BERTHY Angèle

Par Marie-Thérèse Cheroutre

Née le 3 octobre 1913 à Paris (XVe arr.), morte le 22 mars 2002 à Paris (XIVe arr.) ; travailleuse sociale auprès de jeunes filles délinquantes ; membre de l’A ssociation des Guides de France à Ivry, Vitry et Villejuif (Seine, Val-de-Marne) ; cheville ouvrière de l’Association nationale d’entraide féminine (ANEF).

Ses parents étaient de petits propriétaires vignerons originaires de l’Aude aux prises avec des difficultés. Son père travaillait chez un tonnelier, sa mère tenait une petite épicerie. Plusieurs enfants morts en bas âge laissèrent de ce fait Angèle, née la dernière, fille unique. Ses parents ayant rejoint la région parisienne, elle fit des études primaires dans une école privée de Charenton-le-Pont (Seine, Val-de-Marne), jusqu’à son brevet, puis obtint rapidement un poste aux Chèques Postaux du fait du veuvage de sa mère. Tout en travaillant, elle obtint un diplôme de jardinière d’enfants et dirigea des colonies de vacances, par exemple celles du Touring Club de France (1939) et de la municipalité de Gennevilliers (1940).

Pendant les années d’Occupation, elle fit des études d’infirmière et d’assistante sociale, puis se spécialisa dans les tâches de conseillère du travail. Elle eut des postes à temps partiel dans plusieurs petites entreprises du 13e arrondissement avant d’être engagée par l’entreprise Sciaky (greco-franco-américaine), spécialisée en machines pour soudure électrique, installée à Vitry-sur-Seine. Chargée du service social de l’entreprise, elle eut le champ libre pour mener son travail, du reclassement au relogement du personnel. Au début de sa vie professionnelle, elle mena de front des engagements bénévoles dans l’association des Guides de France dont elle avait suivi le parcours de formation. Tout en étant responsable à Ivry d’un « feu » de Guides aînées, terminus de la formation guide, elle eut en charge le « district » d’Ivry où elle eut l’occasion de rencontrer Madeleine Delbrêl dont l’engagement dans la « banlieue rouge » était déjà connu. En juillet 1946, elle participa à une session du Scoutisme français à Marly-le Roi (Yvelines) organisée par Henri Joubrel, Éclaireur de France visant à rassembler les nouveaux éducateurs.

C’est dans cette mouvance que la supérieure du centre de rééducation de Chevilly-Larue (Seine, Val-de-Marne) s’était adressée au père Rhodain, aumônier des prisons, pour l’aider à « ouvrir les fenêtres » de son énorme établissement de 300 pensionnaires. Étant donné son intérêt et sa responsabilité territoriale, Angèle Berthy fut sollicitée. Aidée de quelques guides et éclaireuses (« les cheftaines »), elle vécut ainsi ses premiers contacts avec les mineures, par le jeu et les activités d’expression. Des stages de formation rassemblaient des éducatrices de toute la France, venues des principaux établissements féminins : les Bons Pasteurs, la Solitude de Montpellier mais également Cadillac et la section des mineures de Fresnes. Le « club des Canettes » à Paris était le lieu ouvert de rencontres et d’échanges quasi hebdomadaires où se forgeaient un esprit et des projets communs.

Mais le grand problème était celui de la sortie de l’établissement de toutes ces pensionnaires à leur majorité alors quasiment livrées à elles-mêmes. Les « cheftaines » de loisirs étaient leur seule connaissance extérieure et elles se trouvaient souvent sollicitées personnellement. Pour leur trouver un travail, un logement, une véritable entraide était nécessaire, mais aucune organisation collective n’existait encore. L’Association nationale d’entr’aide féminine (ANEF) fut alors fondée autour de Marguerite-Marie Michelin, vice-présidente des Guides de France, sensibilisée, durant sa déportation, aux drames de la prostitution par la rencontre de femmes en ayant été victimes. L’association fut créée en 1952 par des Guides et Eclaireuses avec comme but la réadaptation sociale des jeunes filles délinquantes, inadaptées ou en danger moral, à leur sortie des établissements de rééducation. On y retrouva Angèle Berthy, Françoise Malleron-Astruc, Maïté Perrin-Flavigny, Monique Beauté-Néry.

En 1979, la disponibilité que lui laisse la retraite lui fit découvrir en Haïti (1979-1980) le drame de la prostitution et le combat engagé à Hinche par le père Lataste (dominicain) et ses successeurs, pour fournir les moyens de sortir de l’engrenage de la misère par une réinsertion sociale. De retour en France, elle mit ses réseaux de relations, ses convictions et sa ténacité au service du développement des ateliers Lataste, de la vente de leurs produits, de la constitution de bourses pour la formation des femmes, de la création d’emplois adaptés à leur situation familiale. Elle fut profondément inspirée par une spiritualité évangélique dans un esprit œcuménique.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article16514, notice BERTHY Angèle par Marie-Thérèse Cheroutre, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 3 novembre 2009.

Par Marie-Thérèse Cheroutre

SOURCES : De l’impossible à la chaîne d’amitié - Collectif d’acteurs témoins 1945-1965, Saint-Amand-Imprimeur, 1991, 176 p. — Fonds Angèle Berthy, Archives des Guides de France, 65 rue de la Glacière, 75013 Paris.

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