TALLEUX Roland, Olivier, Henri

Par Éric Belouet

Né le 12 septembre 1924 à Paris (XIe arr.) ; succesivement coursier, préparateur en pharmacie, caissier, polisseur, magasinier puis chef de service dans une librairie ; militant jociste de Paris, permanent de la JOC (1944-1947), syndicaliste CFTC puis CGT, militant du MPF, du MLP puis du PCF, permanent du MLP chargé de l’action au travail (1951-1953).

Fils d’un monteur en bronze d’éclairage et d’une mère qui restait au foyer, tous deux sans engagements militants ou religieux, Roland Talleux était le deuxième de cinq enfants (un frère et trois sœurs). Il fréquenta l’école publique jusqu’au certificat d’études primaires mais n’obtint pas ce diplôme. Il commença à travailler en septembre 1938 comme coursier à la pharmacie des Écoles, 1 rue du Bois à Paris (XIXe arr.), où il resta jusqu’en août 1943, après être devenu préparateur 2e échelon.

Entre-temps, Roland Talleux avait découvert la JOC par l’entremise d’une Petite sœur des pauvres qui aidait les familles de l’Habitation à bon marché (HBM) où il résidait, 36 rue Olivier-Métra (XXe arr.), laquelle l’invita à une kermesse jociste. Dans son témoignage (juin 1998), il écrivait : « J’ai tout de suite été accroché par l’amitié, particulièrement par trois jocistes qui se sont occupés de moi, m’ont confié des responsabilités, m’ont parlé du Christ et surtout de la classe ouvrière. » Il milita d’abord à la section de Belleville, en devint ensuite le secrétaire, puis fut promu secrétaire de la fédération Paris-Nord-Est. Sollicité par le mouvement pour devenir permanent, il prit ses nouvelles fonctions en mars 1944 au sein de la province jociste de la région parisienne, alors dirigée par Georges Montaron, et les conserva jusqu’en février 1947. Le 8 mai 1945, jour de la victoire, la JOC parisienne défila sur les Champs-Élysées ; « au pied de l’Arc de Triomphe, juste en dessous de la célèbre “Marseillaise” de Rude, Roland Talleux pronon[ça] un discours enflammé » (Jocistes dans la tourmente, op. cit.).

Roland Talleux se maria à Paris (XIXe arr.) le 11 février 1947 avec Léone Marandola, une militante jociste (secrétaire de section) de son quartier ; trois enfants naquirent de cette union. Comme un grand nombre d’aciens jocistes à l’époque, il adhéra au Mouvement populaire des familles (MPF), lequel se transforma en Mouvement de libération du peuple lors de son congrès de Nancy (1950). Sur le plan professionnel, il fut d’abord caissier dans une coopérative d’entraide ouvrière de mai 1947 à novembre 1948, puis suivit un stage de soudure à l’arc au Centre FPA Yves-Bodiguel, à Issy-les-Moulineaux (Seine, Hauts-de-Seine) de décembre 1948 à avril 1949. Il travailla ensuite comme ouvrier spécialisé polisseur chez Renault de juin 1949 à mars 1951, puis, toujours comme OS, chez Bendix, entreprise de machines à laver, à Bagnolet (Seine, Seine-Saint-Denis) de mars à juillet 1951. Syndicalement, il milita d’abord à la CFTC avant de rejoindre très rapidement la CGT.

En décembre 1950, Rolland Talleux fit partie du voyage à Rome qu’effectuèrent quatre militants du MLP, dont Alphonse Garelli, pour soumettre au pape « l’action menée en collaboration avec les communistes sur les lieux de travail et sur les problèmes qu’elle pose ». Aucun évêque français ne cautionna cette démarche mais, à leur grand étonnement, ils furent reçus par Pie XII. En 1951, une importante scission intervint au sein du MLP. Une forte minorité, refusant d’aller vers l’action politique, le quitta pour aller fonder le Mouvement de libération ouvrière (MLO). Appartenant à la tendance majoritaire, Roland Talleux devint permanent du MLP en août 1951 avec la responsabilité de l’« Action au travail ». La même année, il publia dans Monde ouvrier, l’organe du mouvement, un reportage sur son voyage en URSS.

Une nouvelle crise éclata en 1953 au sein du MLP. Roland Talleux, qui n’était plus permanent depuis janvier, fit partie, avec Marius Apostolo et Lucien Chavrot notamment, d’une tendance qui, au comité national de juillet, se prononça pour une collaboration plus étroite avec le Parti communiste. Minoritaires et écartés des postes à responsabilité, les principaux tenants de cette position n’allaient pas tarder à quitter le MLP pour rejoindre individuellement, après une période plus ou moins longue, le PCF. Un article, intitulé « Chrétiens dans le combat ouvrier », qu’il publia dans La Nef au début de l’année 1954, fit couler beaucoup d’encre. S’appuyant sur la récente condamnation des prêtres-ouvriers, il constatait que toute tentative visant à conjuguer fidélité chrétienne et fidélité à la classe ouvrière était systématiquement sanctionnée par la hiérarchie catholique. S’appuyant sur son propre exemple, il estimait que les ouvriers chrétiens ne pouvaient faire fi de la CGT et du Parti communiste sans risque de renier leur identité ouvrière au profit de leur identité chrétienne. On ignore à quel moment son ralliement au PCF fut effectif, mais il se situa vraisemblablement au cours de cette même année 1954. Au sein de son nouveau parti, les responsabilités de Roland Talleux n’excédèrent jamais celles de secrétaire de section. Il s’investit également aux « Vaillants », organisant des sorties pour les enfants de son quartier.

N’étant plus permanent du MLP, Roland Talleux travailla d’abord comme ouvrier spécialisé aux Amortisseurs Houdaille, à Levallois-Perret (Seine, Hauts-de-Seine) d’avril à juillet 1953, puis fut embauché comme magasinier en août de la même année par l’illustre libraire Pierre Berès. Travaillant dans sa librairie du 14 avenue Friedland (VIIIe arr.) et dans la maison d’édition Hermann, reprise en 1956 par Pierre Berès et André Chastel, au 293 rue Lecourbe (Paris XVe arr.), il devint chef du service « stocks et expéditions » et conserva cet emploi jusqu’à son départ en retraite en septembre 1986.

Parallèlement, Roland Talleux fut un sportif accompli qui courut de nombreux marathons et remporta nombre de coupes et médailles sportives. En 2009, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans, il prenait encore part à des semi-marathons avec son épouse. Le couple était domicilié à Bagnolet (Seine-Saint-Denis).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article174420, notice TALLEUX Roland, Olivier, Henri par Éric Belouet, version mise en ligne le 6 juillet 2015, dernière modification le 6 juillet 2015.

Par Éric Belouet

ŒUVRE : Roland Talleux écrivit plusieurs articles dans la presse de la JOC et du MLP. — « Chrétiens dans le combat ouvrier », La Nef, 5, janvier 1954, p. 157-170. — Article dans Témoignage chrétien le 30 avril 1990 pour évoquer les événements en URSS.

SOURCES : Arch. JOC (SG), fichier des anciens permanents. — Pierre Andreu, Grandeurs et erreurs des prêtres-ouvriers, Amiot-Dumont, 1955, p. 231-232. — Jean Poperen, La gauche française. Le nouvel âge, 1958-1965, Fayard, 1972, p. 72. — Jocistes dans la tourmente, Éd. du Témoignage chrétien, 1989, p. 47 et 93. — Cahiers du GRMF, 4, p. 88 et 91 ; 9. — Marius Apostolo. Trace de luttes, 1924-2007, Autrement, 136. — Témoignage écrit de l’intéressé, juin 1998. — État civil de Paris XIe arr. (1999).

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