LELOIRE Auguste

Contremaître de filature de laine peignée. Il était, en 1848, vice-président du Club démocratique de Tourcoing (Nord), dont le président était le Dr Piscart.

Leloire fonda au mois d’avril la Société fraternelle des Fileurs de Tourcoing ; il en assumait le secrétariat. La Fraternelle se réunissait à tour de rôle dans trois estaminets différents, et notamment « À la Nouvelle Aventure », chez Irénée Destombes. Elle compta jusqu’à 1.450 membres, bien qu’il n’y eût à Tourcoing que 300 fileurs, mais l’article 2 des statuts permettait d’accueillir « tous ceux qui, par leur travail et leur emploi, sont en rapport avec la filature ».
C’était un véritable syndicat destiné à lutter contre l’arbitraire patronal. En octobre 1848, la Fraternelle obtint de tous les patrons filateurs, sauf un, un nouveau règlement qui comportait des concessions importantes en matière de salaires, de licenciements, de respect des horaires et des jours fériés, etc.
Leloire veilla personnellement à l’observation du décret du Gouvernement provisoire du 2 mars 1848, relatif à la limitation des heures de travail, « œuvre admirable, disait-il, et nous ne comprenons pas le fatal entêtement qu’on met à ne pas le faire observer ».
Devenu, le 21 septembre 1848, secrétaire du conseil des prud’hommes, il lança une pétition parmi les ouvriers tourquennois de toutes les industries, demandant au préfet de ne tolérer qu’exceptionnellement les dérogations à l’horaire légal, et il parla du « péril imminent de voir tomber en désuétude une loi salvatrice » (Le Messager du Nord, 22 août 1849).
Membre de la Commission officielle d’enquête sur la situation industrielle à Tourcoing, il en commenta les recherches dans Le Messager du Nord des 4, 5 et 6 août 1848. Ces articles montraient sa compétence, son esprit pratique, son jugement solide et aussi sa pondération. Il soulignait les pratiques déplorables de trop d’employeurs entraînés dans une concurrence effrénée, mais il rendit également hommage à l’ensemble du patronat tourquennois, à ses initiatives, à sa tradition d’honnêteté et de compréhension. Il préconisait des mesures concrètes facilement réalisables, portant sur l’uniformisation des salaires, la formation de sociétés de secours mutuels, l’instruction des enfants, l’élargissement de la compétence des conseils de prud’hommes, et l’observation de la durée légale de la journée de travail.
En octobre 1848, Leloire était à Roubaix avec le Dr Piscart. On le vit, au cabaret de la Vache grasse, soutenant Désiré Debuchy, dont il était la « doublure » selon un rapport de police, et les fileurs de Roubaix en grève pour arracher un tarif analogue à celui qu’avaient obtenu les fileurs de Tourcoing. Il fut arrêté le même jour que Debuchy, le 28 octobre. (Arch. Dép. Nord, M 620/14.)
La Société fraternelle de Tourcoing fut dissoute par arrêté préfectoral du 18 décembre 1849, en même temps que les Fraternelles de Lille et de Roubaix. Pour son action syndicale, Leloire fut mis à l’index par le patronat. Le préfet le démit de son poste de secrétaire du conseil des prud’hommes.
À la suite d’une visite domiciliaire, il fut condamné, le 6 septembre 1850, par le tribunal correctionnel de Lille, à cinq francs d’amende pour colportage d’une pétition contre la loi du 31 mai et pour le suffrage universel (Le Messager du Nord, 8 septembre 1850).
Arrêté le 4 décembre 1851, il fut incarcéré à Lille dans les casemates de la citadelle, jusqu’au 21 décembre. « Il a toujours été à la tête des agitateurs », écrivait dans son rapport au préfet le commissaire de police de Tourcoing. Voir Debuchy Désiré*, Destombes Irénée*, Mahieu François*, Mahy Achille*

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article33779, notice LELOIRE Auguste , version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 février 2009.

SOURCES : Arch. Dép. Nord, M 139/22, M 139/34, M 595/2 et 3, M 620/14. —  : A.-M. Gossez, Le Département du Nord sous la Deuxième République (1848-1852), Lille, 1904. — Lecompt, « Trois fraternelles de la région lilloise », Revue des Révolutions contemporaines, mai 1951, n° 188. — A. Chanut, « La Crise économique à Tourcoing (1846-1850) », Revue du Nord, t. XXXVIII, n° 149, janvier-mars 1956.

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