QUESNE Antoine, Eugène [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis]

Par Michel Cordillot

Né à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) le 8 novembre 1812, mort à New York le 16 novembre 1863 ; journaliste républicain ; déporté à Cayenne après le 2 décembre 1851 ; évadé fin 1852 ; réfugié à New York ; rédacteur du Républicain et de l’Écho français, puis co-fondateur et rédacteur du Messager franco-américain.

Après avoir quitté sa famille très jeune, Antoine Quesne séjourna quelque temps à Paris. Il partit s’installer en Belgique en 1840, puis il gagna la Hollande où il se trouvait en 1848. Durant l’été 1844, il fut condamné à deux reprises par le tribunal correctionnel de Maastricht pour des propos jugés calomnieux parus dans des journaux « anarchistes ». Il écopa alors de 3 mois de prison et de 500 florins d’amende.

Rentré en France en 1849, Antoine Quesne s’installa à Metz (Moselle) où il reprit ses activités de journaliste. Il dirigea, en tant que rédacteur en chef, plusieurs journaux socialisants, Le Républicain de la Moselle (13 janvier 1849-23 février 1850), Le Républicain démocrate de la Moselle (23 février 1850-26 mai 1850) et enfin Le Républicain de la Meurthe (octobre 1851). Durant cette période, il fit l’objet de nombreuses tracasseries judiciaires et comparut à cinq reprises devant la cour d’assise pour délit de presse. Condamné à 2 mois de prison et 2000 francs d’amende, il se vit en outre signifier l’interdiction de poursuivre ses publications.

Se sachant surveillé, Antoine Quesne quitta Metz le 3 décembre 1851, dès l’annonce du coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte. Il fut arrêté le 5 à Nancy. Bien qu’il n’eut pas participé à la manifestation de la place Stanislas, la commission mixte le condamna à être déporté à Cayenne : « sa situation précaire, ses déplorables antécédents, sa mauvaise nature qui le porterait à continuer partout son genre de vie, ont déterminé la décision prise. »

Transporté à Cayenne en mai 1852 sur la frégate La Forte, Antoine Quesne réussit à s’évader du bagne dans la nuit du 28 au 29 octobre 1852 en compagnie de deux autres condamnés, Gourieux et Chambonnière, et à gagner les États-Unis en embarquant sur un brick américain, le Mermaid, qui faisait route vers Salem (Massachusetts).

De là Antoine Quesne gagna New York, où il participa peu après son arrivée au banquet célébrant l’anniversaire de la Révolution de février 1848. Il prit à cette occasion la parole pour remercier les États-Unis d’accueillir les proscrits.

Reprenant son métier de journaliste, Antoine Quesne devint l’associé de J. Souvy au sein de l’Union typographique française, qui était propriétaire du journal Le Républicain. Rédacteur de cette feuille depuis son lancement (il signa le prospectus en date du 7 mai 1853) jusqu’à sa disparition le 30 décembre 1854, fut ensuite embauché en 1855 par Malespine, le propriétaire du Progrès, pour tenir deux rubriques, l’économie et la politique générale. Il quitta la rédaction au bout d’une semaine, estimant que ce journal « abandonnait le drapeau républicain ».

En 1858-1859, il publia à New York une feuille intitulée L’Écho français, dont aucun exemplaire n’a à ce jour été retrouvé, mais dont certains articles furent repris par le Journal de l’Illinois qui paraissait à Chicago. Il aurait par la suite pris part à la fondation du Messager franco-américain en 1859, et en 1862-63, il faisait toujours partie de la rédaction de ce journal.

Parallèlement, Quesne se montra très actif au sein de la mouvance républicaine. En septembre 1853, il faisait partie à New York du Comité provisoire démocratique qui s’affairait à préparer les statuts de la future Société de la République universelle (fondée le 8 octobre). Il fit également partie de la direction élue lors de la fondation (avec Martinache, Gerdy, Campdoras, Bacarisse, Sant-Gaudens et Morel).

Membre de la Société de la République universelle, section de La Montagne, il participa au banquet organisé le 24 février 1854 à New York pour célébrer l’anniversaire de la Révolution de 1848. Il y prononça un toast « À la presse ».

En août 1854 il fut l’un des imprimeurs éditeurs qui s’engagèrent, avec les citoyens actionnaires de l’Imprimerie démocratique française de New York à assurer la publication du Républicain et l’impression de livres et journaux démocratiques.

Antoine Quesne décéda subitement le 16 novembre 1863. L’édition du Messager datée du lendemain annonça la nouvelle en première page et en caractères gras, rendant hommage à celui « qui avait mis sa plume au service des grands principes politiques et sociaux proclamés par la révolution de 1789. »

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article159564, notice QUESNE Antoine, Eugène [Dictionnaire biographique du mouvement social francophone aux États-Unis] par Michel Cordillot, version mise en ligne le 6 juin 2014, dernière modification le 13 avril 2020.

Par Michel Cordillot

SOURCES : AN BB30 401. — Archives d’Outre-Mer, H 577. — Le Républicain, 21 mai 1853. — L’Homme. Journal de la Démocratie universelle, 26 avril 1854, 7 juin 1856. — Le Messager franco-américain, 27 août 1862, 17 novembre 1863, entre autres. — Quatre ans à Cayenne. Notes de Fr. Attibert, déporté, Bruxelles, chez la veuve Verteneuil, imprimeur, 1859, p. 42-43. — J.-B. Ravold, Les Transportés de la Meurthe, Paris, Degorce-Cadot, 1872. — Histoire des conseils de guerre de 1852, Paris, Décembre-Alonnier, 1869, p. 250. — Charles Clerc, Les États-Unis vus par les républicains de langue française, exilés ou émigrés à New York, 1852-1870, DEA, Université Paris-Nord, 1993. — Olivier Brégeard, Les Français à New York au milieu du XIXe siècle : une communauté ?, Maîtrise d’histoire, Strasbourg, 1994. — Charles Clerc, Les Républicains de langue française aux États-Unis, 1848-1871, Thèse, Univ. Paris XIII, 2001, p. 192-93, 255, 264, 267, 269. — Notes de Charles Clerc.

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