LEMAITRE Pierre René François Georges

Par Jean-Louis Ponnavoy

Né le 2 février 1911 à Châtillon-en-Vendelais (Ille-et-Vilaine), fusillé le 21 août 1944 à Heilbronn (Bade-Wurtemberg, Allemagne) ; économe des hospices civils ; résistant du réseau SR Alliance.

Pierre Lemaître était le fils de Pierre Laurent, chef cantonnier, âgé de 34 ans et de Rosalie Louise Aulnette. Il se maria le 3 août 1936 à Coglès (Ille-et-Vilaine) avec Christiane Joséphine Marie Louise Letemple, dont il eut un enfant.

Pierre Lemaître apprit le métier de serrurier tout en travaillant dans un bureau du service des Ponts et Chaussées pendant cinq ans. En 1932 et 1933, il effectua son service militaire au 47e régiment d’infanterie et à cause de sa mauvaise vue, il fut versé dans la musique de ce régiment. Il fut ensuite aide-géomètre et à partir de 1938, il travailla comme économe dans l’administration de l’hôpital de Vitré. Il fut rappelé sous les drapeaux en 1939 et affecté à un emploi de bureau. Il fut contacté par un grossiste en légumes de sa connaissance, nommé Gougeon et qui appartenait au réseau de renseignements militaires Alliance sous le pseudonyme de "Jardin".

Celui-ci lui demanda vers mi-juillet 1943 s’il pouvait utiliser l’adresse de l’hôpital pour les courriers lui étant adressés. Ayant accepté la proposition Pierre Lemaître devint boîte aux lettres et agent de renseignements d’Alliance avec le matricule "S 92". En tant que directeur économe des hospices civils, il accepta également de mettre des locaux à disposition pour y accueillir des aviateurs alliés et un poste émetteur radio ainsi que des rencontres avec le responsable du réseau pour la région ouest.

Il fut arrêté par la Gestapo en pleine réunion de la commission administrative des hospices de Vitré, le 1er octobre 1943, suite à l’infiltration du réseau par l’Abwehr. Il fut interné à la prison de Rennes puis à celle Fresnes (Seine, Val de-Marne) le 2 janvier 1944 et déporté depuis le camp de Compiègne, à destination de l’Allemagne où il fut incarcéré à la prison de Pforzheim (Bade-Wurtemberg) le 25 janvier. La Gestapo de Strasbourg transmit un dossier d’accusation d’espionnage concernant également René Lèbre*, au Tribunal de guerre du Reich qui y apposa les tampons « secret » et « affaire concernant des détenus » ainsi que la mention « NN » (Nacht und Nebel-Nuit et Brouillard). Le 6 mai 1944, il fut transféré à la prison de Freiburg-im-Breisgau (Bade-Wurtemberg) en vue du jugement qui eut lieu le 19 juin 1944 devant le 3e Senat ou Chambre du Tribunal de guerre, présidé par le juge Karl Schmauser et il fut condamné à mort pour espionnage au profit d’une puissance ennemie.

Le 27 juin 1944, il fut transféré à la prison de Schwäbisch Hall (Bade-Wurtemberg), dans l’attente de la confirmation du jugement par l’amiral Max Bastian, président du Tribunal, qui intervint le 10 juillet et du recours en grâce qui fut rejeté par le Führer le 17 juillet.

Le 18 août, le directeur de la prison fit le tour des cellules pour prévenir les détenus qu’ils allaient être transférés dans la nuit du 20 au 21 août et que leurs affaires personnelles devaient rester sur place. Ils durent remplir une étiquette indiquant leur adresse en France pour les y envoyer. Dès lors ils comprirent le sort qui les attendait.
Pierre Lemaître et 23 autres codétenus furent conduits en camionnette le 21 août à l’aube par groupes de huit à la caserne Schlieffen, à Heilbronn (Bade-Wurtemberg). Ils furent fusillés au champ de tir d’Heilbronn après avoir reçu l’assistance d’un prêtre, mais en refusant d’avoir les yeux bandés. Ils moururent courageusement en criant "Vive la France". Ils furent inhumés dans le cimetière de Sonthein-Neckar et le dernier vœu des 24 condamnés étant « d’être enterrés en France » fut exaucé par le réseau "Alliance" qui rapatriera les corps en juin 1947, à Strasbourg. Il fut inhumé à la nécropole nationale de Strasbourg-Cronenbourg (Bas-Rhin).

Il fut homologué comme agent P2 chargé de mission de 3e classe correspondant au grade de sous-lieutenant de la DGER (Direction générale des études et recherches) et reçut à titre posthume la Croix de chevalier de la Légion d’Honneur et la Médaille de la Résistance le 3 août 1946 et la Croix de guerre le 12 juin 1947.

Il obtint la mention "Mort pour la France" le 9 avril 1946 et la mention "Mort en déportation" par arrêté du 26 février 2013 ainsi que la carte de déporté résistant le 19 novembre 1951.

Son nom figure sur la stèle commémorative à l’entrée de l’école Pierre-Lemaître, à Vitré.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article187517, notice LEMAITRE Pierre René François Georges par Jean-Louis Ponnavoy, version mise en ligne le 5 décembre 2016, dernière modification le 20 septembre 2018.

Par Jean-Louis Ponnavoy

SOURCES : Dossier DAVCC AC 21 P 76333 communiqué par Delphine Leneveu. — Auguste Gerhards "Tribunal de guerre du 3e Reich", archives historiques de l’armée tchèque, à Prague, éd. du Cherche-Midi, Paris 2014. — Mémorial de l’Alliance, 1948. — Mémorial Genweb. — État civil.

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