PARENT Jacques

Par Jean Lefèvre

Né le 29 mai 1900 à Paris (IXe arr.), mort à Barth (hôpital militaire américain de Ravensbrück) le 6 mai 1945 ; résistant déporté.

Jacques Parent, fit partie de la Résistance dans le réseau Jean-Marie Buckmaster avec le grade de sous-lieutenant. Il fut arrêté par la Gestapo et déporté à Buchenwald.
Il vivait à Baudement (Marne).

Jacques Parent naquit à Paris (IXe) le 29 mai « chez ses père et mère », 39 rue Lafayette. Il était le fils de Paul Parent, 40 ans, sous-chef de bureau au ministère du commerce et de Nathalie Bayeux-Dumesnil, 39 ans, sans profession.
Son grand-père n’est autre qu’Ulysse Parent (1828-1880) maire adjoint du 9e arrondissement sous la Commune de Paris et franc-maçon. Accusé d’incendie, il fut acquitté en septembre 1871. Ulysse mpurut chez son ami Jacques-Albert –Eugène Bayeux-Dumesnil, administrateur à la mairie du IXe, (né en 1834 à Caen- mort en 1903) également membre de la Commune. Ce dernier se réfugia en Belgique après 1871. Il fut amnistié en 1879. Et, comme par hasard son fils Paul épouse une Bayeux-Dumesnil !
Ulysse eut 3 enfants avec Julie Coyard, Paul (+ 1905), futur père de Jacques et Pierre.

Il s’est marié à Châlons-sur-Marne le 28 mars 1929 avec Lucienne-Andrée Truchon, sans profession, née le 16 juin 1909 à Châlons, fille de « Demoiselle Marie-Louise Truchon, 27 ans, journalière, 20 rue du Recollet à Châlons ». Lucienne est « autorisée par le Conseil de famille de l’Assistance Publique de la Marne ».
À la date de son mariage, Jacques Parent était opérateur radiotélégraphiste et habitait Baudement. Il se sépara de son épouse vers 1936. Celle-ci habita ensuite 77 rue des Châteaux à la Garenne (Seine), aujourd’hui La Garenne-Colombes, et sollicita en 1945 l’ouverture d’un dossier pour que lui soit attribué la mention « Mort pour la France ».

Leur fils Paul-Pierre, né le 1er février 1930 à Châlons-sur-Marne , fut recueilli par Paul Parent, l’oncle de Jacques, qui assura seul son entretien, « depuis sa naissance » dit-il. Sa mère ne peuvait s’en occuper. L’oncle fait état du manque de fortune de son neveu et réclame pour Paul-Pierre une allocation.
Jusqu’en 1943, Jacques habitait donc à Baudement près d’Anglure (Marne), 49 rue Principale (« au Château », avec son oncle Paul et son fils unique Paul-Pierre et pendant quelques années en présence de Mme Leconte-Dupret. décédée à La Garenne Colombes le 1/6/1962.
Jacques Parent appartenait au S.O.E (Special Operation Executive) du colonel Maurice Buckmaster, S.O.E organisé par les Anglais, depuis Londres et faisant partie du vaste organisme de l’Intelligence Service. Les missions allaient du renseignement à l’organisation de maquis et d’attentats.
Jacques Parent a signé un contrat d’engagement (décret 366 du 25 juillet 1942) au réseau « Jean Marie Buck » comme agent P2 chargé de mission de 3e classe au grade de Sous-Lieutenant, comptant comme service militaire actif . Un acte le confirme au ministère des AC le 24/9/46, suivant l’ordonnance N° 452-561. Il est muni alors de faux papiers. Son oncle Paul Parent qui habite avec lui à Baudement indique « qu’il fait de nombreux séjours en Angleterre et qu’il possède un faux état-civil ».
Ce réseau semble être le réseau Jean-Marie Donkeyman (ou Jean-Marie Action) , domicilié dans l’Yonne, un des nombreux réseaux « Action » Buckmaster, auquel a appartenu l’écrivain et homme politique Jorge Semprun .
Il a existé une Union des Amicales « Jean-Marie » réseau action de la France Combattante, 133 bis rue de l’Université Paris VIIe, qui certifia par la plume de Jacques Adam, colonel de réserve, que Jacques PARENT était un agent P1 du réseau 7-43 et qu’il fut arrêté sur dénonciation le 23 octobre 1943.
Durant l’année 1943, il existe 14 réseaux Buck en contact avec Londres. Les parachutages de matériels sont nombreux.
Jacques Parent fut dénoncé et arrêté par la Gestapo, le 28 octobre 1943. (Attestation France-Combattante.) confirmée à la Libération par la fiche de liquidation de son dossier établi par Jacques Adam, qui indique que Jacques Parent a été arrêté sur dénonciation en tant qu’agent du réseau Jean-Marie.
On ne sait pas s’il s’agit de Baudement ou Paris, les témoignages divergent. Les 2 sont possibles puisqu’il faisait des liaisons fréquentes avec son chef de réseau parisien. Mais le fait d’avoir été conduit à la prison de Fresnes à cette même date, pourrait confirmer l’hypothèse d’une arrestation à Paris. Les gens arrêtés dans la Marne et même dans l’Aube étaient conduits à Chalons sur Marne.
Il suivra le parcours habituel des déportés par Compiègne, Sarrebrück, et Buchenwald.
Il arrive le 4 mars 1944 à Buchenwald où il reste 3 mois puis est transféré à Ravensbrück le 30 mai 1944 ainsi qu’il est indiqué en 1961 à son cousin Dupret habitant à Levallois-Perret. On le fait travailler au « Kommando Ost ». Il s’agit de l’usine Heinkel, firme aéronautique dont les ateliers sont installés à proximité de plusieurs camps de concentration où la main d’œuvre est fort bon marché.

Le 30 avril 1945, les SS donnèrent l’ordre d’évacuation du camp et emmenèrent la plupart des déportés. Le rapporteur de cet épisode indique « Nous partîmes à pieds en direction de Rostock, nos SS préférant se faire faire prisonniers par des Américains que par les troupes soviétiques. Jacques préféra rester. Les Russes se conduisirent très humainement vis à vis des Häftlinge. »
Enquête est faite à la Libération pour connaître le sort des déportés qui ne sont pas revenus et que les familles recherchent activement dans la désespérance. Le maire de Baudement, Henri Fricault, interrogé par l’administration, indique en 1946 aux enquêteurs que Jacques Parent n’est pas reparu à son domicile.

Jacques Parent mourut d’épuisement et de dysenterie, entre le 1er et le 12 mai 1945, (6 mai est-il précisé dans les actes officiels par la suite), à Barth, petit port sur la Baltique où était dressé un hôpital militaire anglo-américain pour les rescapés de Ravensbrück. Le camp avait été libéré par l’armée soviétique le 30 avril. Un certificat de décès N° 59, registre 27, en date du 30 avril 47, indique la mort de Jacques Parent , « journaliste » le 6 mai 1945.
Les enquêtes organisées par les associations et les pouvoirs publics restent cependant floues concernant la date et même le lieu du décès, et les tribulations du déporté, dirigé en dernière minute et mourant, vers un hôpital russe installé à Stettin. Il est mort durant son transfert. En ont témoigné MM. Charvin, Eskenazzi , Raymond, Lauras Patrice, et Dithurbide Félix, compagnons de misère de Jacques. Son corps a été acheminé au cimetière N-F de Berlin-Frohenau.
Après la Libération les données fournies par l’administration furent retranscrites sur les registres de la mairie de Baudement par le maire Henri Fricault. Ainsi l’acte de décès est rédigé le 18 septembre 1946, la secrétaire de mairie étant Mlle Nominé, institutrice. La mention « mort pour la France » n’y figure pas.

Il a d’abord été déclaré « déporté politique » puis « Déporté-Résistant » le 9/7/1963 par décision ministérielle. Son oncle Paul, habitant 9 villa Béreau Hardy à La Garenne (Seine), ayant reçu cette nouvelle nomination le 8 février 1965, est invité à retourner la carte fautive de « Déporté politique ».

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article184267, notice PARENT Jacques par Jean Lefèvre, version mise en ligne le 27 août 2016, dernière modification le 27 août 2016.

Par Jean Lefèvre

SOURCES : Les recherches sur ce déporté « oublié » ont été menées aux Archives militaires de CAEN où son dossier contenait 70 pièces. J’en ai tiré l’essentiel dont des notes plus personnelles qui peuvent éclairer le parcours de ce Déporté-Résistant.
Son nom ne figure pas encore sur la plaque de marbre apposée sur l’église et tenant lieu de monument aux morts à Baudemant, mais les élus présents lors d’une cérémonie, organisée par la FNDIRP et l’ANACR, le 21 août dernier, cérémonie honorant Hubert Jeanson et Jacques Parent, ont promis de réparer cette omission. Jean Lefèvre. Président de l’ADIRP-Aube.

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