COULLAUD Gabriel

Par Alain Chaffel

Né le 26 août 1911 au Teil (Ardèche) ; cheminot ; militant communiste ; maire de Portes-lès-Valence (Drôme), conseiller général.

Élevé dans un milieu modeste (père contremaître dans une usine à chaux, mère petite épicière), Gabriel Coullaud grandit dans un climat politique familial modéré proche d’un radicalisme tempéré. Marié à une institutrice, il eut deux enfants.
Gabriel Coullaud entra au PLM en 1930 à Cavaillon (Vaucluse). Licencié au bout de quelques mois, à cause de la crise économique, il fut embauché à la Société de l’électricité de la vallée du Rhône comme dessinateur d’études. Réintégré au PLM en 1934, il fut affecté dans la Côte-d’Or avant d’être muté dans la Drôme en 1936. D’abord cadre administratif, il a terminé sa carrière comme sous-chef de bureau principal à Valence (Drôme) et prit sa retraite en 1966. Adhérent de la CGT depuis 1936, il a été délégué du personnel et membre du bureau national des cadres CGT après la guerre.
Sympathisant socialiste au moment de la guerre d’Espagne - mais favorable à l’intervention - il s’occupa de l’accueil des réfugiés espagnols à la gare de Valence.
Pendant l’Occupation, il fournit des renseignements aux cheminots FTP mais ne s’engagea pas dans la Résistance.
Membre du Front national à la Libération, il se rapprocha progressivement du PCF dans l’euphorie de l’après-guerre. Élu conseiller municipal de la petite ville de Portes-lès-Valence (Drôme) le 29 avril 1945, il devint premier adjoint, avant d’accéder au poste de maire en novembre 1946 lorsque l’ancien édile - sympathisant communiste - quitta le département.
Membre du Parti communiste à partir de 1947, Gabriel Coullaud resta maire de Portes-lès-Valence (2 737 habitants en 1946 ; 6 834 en 1975) pendant plus de trente ans. De 1953 à 1977, ses victoires furent acquises dès les premiers tours de scrutin. En 1978, il céda la place à son dauphin, Jean Guy Pinède, mais resta au conseil municipal jusqu’en 1983. Rêvant de voir ses enfants embrasser une carrière enseignante, Gabriel Coullaud fit de l’école son principal cheval de bataille. Sous son impulsion, la municipalité rénova rapidement et développa ses écoles primaires, créa des écoles maternelles, une école de danse, une école d’art, et accéléra la construction d’un CES. Elle mutiplia également les équipements sportifs et sociaux : gymnase, piscine, boulodrome, salle de judo, terrains de tennis, stade, halte-garderie, foyer des anciens, HLM, etc. Elle sut en outre valoriser les atouts économiques de la région - voie ferrée, nationale 7, autoroute, Rhône - en aménageant une zone industrielle créatrice d’emplois.
Candidat emblématique du PCF à toutes les élections - de 1958 à la fin des années 1970 - Gabriel Coullaud fut élu conseiller général du canton de Valence-Sud le 15 mars 1964. Seul conseiller communiste de la Drôme à l’époque, il fut réélu en 1970 et en 1976 en augmentant régulièrement son pourcentage de voix. En 1976, il franchit l’obstacle dès le premier tour dans un canton redécoupé autour de la ville de Portes-lès-Valence (il se retira en 1982 en faveur de Jean Guy Pinède).
Membre du bureau du conseil général, il participa à de nombreuses commissions dont celles des bâtiments départementaux (il fut à l’origine de la création de l’Hôpital psychiatrique du département) et de la jeunesse.
Bon gestionnaire, proche des gens et des réalités économiques, actif à l’assemblée départementale, Gabriel Coullaud sut élargir la base électorale du PCF, qu’il s’agisse de ses administrés de Portes-lès-Valence ou des nombreux paysans des communes rurales alentour.
En revanche, il fut moins heureux aux élections législatives. Ses quatre tentatives dans la circonscription de Valence - de 1962 à 1973 - se soldèrent par des échecs, en dépit de sa bonne implantation dans le tissu local. Battu de justesse en 1967 - 49,6 % des suffrages exprimés - par le député sortant, le gaulliste Roger Ribadeau-Dumas, il n’a jamais fait mieux.
Membre du comité fédéral du Parti communiste de 1959 à 1978, Gabriel Coullaud privilégia cependant toujours ses fonctions de maire et de conseiller général (il n’assista qu’épisodiquement aux réunions du comité fédéral). Il ne participa pas à une école centrale, limitant sa formation de militant communiste aux « journées d’études » destinées aux élus du Parti.
Très autonome vis-à-vis de l’appareil, il refusa toujours que les responsables locaux s’immiscent dans la gestion de sa ville et a parfois critiqué la politique générale du PCF. Il a par exemple condamné le vote des pouvoirs spéciaux en 1956 et jugé excessives les attaques de la direction du parti contre le PS au moment de la rupture de l’union de la gauche en 1977-1978.
Il semble aussi avoir été de moins en moins sensible au mirage des pays socialistes. S’il est difficile de dire avec précision quand son regard commença à se dessiller - il affirma, mais quarante ans plus tard, que « l’intervention des troupes du pacte de Varsovie en Hongrie [lui] a posé problème » - ses analyses sur l’URSS furent plus nuancées que celles des autres cadres du parti drômois. Un voyage d’études en Union soviétique en 1972 lui permit de constater que des « problèmes non résolus et des erreurs » caractérisaient la gestion municipale en URSS.
Cependant - comme beaucoup de vieux militants - il fut traumatisé par l’effondrement du mur de Berlin. Il vécut cet écroulement comme un échec et comme une trahison de la part des dirigeants nationaux du PCF qu’il accusa d’avoir travesti la réalité. Tout en gardant des convictions solidement ancrées à gauche, il se détacha alors progressivement du Parti communiste et ne reprit plus sa carte.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article20850, notice COULLAUD Gabriel par Alain Chaffel, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 21 avril 2022.

Par Alain Chaffel

SOURCES : Arch. fédération PCF de la Drôme. — Arch. comité national du PCF. — Procès-verbal de la conférence de section de Portes, 4 juin 1956, Bulletin municipal de Portes-lès-Valence de mars 1959. — Les Allobroges de la Drôme, 2 novembre 1972. — Interviews de Gabriel Coullaud du 7 octobre 1993 et d’Yvonne Allegret du 8 décembre 1993. — Comités fédéraux du PCF. — Alain Chaffel, Les communistes de la Drôme, de l’euphorie de la Libération à la désillusion du printemps 1981, thèse de doctorat, Université Lumière Lyon II, 1997.

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