Né à Strasbourg en 1814. Avocat, économiste, historien et philosophe. Collaborateur et disciple de Philippe Buchez*, dont il a exprimé fidèlement les idées. Théoricien et militant du mouvement coopératif sous l’Empire.
Avocat et docteur en droit, ce catholique alsacien collabora, à partir de 1836, au second Européen. Quand celui-ci disparut, il fut chargé d’alimenter, par une série de brochures, la propagande buchézienne. Dans l’une d’elles, parue en 1838, Des Associations d’ouvriers, il suivait de très près la pensée buchézienne et élaborait une doctrine qu’il développera plus amplement dans son Traité d’économie sociale de 1851.
En 1840, il publia un ouvrage de philosophie de l’histoire : Manuel d’Histoire universelle. Puis il étudia la philosophie allemande et, en 1844, donna Hegel et la philosophie allemande. Il ne faut, dès lors, pas s’étonner s’il fut le plus apte à critiquer ce qu’il y avait de confusément hégélien chez Pierre-Joseph Proudhon*, et que lui avait révélé l’Allemand Karl Grün.
Toujours en 1840, Ott fit paraître une série de brochures anonymes : Appel aux hommes de bonne volonté, celle-là chez Prévost qui était l’éditeur des républicains les plus extrêmes et des communistes-révolutionnaires, les autres : Des conséquences de l’égoïsme en politique et en industrie, Du carnaval et de ses conséquences morales, De la fédération européenne, qui toutes étaient d’un ton très vif, chez divers éditeurs moins marqués que Prévost.
Il fut un des fondateurs de la Revue nationale qu’il dirigea, à la grande satisfaction de Buchez et de ses amis, de 1847 jusqu’à sa disparition en 1851. Il y publia de nombreux articles politiques et économiques, exprimant l’idée qu’il fallait mettre la production à la portée des consommateurs, donc abolir l’impôt indirect et augmenter la production, ce qui exigeait l’organisation d’un enseignement agricole, la fondation de colonies agricoles modèles, la création d’organismes de crédit foncier.
Polémiste vigoureux, Ott attaquait, dans la Revue nationale, les communistes et leurs systèmes, Charles Fourier* et le Proudhon du Système des contradictions économiques, qu’il jugeait contradictoire avec lui-même. En décembre 1847, il se montra hostile à un rapprochement entre les fouriéristes et les catholiques buchéziens. En effet, il reprochait à Fourier d’avoir proclamé que le but de l’homme était de rechercher le bonheur, ce qui, selon lui, revenait à assimiler l’homme à la brute.
Ott préconisait une organisation d’ensemble de la production et non pas seulement l’organisation d’associations de producteurs. C’était, selon lui, le seul moyen d’éviter les excédents et d’empêcher que le travail ne soit considéré comme une marchandise. Il était pour la possession commune des produits du travail, mais non pour celle des moyens de production, qu’il jugeait attentatoire au droit de propriété dont il était partisan.
En 1848, il échoua, dans le Bas-Rhin, aux élections à la Constituante. Il fit toutefois partie du Conseil d’encouragement pour les Associations ouvrières, créé par le gouvernement pour répartir le crédit de 3 millions alloué à ces associations par la loi du 5 juillet 1848 (proposition Corbon). Il en démissionna le 28 novembre 1848, car il n’avait pu imposer une idée à laquelle il tenait beaucoup, et qui fut vigoureusement combattue par Peupin, que les associations inscrivissent obligatoirement des considérations morales dans leurs statuts. C’est après la disparition de la Revue nationale, qu’il publia en 1851 son Traité d’économie sociale ou l’Économie politique coordonnée au point de vue du progrès, livre buchézien où il affirmait sa volonté de voir s’organiser à la fois la production et la consommation des richesses. Il y dénonçait comme funestes les idées de Charles Chevé* qui voulait rendre le prêt gratuit obligatoire, et obligatoire la transformation de l’entreprise industrielle en association entre patrons et ouvriers. Il appelait cela des « espérances sans fondement ». Il fut sans doute le premier à exprimer l’idée que l’association à créer devait être non pas une association de capitaux, comme celles que fondaient alors les saint-simoniens, mais un groupement de travailleurs, limité à la production, la consommation restant du domaine de la libre entreprise.
La société ouvrière de production lui semblait une formule bien supérieure à la corporation ou à la libre concurrence. Il envisageait donc la constitution de semblables groupements en même temps que le développement d’un enseignement professionnel de qualité. La police de la production devait être assurée par des prud’hommes élus. Il rejetait l’expropriation brutale, l’abolition de l’héritage, la distribution des instruments de travail par l’État. Ott était un partisan de l’appropriation pacifique des instruments de production par les travailleurs. Il ne put jamais expérimenter pratiquement le système qu’il avait esquissé dans son Traité.
La mort de Henri Feugueray*, dont il avait épousé une parente, fut pour lui, en 1854, un coup très rude. Dès lors, il n’écrivit plus que des ouvrages d’histoire ou des traductions de livres allemands. En 1855, il était signalé comme traducteur de correspondances dans une agence de publicité. En 1865, il sortit de sa retraite pour participer aux polémiques autour du projet de loi sur les associations coopératives.
ŒUVRES : Des associations d’ouvriers, Paris, impr. de Mme Poussin, s. d., in-8°, 16 pp. (Bureau de publication des Saints-Évangiles et de l’Histoire de la nation française). — Appel aux hommes de bonne volonté. Réforme électorale et réforme économique par la création de coopératives ouvrières de production, Paris, Prévot, 1840, 16 p. — Manuel d’Histoire universelle, Paris, Paulin, 2 vol. in-18, le second daté de 1842. — Hegel et la philosophie allemande, ou Exposé critique des principaux systèmes allemands de philosophie depuis Kant et spécialement celui d’Hegel, Paris, Joubert, 1844, in-8°, XII + 544 pp. — Comment doit-être élue l’Assemblée nationale ? Paris, au bureau de la Revue nationale, 1848, in-12, 36 pp. — Traité d’économie sociale ou l’Économie politique coordonnée au point de vue du progrès, Paris, F. Renou, 1851, in-8°, XVI + 687 pp. — Deuxième édition, Paris, Fischbacher, 1892, 2 vol. in-16. — Dictionnaire des Sciences politiques et sociales, Petit-Montrouge, J.-P. Migne, 1855-1866, 3 vol. gr.-in-8°. Ces trois volumes font partie de l’Encyclopédie théologique de l’abbé Migne. — Histoire ancienne : l’Inde et la Chine, Paris, impr. de Dubuisson, 1860, in-16, 192 pp. — Histoire ancienne : l’Asie occidentale et l’Égypte, Paris, impr. de Dubuisson, 1806, in-16, 192 pp. Ces deux volumes appartiennent à la Bibliothèque utile, entreprise des buchéziens. — De la Raison. Recherches sur la nature et l’origine des idées morales et scientifiques, Paris, Sandoz et Fischbacher, 1873, in-8°, 592 pp. — Critique de l’idéalisme et du criticisme, Paris, A. Fischbacher, 1883, in-8°, 419 pp.
En outre, Ott contribua à la réédition, en 1846, en six volumes in-18, de l’Histoire parlementaire de la Révolution française de Buchez et Roux, en compagnie de Jules Bastide et de Sain de Bois-le-Comte.
Il édita le Traité de Politique et de Science sociale de Buchez, Paris, 1866, 2 vol. in-8°.
SOURCE : Jean Gaumont, Histoire générale de la coopération en France, t. I.