EVERTZ Henri [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Michel Cordillot

Mineur ; syndicaliste ; militant anarchiste, puis socialiste après 1900.

Mineur de charbon et militant anarchiste, Henri Evertz fut en 1896 l’un de deux orateurs qui animèrent la soirée organisée le 21 mars à Weir City (Kansas) par le groupe anarchiste local pour commémorer l’anniversaire de la Commune de Paris. L’autre orateur était Julien Bernarding.

Sans doute étroitement surveillés à dater de ce jour, les deux hommes furent arrêtés quelques semaines plus tard pour un vol qu’ils ne nièrent pas. Après avoir purgé quatre mois de prison préventive, Evertz et Bernarding passèrent en jugement en septembre 1896 et furent condamnés à trois ans de pénitencier.

En février 1897, La Tribune libre commença à recueillir les premières souscriptions destinées à hâter leur libération. Dans une longue lettre adressée à ce journal, Bernarding et Evertz donnèrent une description détaillée de leur vie quotidienne, y compris de leur travail dans la mine de charbon du pénitencier de Lansing.

Libérés par anticipation le 1er juillet 1898, les deux compagnons décidèrent de partir ensemble à travers l’Amérique du Nord. Leur correspondance avec la rédaction de La Tribune libre montre bien leur déception au contact d’une classe ouvrière jugée esclave et apathique. Seule la coopération leur semblait désormais constituer une voie réaliste vers l’émancipation des travailleurs. Ils n’avaient pas pour autant abandonné leurs convictions profondes, puisque fin janvier 1899, ils furent expulsés de Roslyn (Washington), après une débat public houleux avec le curé au sujet de l’anarchie. À souligner aussi que dans une correspondance adressée de Roslyn à la rédaction de la Tribune libre, Evertz s’était montré très critique sur l’attitude des ouvriers blancs vis-à-vis des Noirs, notamment au plan syndical.

Bernarding et Evertz se séparèrent peu après. Evertz se rendit au Canada, dans l’île de Vancouver, où il resta près de six mois en dépit de conditions de travail dignes du Moyen Âge. Il retourna ensuite à Higby dans le Montana, d’où il reprit contact avec La Tribune libre en septembre 1899. Tout en souhaitant que les ouvriers s’instruisent pour marcher vers le communisme et l’anarchie, il se disait convaincu que les Unions de métier étaient indispensables.

En octobre 1900, Henri Evertz s’installa à Saint Charles (Michigan). Rallié au socialisme debsien, il était le seul militant socialiste dans cette ville. En l’espace d’un an, il plaça 56 abonnements à l’Appeal to Reason. Pour sa première participation aux élections présidentielles en tant que candidat du Social Democratic Party, Eugene Debs obtint 15 voix à Saint Charles lors des élections de novembre 1900.

Henri Evertz reprit contact avec Louis Goaziou dès le lancement de L’Union des travailleurs au printemps 1901. En février 1902, il annonçait avoir réussi à former à Saint Charles une section du Parti socialiste américain.

Fortement impliqué dans l’UMW, Evertz annonça en avril l’imminence d’une grève dure parmi les mineurs, qui étaient syndiqués en grand nombre. Lorsque le mouvement fut lancé, il fut chargé d’aller collecter des fonds pour les grévistes et il se rendit à cet effet dans l’Illinois (Danville, Belleville), où il collecta au total 6000 dollars. La grève se termina courant août par une demi-victoire des mineurs.

Propagandiste infatigable, Henri Evertz plaça début 1903 dans son entourage 9 abonnements d’un an à L’Union des travailleurs. En juin 1903, il se mit en route pour visiter l’Illinois et y trouver de nouveaux lecteurs pour ce journal. Au cours de son périple, il eut la joie de pouvoir rencontrer Louis Goaziou à Pana fin juillet. Après quelques semaines de prospection, il fit parvenir à la rédaction le montant des 24 abonnements recueillis à Westville, et en septembre il figurait en 2e position pour le concours d’abonnement. Début 1904, sur la route du retour, entre Saginaw et Saint Charles, il recueillit encore 8 abonnements et 3 renouvellements d’abonnement, et en mars il se porta acquéreur de deux actions de la coopérative de publication de L’Union des travailleurs. Preuve du progrès de l’implantation des socialistes à Saint Charles, Debs y obtint au total 119 voix en novembre 1904. Ce même mois Evertz plaça dans son entourage 16 abonnements d’essai à L’Union des travailleurs, puis 14 abonnements et renouvellements d’un an en février 1905.

Après qu’Evertz eut acheté une 3e action de la coopérative de publication fin1906, ses rapports avec l’Union des travailleurs se distendirent au point que le contact fut perdu. Il semblerait qu’Evertz ait alors fait le choix de l’efficacité en militant au sein des organisations anglophones. Ce fut la rédaction de L’Union des travailleurs qui passa une annonce pour reprendre langue avec lui en février 1914. Evertz ayant aussitôt répondu le lien fut renoué et scellé par un réabonnement.

Henri Evertz figurait toujours sur la liste des abonnés de L’Union des travailleurs fin 1915.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article159621, notice EVERTZ Henri [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Michel Cordillot, version mise en ligne le 8 juin 2014, dernière modification le 9 décembre 2018.

Par Michel Cordillot

SOURCES : L’Ami des ouvriers, 15 avril 1896. — La Tribune libre, 24 septembre 1896, 18 février, 4 mars 1897, 7 juillet, 27 octobre 1898, 12 janvier, 2 février, 28 septembre 1899, 11 janvier 1900 entre autres. — L’Union des travailleurs, 15 août 1901, 20 février, 17 avril, 12 juin, 19 juin, 3 juillet, 7 août, 21 août 1902, 26 février, 25 juin, 30 juillet, 13 août, 20 août, 3 septembre 1903, 18 février, 31 mars, 1er décembre 1904, 23 février, 23 mars 1905, 13 décembre 1906, 12 février, 5 mars, 10 décembre 1914 entre autres.

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