CHANCEL Auguste, Napoléon, Cyprien

Né à Valence (Drôme) le 13 septembre 1808, mort à Nice le 26 novembre 1883. Révolutionnaire dauphinois, rallié par la suite à l’empire.

Auguste Chancel fit son apprentissage politique au cours de ses études de droit à Paris, à la fin de la Restauration, puis devint membre actif, en Dauphiné, de la Société des Droits de l’Homme, dont il fut en 1833 l’un des fondateurs dans la Drôme et fut incarcéré à plusieurs reprises. La première fois, ce fut pour avoir insulté, à Romans, le préfet de l’Isère et le capitaine de gendarmerie. En janvier 1833, domicilié à Grenoble (Isère), il fut l’introducteur de quatre saint-simoniens au cercle Pacot de Tournon. En 1834, il essaya de soulever le faubourg Saint-Joseph à Grenoble (fin février). Le 2 mars, il fut arrêté à Lyon, transféré à Saint-Étienne et accusé de complot parce qu’il était en relations avec les républicains de la Loire. Il fut néanmoins mis hors de cause (Mercure ségusien, mars-décembre 1834.) et bénéficia d’un sursis le 8 mars, puis d’un non lieu le 15 mars 1834. Par contre, après les journées d’avril 1834, contumax, il fut condamné par la Cour des pairs à 10 ans de prison et à la surveillance à vie, le 9 janvier 1836.
La révolution de Février fit de lui un commissaire du Gouvernement provisoire dans le département de la Drôme où il arriva en avril ; il était alors membre très actif de la Société républicaine centrale d’Auguste Blanqui et il avait signé comme tous les autres membres du bureau l’adresse du 1er mars protestant contre l’adoption du drapeau tricolore et le refus du drapeau rouge. Dans ses nouvelles fonctions, il se heurta à l’hostilité des monarchistes et aussi à celle des républicains modérés. Le 12 avril au matin, il se crut obligé de faire afficher une proclamation appelant tous les ouvriers à faire respecter son action : « Je ne suis pas étonné qu’une partie de la bourgeoisie m’ait refusé ses sympathies ; cette fraction égoïste et peureuse ne me connaît pas. » Pendant les journées des 12 et 13 avril, il essaya de se créer une clientèle dans la population ouvrière de Valence. Le 14, le commissaire général Troussard révoqua ses pouvoirs et lui donna l’ordre de quitter la ville. Chancel refusa de s’incliner. Le 14 au soir, une émeute éclata à Valence ; une troupe d’ouvriers se dirigea sur la préfecture pour protester contre la décision du commissaire général. Elle fut dispersée par les soldats et Chancel fut arrêté.
Il fut transféré à Paris, mais, sous la pression de la Société républicaine centrale, peut-être, sur intervention de Ledru-Rollin, plus probablement, le Gouvernement provisoire le laissa en liberté (22 avril), et, le 5 mai, amnistia tous ceux qui avaient été poursuivis à la suite des événements de Valence. Chancel Napoléon prit alors une part active à l’émeute parisienne du 15 mai : il se laissa tomber, au Palais-Bourbon, du haut des tribunes dans l’enceinte réservée aux députés et menaça de jeter par la fenêtre Troussard, devenu député de l’Isère. Il put s’enfuir en Suisse, d’où il fut expulsé de force vers Constantinople, d’où il revint aussitôt, et c’est par contumace que la Haute Cour de Bourges le condamna, le 3 avril 1849.
Devenu capitaine dans les troupes de Garibaldi, Chancel fut emprisonné à Pola, forteresse autrichienne, puis à Berne, Palerme, Chambéry. Après le coup d’État du 2 décembre 1851, il fut condamné à la déportation et passa sept ans à Lambessa. Il rentra à Grenoble en novembre 1858. Il publia un pamphlet : Félonie politique et usuraire, dirigée contre Saint-Romme qui, étant procureur général en 1848, avait, dans une lettre à Crémieux, ministre de la Justice, critiqué son attitude dans les événements de Valence. Saint-Romme avait été ensuite représentant républicain démocrate de l’Isère. Chancel prétendait dans ce libelle que si la révolution de 1848 avait échoué, c’était à cause de la « nullité politique » et des « reculades grosses comme des crimes » de ce « farouche charlatan de l’eunuque Montagne ». Il fut condamné pour diffamation.
Mais le gouvernement de Napoléon III lui avança le montant de la caution de son procès contre Saint-Romme, puis, une autre fois, 7 à 8 000 francs qui lui furent versés de la main à la main. On comprend que tous les républicains aient tourné le dos à ce personnage équivoque et sans doute peu équilibré.

C’était sans doute le Chancel* interné à Sainte-Pélagie en 1831.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article28425, notice CHANCEL Auguste, Napoléon, Cyprien, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 16 mai 2018.

SOURCES : Arch. PPo, A a/428. — Cour des pairs, Affaire du mois d’avril 1834. Rapport fait à la Cour des pairs par M. Girod (de l’Ain), Imprimerie royale, Paris, 1834-1836.— Tableau synoptique des accusés d’avril jugés par la cour des pairs établi par Marc Caussidière, Lyon, imprimerie de Boursy fils, 1837, Arch. Nat. BB 30/294, Bibl. Nat. in-4° Lb 51/24984. — Cour des pairs. Procès politiques, 1830-1835, Inventaire dressé par J. Charon-Bordas, Paris, Archives Nationales, 1983, CC 577 d 2 p. 42-46 ; 580 d2. — P. Barral, Un révolutionnaire dauphinois : Napoléon Chancel (Actes du 77e congrès des sociétés savantes, tenu à Grenoble en 1952. Paris, 1952, pp. 159 et suiv.). — J. Régné, La pénétration des idées nouvelles en Ardèche au début de la Monarchie de Juillet. — Hans Bessler, thèse, Zurich, 1952. — Notes de R. Shapira et M. Vuilleumier.

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