly à l’École léniniste internationale de Moscou (ELI) en 1931-1932. La situation matérielle de Geneviève Jolly devint alors très difficile, car elle avait donné naissance à un enfant après la départ de son mari. Ses beaux-parents l’accueillirent sur leur exploitation agricole, à Mouzeuil (Vendée) où elle loua deux pièces dans une petite maison. . Elle aidait à la culture, travaillait avec une couturière et exerça la fonction de garde-barrière quelque temps. Au retour de Robert Jolly, elle s’installa à Thouars puis à Niort et ne reprit ses activités communistes qu’en 1936, mais elle souffrit des mauvais rapports de son mari avec les cadres communistes des Deux-Sèvres. Le Parti communiste lui fit suivre une école régionale de cinq jours à Niort. Elle écrivait quelques articles et faisait des réunions publiques.

En 1937, Geneviève Jolly était membre du comité de section communiste, secrétaire du Secours populaire à Niort et au bureau du Comité mondial des femmes.

À Nantes à partir de 1938, elle travailla à nouveau et pendant la drôle de guerre, remplaçant son mari à l’usine quand il fut mobilisé en septembre 1939. Des conditions de travail difficiles accélèrent son accouchement. Sa seconde fille, Odette, naquit le 26 juin 1940 à Nantes durant l’absence de son père. La famille revint s’installer définitivement à Mouzeuil début 1941. Ils accueillirent durant la guerre les enfants d’un frère de Geneviève Jolly (Henri) et les deux garçons du couple Citerne*, militants communistes et proches amis, alors dans la Résistance. Ils furent l’objet de la surveillance des gendarmes, surtout quand, en 1944, Robert Jolly rejoignit la Résistance dans le maquis du sud Vendée. Geneviève Jolly devait alors assumer seule le devenir de la famille. Elle recueillit des résistants qu’elle cacha, dont Jean Cailler, un des organisateurs de la résistance en Vendée, abattu dans la Vienne en août 1944, fils d’Hubert Cailler, secrétaire fédéral du PCF clandestin en Vendée d’août 1943 à septembre 1944, abattu par les Allemands à La Roche-sur-Yon (Vendée) en septembre 1944. Elle dirigeait clandestinement la cellule du parti à Mouzeuil durant l’absence de son mari. Sa petite fille à la main, pour tromper la surveillance, elle distribuait le soir les journaux clandestins.

À la Libération, son mari reprit la direction de la cellule de Mouzeuil composée alors d’une quinzaine de membres. Geneviève Jolly restait adhérente au PCF et à l’UFF, sans y exercer aucune responsabilité. Le couple Jolly et ses enfants demeurèrent à Mouzeuil (devenu Mouzeuil Saint-Martin). Pour compléter les revenus de la famille, bien trop modestes, elle travaillait à la couture et à partir de 1960, comme lingère à la colonie de vacances d’Argenteuil, située à Saint-Hilaire de Riez (Vendée). Elle y séjournait de Pâques à fin septembre, chaque année, jusqu’à sa retraite en 1965. Restée fidèle aux idées du PCF, elle lisait L’Humanité et était abonnée à France-URSS.

Entrée à la maison de retraite de Chaillé-les-Marais (Vendée) en 1980, atteinte d’une leucémie, elle mourut la même année que son mari, en 1988, à l’hôpital de Luçon.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article139247, notice JOLLY Geneviève [née FORGET Geneviève, Marie, Émilie] par Florence Regourd, Annie Pennetier, Claude Pennetier, version mise en ligne le 7 janvier 2012, dernière modification le 14 juin 2022.

Par Florence Regourd, Annie Pennetier, Claude Pennetier

Geneviève Jolly et Robert Jolly en 1928, à Limoges.
Geneviève Jolly et Robert Jolly en 1928, à Limoges.

SOURCES : RGASPI, 495 270 2973, autobiographies, la première sans date, la deuxième le 7 avril 1937. — État civil de Nantes. — Témoignages de ses deux filles, Mme Auvinet et Mme Charrier (2012).

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