MANGEONJEAN Serge (version longue)

Par Jean-François Lassagne

Né le 31 août 1936 à la Verrerie-de-Portieux (Vosges), mort le 12 mars 2022 à Épinay (Vosges) ; verrier ; militant de la CGT à la Verrerie ; secrétaire général de l’Union départementale des Vosges de 1967 à 1977 ; communiste ; membre du comité fédéral des Vosges ; candidat aux municipales à Fraize (Vosges) ; fondateur, secrétaire général du Secours Populaire des Vosges de 1990 à 2007.

Serge Mangeonjean en 1970
Serge Mangeonjean en 1970

Serge Mangeonjean était le second d’une famille de sept enfants ; son père Georges, né le 6 juin 1910 à la Verrerie-de-Portieux (Vosges) était verrier et syndiqué à la CGT ; il avait épousé Lucette Leclerc, née le 08 juin 1917 également à la Verrerie-de-Portieux. Après son certificat d’études primaires obtenu à l’école du village, Serge entra à quatorze ans, le 1er septembre 1950, comme apprenti à la verrerie. A son arrivée il devint adhérent du syndicat CGT dont son oncle était le secrétaire, et il apprit son métier de verrier sur le tas comme il était de coutume. Un jour de 1952, scandalisé par l’injustice des abattements d’âge, il mobilisa au casse-croûte de huit heures tous les jeunes de moins de dix-huit ans et tous décidèrent de cesser le travail. Ce fut le blocage complet des fours, et Serge se fit sermonner par le secrétaire du syndicat pour ne l’avoir pas prévenu. L’ensemble des verriers se mit alors en grève, et au bout de huit jours l’abattement d’âge fut réduit de 4 %. Grand sportif, il fut à dix-huit ans champion des Vosges de cross, ainsi que des mille cinq-cents et trois mille mètres et jouait également au football au Club Sportif de la Verrerie-de-Portieux. En 1956 il partit au service militaire, d’abord à Mont-de-Marsan comme parachutiste (instructeur), puis en Afrique du Nord jusqu’en 1959. A Mont-de-Marsan, il devint champion des Landes sur huit cents mètres, mille cinq-cents mètres et quatre fois cent mètres.

A son retour en 1960, son oncle lui demanda de s’engager au syndicat, et c’est ainsi qu’il fut élu délégué du personnel et membre du Comité d’Entreprise. Il se maria la même année avec Christiane Humbert, née le 23 janvier 1942 à Charmes, ouvrière chez Boussac et qui devint membre du PCF en 1963 ; le couple eut quatre enfants. En 1961 Serge prit la direction du syndicat à la suite du licenciement de son oncle sanctionné pour son activité militante. Dès son adhésion au Parti Communiste en 1961, il mit en place la cellule Georges Basoge dans l’entreprise avec cinquante adhérents, alors que son oncle de son côté dirigeait la cellule locale de la Verrerie-de-Portieux. Diffuseur également de l’Humanité Dimanche et de la Vie Ouvrière, Serge se vit contraint d’arrêter le sport devant les réticences de son épouse. Il assura l’édition du journal du syndicat et du journal de cellule (La Boussole), imprimés tous deux à Epinal où il se rendait en vespa. Organisant la lutte avec les verriers pour conserver la gratuité du logement, il s’opposa y compris au projet de construction de HLM, synonyme de loyers, et s’exposa à des sanctions ; son licenciement en décembre 1962 fit grand bruit. Il resta six mois sans travail, et refusant de s’inscrire au chômage, il vécut de la solidarité des verriers et de syndicats (notamment des PTT). Puis il travailla durant six mois dans une entreprise allemande à Sarrebruck, et fut ensuite embauché par le journal l’Humanité, chargé de la gestion des diffuseurs de Lorraine. Au bout de six mois, en accord avec la fédération des Vosges du Parti Communiste, la Confédération Générale du Travail le sollicita pour devenir permanent à l’Union Départementale des Vosges.

Adhérent au syndicat du livre parisien, il prit alors sa carte auprès du syndicat de l’usine de papier-carton du Souche à Anould, qui le présenta à la commission exécutive à laquelle il fut élu ainsi qu’au bureau, et il intégra le secrétariat de l’UD que dirigeait Maurice Clauvelin, secrétaire général depuis 1945. Dès lors se mit en place un secrétariat avec Michel Géhin (EDF), Jean Hébrasse (PTT), Roger Davy (SNCF) et Léon Dechazeaux (trésorier), qui s’attacha à résoudre les problèmes de fonctionnement de l’UD. Après la démission de Maurice Clauvelin en 1967, et lors du congrès qui suivit, Serge devint le secrétaire général de l’UD, l’un des plus jeunes du pays. Il se fixa trois objectifs : ne pas monopoliser le mandat, faire progresser le nombre d’adhérents et « rompre avec la pratique de la courroie de transmission ». Il relança le journal de l’UD, Les Vosges Ouvrières, qui était un quotidien à l’époque du Front Populaire. C’est dans un contexte de crise du textile et de recrudescence du chômage partiel notamment, que se développa le mouvement de mai 68. Ce fut à l’usine de Contrexéville que débuta la grève avec la séquestration du patron le vendredi 10 mai. Puis la grève toucha tout le textile et les métaux, 80% du bâtiment, les services publics, et les autres branches à des degrés divers. Les effectifs de la CGT dans le département des Vosges passèrent alors de quatre à douze mille adhérents, grâce à la création de nouveaux syndicats dans les entreprises en grève. Le nombre de permanents à l’UD passa quant à lui de un à trois et il fallut deux secrétaires administratives au lieu d’une à mi-temps auparavant. Par la suite Serge dut également affronter les conflits à Boussac avec les fermetures d’entreprises et d’usines textiles en 1970. Puis il participa à l’Ecole du PCF durant trois mois en 1972, et refusa en même temps toute consigne venant de la Fédération des Vosges. Il cohabita un certain temps à l’UD avec Jean Pierre Ferry*, avant de quitter son mandat comme il le souhaitait.

Lorsque cela se fit, il partit diriger l’imprimerie chez Chevroton à Gérardmer (groupe Thirion), qu’il quitta au bout de dix ans pour reprendre un hôtel-restaurant trois étoiles à la Petite Fossé pendant six mois. Il aimait faire la cuisine et voulait tester ses qualités, et cela marcha très bien. De là il partit alors chez Dieudonné, imprimeur à Thaon les Vosges, d’où il fut licencié pour « rébellion », car en l’absence de syndicat, il intervenait pour ses camarades de travail. Il gagna son procès aux prud’hommes, et à cinquante sept ans il se retrouva alors au chômage ; il partit à la retraite en 1996. Le 15 février 1992, et après dix sept ans de vie commune, il avait épousé Claudine Girot avec laquelle il eut un garçon. Claudine était enseignante spécialisée à l’EREA à Epinal, militante communiste, et membre comme Serge du comité fédéral du PCF des Vosges jusqu’en 1984. Serge fut secrétaire de la section de Fraize (Vosges), et candidat aux municipales à deux reprises ; il y était également pompier. Claudine, quant à elle, fut candidate communiste à plusieurs reprises aux élections cantonales, dont celles de 2008 à Charmes. En 1990 Serge avait créé la Fédération du Secours Populaire des Vosges, avec l’aide de Solange Henriot de la Fédération de Moselle, et il en fut le Secrétaire général jusqu’à sa démission en 2007 pour cause de désaccord sur l’orientation. Il fut également un des fondateurs et le président de l’Association des Anciens et des Amis du Club Sportif de la Verrerie-de-Portieux. Communiste fidèle, il aimait dire : « on adhère pour des idées, on ne part pas pour des problèmes d’hommes ».
Serge Mangeonjean est mort le 12 mars 2022 ; ses cendres ont été dispersées accompagné par les drapeaux de la CGT et du PCF.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76793, notice MANGEONJEAN Serge (version longue) par Jean-François Lassagne, version mise en ligne le 26 mars 2010, dernière modification le 2 mai 2022.

Par Jean-François Lassagne

Serge Mangeonjean en 1970
Serge Mangeonjean en 1970

SOURCES : Entretien avec Serge Mangeonjean, le 12 mars 2008. — Notes de son fils, Dominique Girot.

ICONOGRAPHIE : photographie (1970) de Serge Mangeonjean.

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