COPEAU Pascal, Axel

Par Gilles Morin

Né le 23 octobre 1908 à Paris, mort le 19 novembre 1982 à Pouilly-en-Auxois (Côte-d’Or) ; journaliste ; résistant, dirigeant de Libération-Sud ; membre du Conseil national de la Résistance ; militant progressiste ; délégué à l’Assemblée consultative provisoire en 1944-1945 ; député de la Haute-Saône aux deux Assemblées nationales constituantes (1945-1946).

Pascal Copeau était fils de l’écrivain et metteur en scène Jacques Copeau, créateur du théâtre du Vieux-Colombier et cofondateur de la Nouvelle revue française avec Gide et Schlumberger l’année de la naissance de Pascal. Il côtoya dans son enfance tout le monde des arts et des lettres. Après des études secondaires aux lycées Montaigne et Louis-le-Grand, Pascal Copeau obtint des Licences ès Lettres et en Droit, puis fut diplômé de l’École libre des sciences politiques. Il parlait couramment allemand, danois et anglais.
Copeau commença une carrière de journaliste au Petit journal, puis comme correspondant à Berlin des Nouvelles Littéraires de 1933 à 1936. De 1936 à 1939, il fut rédacteur en chef du journal Lu, puis de Vu et Lu, et directeur des émissions radiophoniques en langue allemande à Radio-Strasbourg. Mobilisé en août 1939 et rappelé à la radio, de la déclaration de guerre à l’armistice, il devint chef des informations en langues étrangères à la Radiodiffusion française. Il suivit le gouvernement en juin 1940 à Bordeaux.
Bon connaisseur de l’Allemagne et du nazisme, Pascal Copeau refusa la défaite. Replié à Lyon il rencontra Emmanuel d’Astier de la Vigerie qu’il avait eu sous sa direction à Lu. Ce dernier lui proposa d’entrer en Résistance à « la Dernière colonne », mais Copeau refusa, préférant tenter de rejoindre l’Angleterre. En mai 1941, il traversa la frontière pyrénéenne, mais fut arrêté au bout de 250 km de marche en direction du Portugal et interné dans le camp de Miranda en Espagne. En octobre 1941, les autorités espagnoles le refoulèrent en France. Il fut condamné à un mois de prison et enfermé à la prison de Pau. Relâché, il entra à Paris-Soir. Martin-Chauffier le mit en contact avec Emmanuel d’Astier de la Vigerie, devenu patron de Libération-Sud. Grâce à d’Astier, il fit une ascension fulgurante et, à la fin 1942, assura son intérim à la direction du mouvement après le départ de d’Astier pour Londres. Il entra au comité exécutif de Libération-Sud et, en 1943, au comité directeur des MUR. À l’été 1943, après le départ définitif de d’Astier, il prit la direction du mouvement sous les pseudonymes de Salard et de Carton. Il fut aussi chargé de l’exécutif du Mouvement de libération nationale (MLN) pour la zone-sud à la veille du débarquement. Selon Laurent Douzou, il était un des défenseurs des mouvements face aux partis politiques, y compris au Parti communiste, et « excell[a] à promouvoir une ligne activiste des mouvements et parv[int] à trouver des points d’accord avec les diverses composantes du bureau du CNR dont il [était] une figure de proue au printemps 1944 ». Olivier Wieviorka le considère lui comme un compagnon de route, comme d’Astier, mais bataillant pour une stratégie autonome de la Résistance, visant à intégrer le Front national au MLN pour unifier la Résistance, stratégie qui contrait alors celle du PCF car elle visait à limiter son hégémonie. Il se heurta surtout à Henri Frenay et aux responsables de Combat.
À la Libération, Copeau apparaissait comme un des « chefs de la deuxième vague de la Résistance » et le comité directeur du MLN le présenta sur une liste de ministrables pour le poste de commissaire à l’Information, mais le général de Gaulle ne fit pas appel à lui.
Membre du bureau permanent du Conseil national de la Résistance (CNR) au titre de Libération zone-sud en septembre 1944, secrétaire général du MLN à la même date, il démissionna de cette fonction en novembre suivant, mais fut élu au comité directeur en janvier 1945. Il participa à des tournées de conférences en faveur du MLN et milita pour la fusion MLN-Front national. Mais il fut battu au congrès national du MLN, tenu du 23 au 28 janvier 1945.
Délégué à l’Assemblée consultative provisoire à Paris en novembre 1944, Copeau était vice-président de la commission de la Justice et de l’épuration. Pour la première Assemblée nationale constituante en octobre 1945, il fut élu dans la Haute-Saône comme candidat n° 1 de la liste d’Union républicaine et résistante, patronnée par le Parti communiste et les MUR. Il obtint 27 603 suffrages et siégea avec les députés communistes. Il s’y fit remarquer pour une intervention au sujet de la DGER en janvier 1945. Réélu à l’Assemblée en juin 1946, il participa à la commission de la Constitution.
Le 21 décembre 1945, à sa formation, Copeau devint administrateur de la Société des éditeurs de Libération et fut actionnaire (30 actions) du journal Action dès sa fondation en janvier 1945. Il était aussi associé de la Société de sondages et statistiques, avec Yvon Morandat, Pierre Hervé, J. D. Jurgensen et Max Barioux.
Tout semblait promettre Copeau à une grande carrière politique, mais en novembre 1946 il ne se représenta pas aux élections. Selon Laurent Douzou, reprenant Pierre Leenhardt, il est probable que c’est parce que son homosexualité, jusqu’alors ignorée, menaçait d’être révélée au grand jour.
Copeau redevint journaliste à la Radiodiffusion française, comme rédacteur occasionnel, mais il fut évincé en décembre 1950 après avoir traité Franco de « Hitler transpyrénéen ». On évoquait une intempérance pour expliquer cette sortie. Il entra à Radio-Maroc jusqu’en 1961. En 1964, il obtint un poste de directeur régional à Dijon dans l’ORTF, puis à FR3 : il y fut notamment responsable des productions de la 3e chaîne à Lyon en 1975, après avoir été chargé en 1970 d’une mission itinérante pour l’établissement des programmes régionaux de la chaîne.
Régulièrement le rôle de Pascal Copeau dans la Résistance et à la Libération était évoqué dans les polémiques sur ces dernières, avec l’accusation plus ou moins explicite d’avoir été un sous-marin communiste dès la Résistance, ce qu’il récusait fermement. Ainsi, au colloque sur l’histoire de la Libération de la France organisé par le Comité d’histoire de la Seconde Guerre mondiale en 1974, il déclarait : « Je n’ai jamais, ni de près ni de loin, ni avant, ni pendant, ni après la Résistance, appartenu au Parti communiste. Je n’ai jamais eu d’autres contacts avec les communistes que mandaté par les instances de mon organisation, et j’ai toujours exécuté ses mandats scrupuleusement. »
Lors de la polémique sur Jean Moulin, lancée par Henri Frenay qui affirmait que celui-ci était un « homme du Parti communiste », en 1977, Pascal Copeau s’engagea dans la polémique, expliquant que « la calomnie n’est pas un raisonnement » (Le Monde, 13 octobre 1977). Pour lui, c’était Jean Moulin qui avait amené les communistes à être « compagnon de route du gaullisme » et non l’inverse. Il récusait aussi l’accusation portée contre lui d’être, selon la formule de Jacques Soustelle « un communiste clandestin au sein de la clandestinité gaulliste ».
Copeau prenait aussi parfois des positions dans le débat public de son temps. Il fut ainsi signataire de la lettre rédigée par des personnalités de la Résistance après l’attentat de la rue Copernic en octobre 1980 et d’un appel du comité national de soutien à François Mitterrand en mars 1981, après avoir appelé à voter François Mitterrand en 1974 au 2e tour (au premier, il avait appelé à voter Chaban-Delmas).
Mais ces dernières années furent sombres, dépressives. Il mourut dans un accident de la route.
Pascal Copeau était le frère de l’actrice Marie-Hélène Dasté, chez qui il résidait régulièrement.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article20559, notice COPEAU Pascal, Axel par Gilles Morin, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 11 décembre 2018.

Par Gilles Morin

Arch. Copeau-Dasté, Arch.mun de Beaune. Droits réservés

SOURCES : Arch. Nat., CAC, 20060012/7, n° 5291. — Arch. Assemblée nationale, dossier personnel. — Le Monde, 13 octobre 1977. — Pierre Leenhardt, L’Histoire préfère les vainqueurs, Pascal Copeau (1908-1982), L’Harmattan, 1994. — Olivier Wieviorka, Une certaine idée de la Résistance, Défense de la France, 1940-1949, Seuil, 1995. — Laurent Douzou, La désobéissance, histoire du mouvement Libération-Sud, Odile Jacob, 1995. — Notice de P. Copeau par Laurent Douzou, dans François Marcot (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, Bouquin, 2006.

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