JEANNY Andrée [née BOIGEGRAIN Andrée, Léone, Eugénie]

Par Jocelyne George

Née le 28 mai 1918 à Troyes (Aube) ; ouvrière du textile puis employée dans l’Éducation nationale ; résistante ; militante communiste et syndicaliste CGT, membre du bureau de la Fédération CGT du Textile (1953-1964) ; conseillère municipale de Troyes puis de Bezons (Val-d’Oise).

Édouard Boigegrain, le père d’Andrée, né en 1885, était l’aîné de quatre enfants d’une famille modeste et non religieuse. Employé comme comptable en bonneterie, il avait des idées socialistes ; lui et sa femme, une ouvrière du textile, adhéraient à une société anticléricale. Édouard fut blessé à la guerre de 1914-1918, son frère y mourut ainsi que son beau-frère. Il adhéra au Parti communiste mais milita surtout à la CGTU. Il vécut l’époque du Front populaire à Sens. En 1940 il s’engagea dans l’Organisation spéciale, branche armée du Parti communiste. En mars 1942 son groupe fut dénoncé et tomba. Le 30 avril il fut fusillé à Montchaud, près de Troyes, il avait refusé l’assistance d’un prêtre.

Après avoir obtenu le brevet élémentaire, Andrée effectua pendant deux ans des d’études commerciales puis elle entra dans une petite entreprise de bonneterie à Troyes. Elle devint la secrétaire du syndicat CGT du textile en 1937. Elle participa à l’exaltation du Front populaire. En 1936, elle fut membre du comité mondial des femmes à Sens (Yonne), adhéra à l’Union des jeunes filles de France à Sens en 1937. Avec Cécile Romagon-Ouzoulias*, elle organisa l’UJFF dans l’Aube et en fut la trésorière départementale. Elle adhéra au Parti communiste à Troyes en 1938. En octobre 1940 à Troyes, elle se maria avec Pierre Jeanny, membre des Jeunesses communistes, employé d’abord dans une usine textile puis, à partir de 1941, à la mairie de Troyes comme policier municipal. Durant cette période, elle se lia d’amitié avec Marguerite Buffard-Flavien*, professeur au lycée de jeunes filles de Troyes, qui se suicida après avoir été torturée.

Coupée du parti à la fin de 1939 après l’exclusion de Marguerite Buffard-Flavien qu’elle considérait comme injuste, Andrée Jeanny fut, à partir de 1943, en liaison avec le Front national et les FTP, participa à des actions diverses (aide pour faux papiers et agent de liaison). Les deux frères de Pierre étaient maquisards, son cousin Jacques, âgé de vingt-deux ans, fut fusillé en juillet 1944 ; Pierre arrêté en mars fut emprisonné à la Santé, la Libération lui épargna la déportation. En 1942 était née une petite fille, Claudine, et en 1947 une autre, Michèle. À la Libération, son mari, musicien, constitua un orchestre appelé « les Francs-Tireurs ».

Après la Libération, Andrée Jeanny fut membre du bureau de la section communiste de Troyes, puis du secrétariat de la section Est de la ville. Elle entra au comité de la fédération communiste en 1945 et fut membre du bureau fédéral de 1956 à 1964. Elle participa à l’école centrale du PCF d’un mois en 1957. Secrétaire permanente de l’Union des femmes françaises (1946-1947), elle fut élue conseillère municipale de Troyes, puis quatrième adjointe au maire en mai 1945. Elle présida la commission « assistance publique, goutte de lait et crèches » et fut membre de la commission de l’école de musique. Elle ne se représenta pas aux élections municipales de la fin de 1947. Elle était aussi secrétaire départementale de l’Association des familles de fusillés.

En 1951, Andrée Jeanny entra chez Doué-Lamotte, une usine de bonneterie d’environ cent personnes. Elle devint déléguée de son usine, milita dans le Syndicat des travailleurs du textile qui regroupait vingt-deux usines. Elle redynamisa le syndicat en formant les déléguées, diffusa la presse syndicale. Elle fut membre du bureau de l’Union départementale de la CGT de 1955 à 1961. En 1955 elle fut élue administratrice de la caisse de la sécurité sociale. En mai 1956 au 30e congrès de la fédération du textile elle fut élue au bureau. Elle fit partie de la commission féminine confédérale. En juin de cette année-là, elle fut déléguée à la première conférence internationale des travailleuses à Budapest où « elle découvrit les femmes du monde ». En février 1957, elle fut proposée pour un stage à l’école nationale de la CGT, mais elle y renonça arguant qu’elle devait s’occuper de ses deux filles. En novembre 1957, elle fut élue déléguée à Leipzig au quatrième congrès de la Fédération syndicale mondiale. En février 1958, elle fut déléguée à la première conférence nationale des travailleuses de la CGT.Lors des événements de 1958 la direction fédérale sembla compter sur elle pour organiser l’action dans les syndicats. Andrée Jeanny fut réélue au bureau de la fédération du textile jusqu’au congrès de 1962.

En 1961, son mari, devenu sous-chef de bureau au service municipal de l’architecture, fut licencié pour ses opinions et perdit sa place d’employé de la mairie de Troyes, alors qu’il venait juste de réussir à un concours de rédacteur de l’administration municipale. La famille partit à Romilly. Dans cette ville Andrée Jeanny ne put trouver de travail, elle était aussitôt licenciée qu’embauchée.

En 1964, Pierre devint un permanent de la fédération CGT des services publics. Ils s’installèrent dans la région parisienne d’abord à Bezons, où Andrée Jeanny fut élue conseillère municipale de 1965 à 1971, puis à Argenteuil. Elle entra dans l’Éducation nationale en octobre 1964 comme secrétaire au lycée technique de jeunes filles d’Argenteuil. Elle devint membre du comité de la fédération de Seine-et-Oise Nord en 1965 et fut intégrée dans la commission féminine. Elle milita à la base au PCF et à l’Union des femmes françaises.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article49854, notice JEANNY Andrée [née BOIGEGRAIN Andrée, Léone, Eugénie] par Jocelyne George, version mise en ligne le 12 avril 2009, dernière modification le 6 septembre 2010.

Par Jocelyne George

SOURCES : Arch. Mun. Troyes (Patricia Pierson). — Arch. comité national du PCF. — Arch. Institut CGT histoire sociale, cartons main d’œuvre féminine : notes de Slava Liszek. — Arch. de la Fédération du Textile, 43 J 30, 43 J 49. — Notes de Jacques Girault et de Jean Lefevre. — Renseignements fournis par l’intéressée et témoignage dans « Mémoire vivante », mai 2009 (Bourse du Travail de Troyes).

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