PESQUET Jacques, Raoul, Marcel. Pseudonymes : Antoine Vallon, Tony Colline, Arsène.

Par Claude Pennetier

Né le 10 octobre 1937 à Paris, mort le 31 juillet 1996 à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) ; militant d’extrême-gauche (PSU, PCI, LCR) ; auteur du livre Des Soviets à Saclay.

Son père Henri, professeur de mathématiques, puis fonctionnaire au ministère des Finances, ainsi que sa mère Suzanne Brimont, comptable, furent des militants de gauche. Sa mère fut, en particulier très engagée dans les grèves de 1936 aux Galeries Lafayette. Son père était membre du PSU.
Son enfance, ainsi que celle de ses deux frères, Daniel, né en 1939, et Jean-Claude, né en 1941 puis sa soeur Monique née en 1945 et son frère Bernard en 1956, eurent à souffrir, dans la banlieue nord parisienne, des rationnements de la Seconde Guerre mondiale, puis de l’hospitalisation de leur père pour un anérisme, raisons pour lesquelles la famille vécut dans le besoin. De plus Jacques assista à des exécutions, et fut aussi marqué par les bombardements.

Il fut un élève studieux, mais à tel point indiscipliné qu’il fut renvoyé de plusieurs établissements scolaires. Cette indiscipline semble bien avoir été l’expression d’une révolte contre des parents trop exigeants.
Cette révolte se manifesta, après le certificat d’études, par le refus d’études secondaires, et l’engagement dans de “petits boulots”, tels que bouvier à La Villette, poseur d’antennes de télévision, démarcheur, vendeur, livreur. Cela dura jusqu’à ses dix-sept ans, où son père lui imposa un engagement dans la Marine nationale.

Il trouva enfin là des camarades qui l’aidèrent à acquérir des connaissances de mathématiques, appliquées aux radars. Cela lui permit d’obtenir un brevet de détecteur de radars,, ce qui fut sa fonction lors de son service militaire qu’il poursuivit dans la Marine, à bord du Guépratte. L’un de ces camarades, était de tendance anarchiste, et c’est probablement lui qui l’orienta dans ses premières lectures politiques.

Libéré en mars 1959, il risqua de retomber dans la marginalité en se faisant débardeur aux Halles. Ce risque tenait à un trait de son caractère, constant tout au long de sa vie : ses grandes qualités intellectuelles avaient besoin, pour se manifester, de trouver un milieu de reconnaissance et d’affection. Fort heureusement, il allait les trouver sur tous les plans.

Il trouva un emploi d’agent technique électronicien, ce qui allait être son métier pendant dix ans, et où il progressait, obtenant, en 1960 et 1961 des certificats du Conservatoire des Arts et Métiers en physique nucléaire et radioactivité, ce qui lui permit d’obtenir en 1963 une place au Centre d’Études nucléaires de Saclay.

Sa stabilisation professionnelle allait trouver son double complément. D’abord sa rencontre aux Arts et Métiers avec Françoise Vatin, une documentaliste scientifique, née en décembre 1938, militante syndicaliste, à la CGT, puis à la CFDT, qu’il épousa à la fin de 1960, et qui assura son équilibre dans une solide vie familiale, quoique rendue difficile par sa combinaison avec sa vie politique. En effet, dès février 1961 naissait leur premier enfant, Patrice, leur fille Véronique en mai 1962, et Laurent en août 1963. Il fallut beaucoup d’efforts à Françoise, et quelque tension, pour imposer à Jacques ses devoirs paternels, surtout dans le jeune âge de leurs enfants.

Mais l’entrée de Jacques dans le PSU en 1961, fut aussi nécessaire à son équilibre, car il trouva là le milieu où il put se former politiquement, et se réaliser dans la lutte de classes, avec des militants qui reconnurent sa valeur. D’abord membre de la section de Bagneux, puis de celle de Plessis-Robinson dont il fut le secrétaire, il fut élu membre de la Commission exécutive de Seine-Banlieue, agisSant aux côtés de Marcel Pennetier.

Mais c’est surtout en adhérant à la Tendance socialiste révolutionnaire qu’il trouva sa place et sa plus haute activité. D’abord ce fut contre la Guerre d’Algérie, avec le dépassement des manifestations pacifistes matraquées par la police, par l’organisation secrète de manifestations militantes radicales à contre-courant de la circulation, ce qui retardait assez longtemps l’intervention de la police pour assurer la dispersion avant son arrivée.
Il rencontra André Calvès, qui avait créé à l’intérieur du PSU un Centre de liaison et de regroupement socialiste (CLRS), qui éditait de petits bulletins d’entreprises, tous titrés L’Étincelle, qui touchaient directement les travailleurs. Il en fut bientôt le principal rédacteur et le co-dirigeant avec Calvès, ainsi que le réalisateur pratique. Ce groupe de militants ouvriers fut particulièrement actif lors de la grève des mineurs de 1963 avec la tendance SR (Socialiste révolutionnaire). Dans le même temps, il participa à l’activité politique de la tendance dont il devint un des dirigeants. Sa liaison avec Michel Lequenne fut très serrée, au point qu’il dit plus tard à sa femme, que celui-ci avait été son “père spirituel“, ce qu’on peut comprendre en ce sens que leur activité commune fut associée à sa formation politique par la lecture de Trotski, puis de Gramsci, qu’il admira au plus haut point.

Cette liaison alla jusqu’à faire parti du groupe de la tendance SR qui avec d’anciens militants du PCI, la section française de la IVe Internationale, pour la plupart ayant appartenu à la majorité française, lors de sa scission de 1952, qui réintégrèrent cette Internationale par fusion en 1963, elle-même réunifiée en 1961. Il y vint avec Calvès le groupe de "l’Étincelle" dont ils poursuivirent l’activité. Michel Lequenne y étant rapidement devenu le responsable du journal La Vérité des travailleurs, titre bientôt changé en L’Internationale, Jacques Pesquet devint son principal collaborateur à la fois à la rédaction du journal, mais aussi à sa réalisation technique, ce qui le prépara à son second métier.

1968 fut son grand moment de militantisme du fait du rôle qu’il joua dans la grève avec occupation du Centre de Saclay, et à la formation du Conseil ouvrier, rassemblant jusqu’aux plus hauts techniciens. C’était la première fois que de tels cadres techniques faisaient grève en comprenant leur unité de cause avec les plus simples travailleurs, et Jacques allait en raconter l’histoire et en tirer les leçons théoriques dans un petit livre, Des soviets à Saclay. N’appartenant au Centre qu’au travers d’une société sous contrat, il fut facile à la direction, en l’année de recul de 1970, de le licencier pour être intervenu, en tant que délégué du personnel, en dehors du temps qui lui était imparti.
Il devint alors, et jusqu’en 1975, maquettiste de presse à Moto-Revue.

Toujours militant de choc dans la Ligue communiste révolutionnaire, il quitta sa situation pour participer à l’aventure du passage de Rouge, l’organe de la LCR, d’hebdomadaire à quotidien. C’était là pour lui tomber au bas salaire minimum militant, donc une décision grave pour sa famille. Sa nouvelle qualification lui permit d’être le premier gérant et organisateur de l’imprimerie du journal, Rotographie. Mais si sa rigueur dans cette gestion permit à l’imprimerie de survivre à l’échec du quotidien, et jusqu’à nos jours, elle entraîna des désaccords, et dans l’équipe de l’imprimerie et dans la LCR elle-même, sur les principes de liaison d’une telle entreprise avec une organisation politique, puis des divergences politiques qui l’amenèrent en 1981 à démissionner de son poste et à sa rupture avec la LCR. Ce fut la fin de sa vie politique.

De 1983 à 1987, il fut maquettiste et secrétaire de rédaction aux Éditions techniques, puis de 1988 à 1989, technico-commercial à la Société européenne des Arts graphiques. Après cette date il devint chômeur ; cette situation le démoralisa profondément ainsi que sa famille. Il mourut le 31 juillet 1996.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article160666, notice PESQUET Jacques, Raoul, Marcel. Pseudonymes : Antoine Vallon, Tony Colline, Arsène. par Claude Pennetier, version mise en ligne le 1er juillet 2014, dernière modification le 17 mai 2022.

Par Claude Pennetier

OEUVRE : Dans toutes les organisations, dont il fut membre, il écrivit d’innombrables articles et prit en main les revues (Le Militant, L’Internationale, rédacteur des pages luttes sociales et
maquettiste) et un livre, Des soviets à Saclay, Éditions Maspero, coll. Cahiers libres, n° 127, 1968 ; édition anglaise, Soviet at Saclay 1972.

SOURCES : Souvenirs de Françoise Pesquet de Michel Lequenne et de Jean Simon (PCI).

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