PETIT Albert

Par Dominique Tantin, Claude Pennetier

Né le 30 mai 1886 aux Marets (Seine-et-Marne), fusillé le 16 mars 1942 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; géomètre.

Albert Petit en 1930.

Fils de Louis, Auguste Petit et de Louise, Philomène Charpentier, natif de Seine-et-Marne, Albert Petit vint avec sa famille s’installer à Villeconin (Seine-et-Oise, Essonne) vers 1910 et fréquenta l’école de cette petite ville. Mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, il se maria en novembre 1911 avec une jeune fille de Villeconin, Juliette Chardon (avec contrat de mariage). Le couple eut trois enfants dont un, André, né en 1915, mort en 1933. Albert Petit tenait sa photo en main au moment de son exécution. Ils eurent un fils Robert (1912-1989) et une fille, Geneviève (1914-2004).
Géomètre-expert, Albert Petit avait été élu conseiller municipal de Villeconin le 10 décembre 1919, réélu le 17 mai 1925, et le 13 mai 1929. Il était également administrateur de la Caisse d’épargne locale.
Il fut arrêté dans cette localité par la Feldgendarmerie le 20 février 1942. Il aurait été dénoncé par sa femme, ce que confirment ses déclarations à l’Abbé Stock. Il avait en sa possession un revolver, des cartouches et un fusil-mitrailleur français.
Il fut condamné à mort le 13 mars 1942 par le tribunal militaire de la Feldkommandantur 758 de Saint-Cloud (Seine-et-Oise, Hauts-de-Seine) pour « détention illégale d’armes » et fusillé au fort du Mont-Valérien le 16 mars à 16 h 35.
Il fut reconnu « Mort pour la France » par le ministère des Anciens Combattants le 9 novembre 1972. Son nom est inscrit sur le monument commémoratif du Mont-Valérien.
Sa femme, Juliette Petit fut condamnée à 7 ans de prison (elle en fit trois mois) et à la confiscation de ses biens, ce qui ne fut pas appliqué. Elle finit sa vie chez les Soeurs du bon secours à Versailles.
Pendant de longues années, à la demande de la famille, la mairie de Villeconin refusa d’inscrire le nom d’Albert Petit sur le monument aux morts de la commune, son "inscription risquerait de troubler l’ordre public du village" disait le maire Louis Gagnaire, en raison d’"une contestation d’anciens habitants et une opposition farouche de la famille du défunt" (Le Parisien). Des anciens combattants dont son ami d’enfance, le résistant René Maubailly, protestaient vigoureusement dans les années 1990 et au nombre d’une cinquantaine, ils déposèrent une gerbe sur le monument aux morts le 16 mars 2002, soixante ans après son exécution.
René Maubailly affirmait : "C’était un homme profondément en avance sur son temps sur les questions sociales. Il défendait le vote des femmes et faisait figure de progressiste dans Villeconin (...) on le considérait comme communiste". Et il le qualifiait de résistant.
Le secrétaire d’État aux anciens combattants, Jean-Pierre Masseret et le député de l’Essonne Yves Tavernier, maire de Dourdan, avaient protesté contre ce refus municipal en 1999, sans réussite. Yves Tavernier avait réussi à faire organiser en mairie une réunion de conciliation le 21 mai 2001 avec le colonel Colson, le président de l’Union des anciens combattants Jean-Claude Buisset : "À cette rencontre le Maire de Villeconin, Monsieur Gagnaire, s’était fait accompagner de trois opposants absolus à l’inscription de Monsieur Petit sur le Monument aux Morts de la commune. Le débat a été effrayant de mesquinerie, de médiocrité et de bêtise. L’opposition se résume à des haines personnelles. Une des femmes, en particulier, ayant épousé la cause de l’épouse de Monsieur Petit s’est montrée particulièrement virulente. Il a été impossible de faire entendre raison à des gens bornés, imperméables à tout argument de bon sens" (lettre d’Yves Tavernier du 8 août 2001).



L’abbé allemand Franz Stock l’évoque dans son Journal de guerre :
Prévenu par St-Cloud que Monsieur Albert Petit à Villeconin par Etrechy (S. et O.) doit être fusillé à 4 h 30. Un vieil homme, pour détention d’armes (un fusil-mitrailleur et munitions), ne pratiquait plus, inconsolable, sa femme l’aurait dénoncé. Couple qui ne s’entend pas, bébé qu’il n’a pas encore vu. Il avait l’image mortuaire de son fils (20 ans) sur lui. Tous mes efforts pour l’amener à recevoir les sacrements furent infructueux. Même en faisant appel à l’image mortuaire qu’il avait vénérée. Il ne croyait en aucun Dieu ni vie éternelle, mais me demanda malgré tout de l’accompagner. Je priai souvent son fils pour qu’il nous aidât. En route vers le poteau je lui demandai encore une fois de penser à son âme, en vain. Attaché, yeux non bandés, il m’appela, demanda : "Avez-vous un crucifix ?". Je dis : "Voulez-vous prier avec moi ?" Récitai un acte de contrition qu’il dit aussi avec repentir, les mains jointes, lui donnai l’absolution générale. Il me réclama encore une fois l’image de son fils, qu’il embrassa.
Enterré au cimetière d’Ivry. »

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article169663, notice PETIT Albert par Dominique Tantin, Claude Pennetier, version mise en ligne le 11 janvier 2015, dernière modification le 23 avril 2022.

Par Dominique Tantin, Claude Pennetier

Albert Petit en 1930.
Tombe d’Albert Petit au carré militaire du cimetière parisien d’Ivry-sur-Seine.
Le 16 mars 2002, pour le soixantième anniversaire de son exécution, les anciens combattants posent une gerbe sur le monument aux morts de Villeconin. Le nom de Petit qui apparaît sur le monument est celui d’un homonyme.

SOURCES : AVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). – Site Internet Mémoire des Hommes. – Mémorial GenWeb. — Franz Stock, Journal de guerre. Écrits inédits de l’aumônier du Mont Valérien, Cerf, 2017, p.72-73. — Dossier recueilli par Fabrice Bourrée : lettres de René Maubailly, de Antoine Maestrati, secrétaire national de Commission nationale de la Médaille de la Résistance française, d’Yves Tavernier, député de l’Essonne, de Pierre Mutz et de Jean-Pierre Masseret. — Le Parisien, article de Grégory Plouviez, "Polémique autour du monument aux morts", 3 mars 2002. — Site Filae.

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