CECCALDI-RAYNAUD Charles

Par Gilles Morin

Né le 25 juin 1925 à Bastia (Corse) ; avocat, commissaire de police, puis administrateur des services civils, directeur de l’office HLM de Bondy (Seine, Seine-Saint-Denis), de Puteaux (Seine, Hauts-de-Seine), puis d’Issy-les-Moulineaux (Seine, Hauts-de-Seine) ; secrétaire de la fédération SFIO d’Algérie (1955-1956), puis des Hauts-de-Seine (1965-1966) ; élu de Puteaux, socialiste, puis de droite, député (1993-1995).

[Assemblée nationale]

D’origine Corse, fils de postier bastiais, Charles Ceccaldi-Raynaud fit ses études à Oujda, puis les acheva à la faculté d’Alger où il obtint un doctorat en droit, avec pour sujet de thèse : « socialisme et corporatisme en France ». Marié en 1948, avocat stagiaire en 1950 (il avait prêté serment au barreau de Paris en novembre 1949), il exerça la fonction de commissaire de police de 1951 à 1953, fut chef du service civil de la réglementation au gouvernement général de l’Algérie en 1954-1956, puis administrateur des services civils en 1957. Adhérant de la fédération SFIO, à l’âge de vingt-cinq ans, il prit la direction de la fédération en 1955, recrutant pour cela parmi ses collègues et les milieux corses, selon ses adversaires politiques comme Joseph Begarra*. Aussi, le secrétaire fédéral de l’Algérie fut-il exclu par la commission fédérale des conflits le 23 juin 1956, après plainte de vieux militants, mais la sentence fut cassée par la commission nationale des conflits le 6 décembre 1956, un membre du bureau fédéral siégeant dans la commission fédérale.

Faisant son stage d’élève administrateur civil au temps de la bataille d’Alger, Ceccaldi-Raynaud fut responsable du centre de tri de prisonniers de Beni Messous. Selon le journaliste Yves Courrière, il aurait été nommé à la demande de Paul Teitgen. Les disparitions de ce camp se chiffrèrent à 3 024 selon celui-ci qui ne mettait pas nommément en cause Ceccaldi-Raynaud. Tel ne fut pas le cas du général Aussaresse qui affirmait qu’il prenait sur lui les disparitions. Selon le secrétaire de la fédération SFIO, il aurait au contraire fait libérer 300 personnes et démissionné au bout de trois semaines, horrifié.

Représentant de la fédération d’Algérie, Ceccaldi-Raynaud appartint à la commission chargée d’étudier la situation en Algérie au conseil national de la SFIO des 3-4 mai 1958. Un mois plus tard, le 4 juin 1958, il aurait quitté clandestinement l’Algérie déguisé en postier. Il datait de cette époque (juin 1958) un « lourd contentieux » avec Guy Mollet*, qui écrivait en 1967 qu’ils ne s’étaient pas parlé depuis neuf ans.

Réfugié dans la région parisienne, installé dans un logement HLM par ses camarades à Bondy, Ceccaldi-Raynaud y fut élu conseiller municipal en 1959, chargé des HLM. Moins d’un an plus tard, le maire, Maurice Coutrot*, décida de « se débarrasser de lui » (témoignage de Maurice Coutrot, cité par Denis Lefebvre). En 2002, la femme de Claude Fuzier, ancien maire de Bondy, témoignait à ce propos, après avoir estimé que Ceccaldi-Raynaud possèdait un charisme impressionnant qui pouvait rivaliser avec celui de Maurice Coutrot : « Quand il venait à la section, il avait pris de plus en plus d’ascendant et était plus important que Coutrot ; jusqu’au jour où celui-ci s’est rendu compte qu’il y a avait de plus en plus de Corses dans la section. Coutrot s’est débrouillé pour le renvoyer à Georges Dardel. » (Témoignage de Ginette Le Goc-Fuzier, in Achim Bellik, La Municipalité socialiste de Bondy sous Maurice Coutrot, 1947-1977, mémoire de maîtrise d’histoire, Université Paris XIII, 2003, p. 78-79.)

Ceccaldi-Raynaud s’installa alors à Puteaux. Cette commune possédait la plus forte section socialiste de la banlieue parisienne. Son maire, Georges Dardel*, en fit le directeur de son office HLM. Avec son appui, il fut élu conseiller municipal de Puteaux et 4e adjoint en 1965, mais fut battu aux cantonales en 1967. Il prit par ailleurs la tête de la toute jeune fédération socialiste des Hauts-de-Seine après la nouvelle division administrative de la région parisienne en 1967 et 1968 et dirigea l’office d’HLM d’Issy-les-Moulineaux, commune dirigée par son « compatriote » Bonaventure Leca*. Georges Dardel, blessé grièvement dans un accident en novembre 1967, le laissa traiter les affaires courantes. Ceccaldi-Raynaud se comporta comme un maire par intérim et écarta Dardel en 1969 lorsqu’il voulut reprendre sa mairie. Il fut exclu de la SFIO le 28 février pour avoir pris dans son équipe municipale un gaulliste. Il appartint alors au Parti de la démocratie socialiste d’Émile Muller* mais en fut rapidement exclu.

Maire sortant en 1971, Ceccaldi-Raynaud affronta Georges Dardel, avec le soutien de l’UDR et du maire de Neuilly (Hauts-de-Seine), Achille de Peretti. La droite ne présenta donc pas de liste contre lui. Dans la nuit du 26 au 27 février 1971, une fusillade entre colleurs d’affiches, faisant un mort et sept blessés, défraya les journaux. Son beau-frère et des employés municipaux se trouvèrent inculpés. L’affaire fit grand bruit et la presse faisait alors rimer Puteaux et Chicago, ou évoquait « Chicago-sur-Seine ». Malgré tout il fut élu avec 65 % des voix et reconduit par la suite avec des scores supérieurs (78,9 % en 1989). En 1975, il fut déclaré civilement responsable de la fusillade par la justice, plusieurs agresseurs étant employés de la commune, et il fut condamné à 200 000 francs de dommages et intérêts.

Conseiller général de droite à partir de 1973, Ceccaldi-Raynaud rejoignit ensuite le RPR dans les années 1980 et se rapprocha de Charles Pasqua. Conseiller régional d’Île-de-France de 1976 à 1982, puis de 1986 à 1993, il présida l’Établissement public d’aménagement du quartier de la Défense (EPAD) de 1987 à 1989, puis après juin 1993, et lutta pour transformer sa ville de cité ouvrière comprenant encore de nombreux taudis en cité résidentielle attirant le secteur tertiaire. L’installation de la Défense en fit l’une des communes les plus riches de France.

Président du syndicat intercommunal (Sicudef) comprenant Puteaux, Courbevoie et Nanterre, Ceccaldi-Raynaud fut député suppléant de Nicolas Sarkozy en juin 1988, puis en 1993 (circonscription Neuilly-Puteaux) et devint donc député lorsque celui-ci entra au gouvernement le 30 mars 1993. Sarkozy perdant son portefeuille en 1995, il devait céder son siège de député pour celui de sénateur, qu’il occupa du 24 septembre 1995 au 30 septembre 2004, ne se représentant pas à cette date. Ceccaldi-Raynaud fut régulièrement mis en cause par la presse pour diverses affaires, comme celle du marché public du chauffage de la Défense en 2004.

Malade, hospitalisé un temps, il dut laisser la mairie de sa ville de Puteaux à sa fille Joëlle, qui était sa première adjointe. Il devint alors 9e adjoint en avril 2004. Mais sa fille refusa de lui céder sa place en septembre suivant lors d’une mémorable séance de conseil municipal et l’écarta, tout comme il avait écarté Dardel trois décennies plus tôt. Il la dénonça dans la presse, à laquelle il déclarait qu’elle n’avait « ni les qualités morales, ni les qualités physiques et intellectuelles pour le poste ». Il présenta une liste contre elle mais ne recueillit que 7,75 % des voix, contre 53 à la liste de sa fille. Seul élu de sa liste il dut cependant se retirer car avec son petit-fils élu sur la liste de Joëlle Ceccaldi, il y avait un Ceccaldi de trop aux yeux du code électoral.

Par-delà ses évolutions politiques, Ceccaldi-Raynaud s’installa dans la durée et mit fin à ce qui fut un bastion de la gauche durant plus d’un demi-siècle, mais aussi un symbole contesté du socialisme municipal, avec les personnalités controversées de Georges Barthélémy* et Georges Dardel. Ceccaldi-Raynaud reconnaissait sans ambages faire du clientélisme, dans une ville qui comprenait 5 600 logements sociaux et de très nombreux employés communaux (2 000 au début du XXIe siècle pour environ 40 000 habitants). Il déclarait : « il faut une politique pour chaque classe » et « faire du clientélisme, pour un maire, c’est inévitable ». Mais il ajoutait justement : « Mon système a peut-être été mieux organisé qu’ailleurs ; ça existait avant moi mais avec moins d’habilité, de puissance et d’ampleur. »

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article19127, notice CECCALDI-RAYNAUD Charles par Gilles Morin, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 27 novembre 2008.

Par Gilles Morin

[Assemblée nationale]

SOURCES : Arch. de l’Assemblée nationale. — Arch. OURS, dossier personnel, dossiers Hauts-de-Seine et dossier Dardel ; AGM. — L’Événement du Jeudi, 31 mars 1983. — Marianne, 24 févier 2003. — L’Express, 20 et 25 octobre 2005. — H. Coston, Dictionnaire de la politique française, t. 2, La Librairie française, 1972. — Who’s Who in France.

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