BARDOL Jean, Charles, Auguste

Par Odette Hardy-Hémery

Né le 6 mai 1923 à Équihen (Pas-de-Calais), mort le 15 mars 2004 à Saint-Martin-de-Boulogne (Pas-de-Calais) ; instituteur ; militant et élu communiste ; conseiller de la République, sénateur du Pas-de-Calais (1958-1973), député (1973-1981), conseiller général (1951-1958), maire de Saint-Étienne-au-Mont (1971-1990).

[Sénat]

Jean Bardol était issu d’un milieu très modeste puisque trois de ses grands-parents étaient de l’Assistance publique et une de ses grands-mères orpheline à moins de deux ans. L’un de ses grands-pères était marin pêcheur, l’autre petit paysan charron. Son père était préposé aux douanes. Il habita Équihen, Marck-en-Calaisie, Boulogne-sur-Mer, puis Outreau à l’âge de sept ans. Ses parents étaient croyants mais fréquentaient peu l’église ; sa communion fut l’occasion d’une fête de deux jours dont il gardait un souvenir ému. Il fut reçu aux « Bourses » et entra en 1935 au cours complémentaire Cary à Boulogne-sur-Mer. En juin 1939, il fut reçu à l’École normale d’instituteurs d’Arras, puis à Douai (Nord). Lors de l’exode en 1940, il accompagna ses parents à Bellignies (Nord) où son père était muté. Reçu au brevet supérieur en 1942, il fut nommé la même année professeur d’éducation physique et sportive au collège technique de Maubeuge où il développa une pratique intense du sport (athlétisme, football). En 1942, il fut pris comme otage à la suite d’inscriptions antiallemandes, mais sans suite.

En janvier 1943, Jean Bardol entra dans les FTP, y devint successivement chef de groupe puis chef de détachement. Il fut décoré de la croix de guerre avec étoile d’argent pour son action dans la Résistance. À la Libération, il adhéra au Parti communiste (octobre 1944 à Maubeuge) et s’engagea pour la durée de la guerre. Il débuta son service militaire dans un régiment d’infanterie en septembre 1944, participa de septembre 1945 à février 1946 à l’occupation de l’Allemagne et fut démobilisé comme sous-lieutenant. Il fut nommé instituteur à l’école Duchenne à Outreau. Il milita à la cellule locale des dockers d’Outreau puis fut tour à tour secrétaire de sa cellule (1946), membre du comité de la section communiste de Boulogne (1948), puis secrétaire de la section communiste d’Outreau (1948). Il mena la liste du Parti communiste français aux élections municipales. Pendant de longues semaines, il participa aux grandes grèves de 1947 ; avec son camarade Maurice Démaret, également instituteur, il échappa de peu aux sanctions grâce à l’appui de l’inspecteur de l’enseignement primaire. Le 21 décembre 1947, il épousa une institutrice, Rolande Leclercq, membre du PCF, fille d’un mécanicien.

En décembre 1949, fut créée la Fédération du Nord-Maritime dont il fut élu secrétaire politique permanent. En juillet 1950, toujours avec Maurice Démaret, il fut arrêté au cours d’une manifestation protestant contre la suppression de la journée officielle de la femme. Incarcéré en détention provisoire pendant huit jours, il fut condamné à un mois de prison avec sursis et devint au même moment permanent de la fédération dont le siège était à Calais. En octobre 1951, il fut élu conseiller général du canton de Samer ; il y avait alors deux communistes sur les quarante-six membres du conseil général. Tout en étant conseiller général, Jean Bardol s’occupait d’une fédération couvrant cinq arrondissements.

Il suivit les cours de l’école centrale du PCF de quatre mois (octobre 1954-février 1955). Mais il dut reprendre son poste d’instituteur en octobre 1955 à la demande du secrétariat du Parti. Il enseigna jusqu’en 1959 mais des maladies répétées désorganisèrent un peu son enseignement et ses tâches de militant responsable.
En 1956, la Fédération du Nord-Maritime étant dissoute, Jean Bardol revint à la fédération du Pas-de-Calais et fut membre du bureau fédéral. Successivement membre des cellules de dockers, des APO, des cheminots, il participa aux luttes de ces travailleurs (grandes grèves des marins, des dockers, des cheminots et des métallos) et aux luttes contre les guerres coloniales : Indochine puis Algérie. Dans la préparation des élections législatives de janvier 1956, la perspective de placer en tête de la liste communiste Bardol fut évoquée. Il ne fut placé qu’en troisième position. Mais en novembre 1958, quand le scrutin uninominal fut établi, candidat dans la sixième circonscription (Boulogne Nord), il obtint sur 55 381 inscrits, 6 091 voix.
En mai 1958, il participa aux mouvements contre l’arrivée de De Gaulle au pouvoir. Désigné en juin 1958 par le comité fédéral du Parti comme tête de liste aux élections sénatoriales, il fut élu sénateur (le plus jeune du pays) puis en 1959, et fut réélu en 1965. Au Sénat, il s’occupa particulièrement des problèmes de l’agriculture, de la jeunesse et des sports du bassin minier et bien sûr des pêches maritimes. En 1963, il remplaça Jacques Duclos à la commission des Finances et se spécialisa dans les questions fiscales. En 1968, il fut rapporteur général du budget de la Marine marchande et fut le premier à demander la création d’un ministère de la Mer. Membre du bureau fédéral, il apporta son aide plus particulièrement aux sections du Parti communiste de l’agglomération boulonnaise. Jean Bardol était resté un militant de base, participant à l’élaboration des tracts et des journaux de cellule, à toutes les réunions intérieures et aux prises de parole.

Jean Bardol fut candidat, dans la cinquième circonscription (Boulogne Sud) aux élections législatives en 1967. Il obtint 12 347 voix sur 51 861 inscrits, gagnant plus de 4 000 voix. Il se désista pour le député sortant socialiste qui fut réélu. En 1968, il réunissait 11 187 voix sur 51 522 inscrits. Il se désista à nouveau pour le candidat socialiste qui l’emporta le dimanche suivant. En 1969, il fut victime d’un grave accident d’automobile et hospitalisé pendant un an. En 1973, à nouveau candidat, il arrivait en tête avec 14 392 voix sur 54 197 inscrits ; il devançait le député socialiste sortant qui se retirait et il fut élu avec 23 882 voix. La presse notait que pour la première fois cette région élisait un député communiste. Il abandonnait le Sénat pour le Palais Bourbon. Il conservait son siège de député en 1978 (sur 63 969 inscrits), 18 492 voix puis 30 553 voix. Sa campagne avait eu comme thème la nationalisation des aciéries qui, dans la région, étaient menacées. Comme député, il défendit les positions communistes lors des lois sur le commerce, l’artisanat, les plus-values, etc. et déposa des propositions de loi relatives aux pêches maritimes. L’écart avec le Parti socialiste se réduisit de plus en plus et il fut battu en 1981.

Jean Bardol avait été élu conseiller général du canton de Samer en 1951, avec sur 12 474 inscrits, 4 280 puis 5 371 voix. La fédération du PCF y voyait des perspectives de "faire avancer le parti dans le Nord maritime depuis la disparition de la fédération Nord maritime". Toutefois, il perdit son siège lors du renouvellement en 1958. Avec 7 033 voix sur 22 828 inscrits, il arrivait en tête au premier tour, mais les électeurs de droite reportèrent leurs suffrages sur le candidat socialiste qui l’emporta alors que le conseiller sortant réunissait 7 221 suffrages. Il fut à nouveau candidat en 1964, en 1970 (deuxième avec 6 997 voix à 50 voix de l’élu), en 1976 (deuxième avec 9 196 voix). Mais en 1982, de nouveaux cantons ayant été créés et le conseiller sortant socialiste du canton de Samer ne se représentant pas, après avoir obtenu 4 424 voix (deuxième), il l’emportait le dimanche suivant avec 6 586 voix. Il occupa les fonctions de vice-président avec des responsabilités particulières dans le domaine de l’enseignement, du logement et des bâtiments départementaux. Il fut réélu en 1988 et en 1994 avec chaque fois une majorité accrue. Au conseil général, il contribua au développement du sud Boulonnais et aida au développement de la station d’Hardelot au plan des infrastructures maritimes et routières. Fin 1988, il lança avec les promoteurs le projet Sun Parks sur Écault et Équihen susceptible d’attirer de nombreux touristes français et étrangers mais ce projet échoua, contrecarré par « Nord Nature » et par les Verts. Il fut vice-président de la commission de l’environnement et d’Éden 62 qui mit en valeur les sites touristiques et plus particulièrement ceux du littoral. Au conseil général, il présida le groupe de travail « zones de préemption » chargé d’acquérir les terres dites « en zone sensible » et de les aménager. Ainsi furent acquis et aménagés les sites d’Écault et du Mont-Saint-Frieux qui enrichissaient les possibilités du tourisme.

Aux élections municipales de 1971, Jean Bardol devait conduire la liste communiste à Outreau où il habitait et où il était membre du bureau de la section communiste depuis plusieurs années. Pourtant dans la commune voisine de Saint-Etienne-au-Mont, commune de la périphérie de Boulogne, la municipalité d’union communiste socialiste sortante subissait les conséquences d’une alliance des socialistes avec la droite. Il fallait donc un élu national qui pouvait permettre au PCF de conserver la mairie. Et Bardol en devint maire.

Réélu maire en 1977, 1983 et 1989, il démissionna volontairement en 1990 pour laisser place au premier adjoint et assurer la pérennité d’une liste communiste dans sa commune. Il considéra toujours le tourisme comme un fait social et un fait économique créateur d’emplois. Au cours de son mandat de maire se développa considérablement le terrain de camping d’Écault qui accueilla chaque année des milliers de personnes.

Jean Bardol présidait dans les années 1970 les échanges franco-allemands qui avaient pour but de faire connaître en France la République démocratique allemande et d’y envoyer des Français, notamment des jeunes lycéens.

Jean Bardol fut décoré de la Légion d’honneur et de la Croix de guerre pour faits de Résistance

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article15698, notice BARDOL Jean, Charles, Auguste par Odette Hardy-Hémery, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 3 décembre 2022.

Par Odette Hardy-Hémery

[Sénat]
[Assemblée nationale]

ŒUVRE : Un train de sénateur, trois quarts de siècle de la vie du pays, du Pas-de-Calais, du Boulonnais, autobiographie, préface d’Alain Bocquet, Édité par SARL Mémoires de militants, Pont-de-Briques, 1999.

SOURCES : Arch. personnelles de l’intéressé. — Arch. comité national du PCF. —
Renseignements fournis par la mairie de Saint-Étienne-au-Mont. — Notes de Jacques Girault. — État civil.

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