CLAD François, Joseph

Par Madeleine Singer

Né le 8 avril 1927 à Sarrebourg (Moselle), mort le 3 novembre 2017 à Strasbourg (Bas-Rhin) ; agrégé d’histoire ; membre du comité national du Syndicat général de l’éducation nationale (SGEN) de 1963 à 1977.

François Clad, qui portait le prénom de son père, était le fils unique d’un contremaître, chef de chantier dans une entreprise de réfection des voies pour le compte de la SNCF ; celui-ci devint ensuite employé de bureau, chargé de la paye ; il avait un salaire médiocre et pratiquement pas de congés. Il avait épousé Marie Siffert ; tous deux furent expulsés en 1940 par les Allemands car le mari avait participé en 1913 aux mouvements de rue qui eurent lieu à Saverne (Bas-Rhin) à la suite des déclarations d’un officier allemand qui avait traité les habitants de « voyous ». En outre le père de François Clad était membre du Souvenir français qui après 1870 se chargea de l’entretien des tombes des soldats français et perpétua « le souvenir de la France ». François Clad fit donc ses études secondaires au collège Maréchal Lannes à Lectoure (Gers) et passa le baccalauréat à Toulouse (Haute-Garonne) en juin 1945.

Rentré en Moselle avec ses parents, il entra à l’université de Strasbourg (Bas-Rhin) où il obtint la licence d’histoire en 1950 et le DES l’année suivante. Après un an de service militaire, il reprit ses études. Surveillant d’externat (SE) au collège de Phalsbourg (Moselle) en 1953-1954, il fut alors reçu au CAPES et fit l’année de stage au CPR de Strasbourg. Nommé certifié en 1955 au lycée de Saint-Avold (Moselle), il y demeura jusqu’à sa mutation en 1969 au lycée Kléber de Strasbourg où il prit sa retraite en 1992. Bi-admissible à l’agrégation en 1959, il obtint l’agrégation par promotion interne en 1976. Conseiller pédagogique depuis 1962, il fut en 1976 chargé de la classe préparatoire à l’École des hautes études commerciales (HEC) et eut la responsabilité des épreuves écrites d’histoire et de géographie pour l’École des hautes études commerciales (EDHEC) de Lille ainsi que pour l’Institut des hautes études commerciales de Strasbourg (IECS), rattaché à l’Université. Il eut également la responsabilité des sujets et de l’équipe de correcteurs de l’épreuve d’histoire et de géographie économique d’ECRICOME (Écrit des écoles de commerce) qui organisait l’écrit commun à cinq écoles de commerce : EDHEC, écoles de Reims (Marne), de Rouen (Seine-Maritime), de Bordeaux (Gironde) et de Marseille (Bouches-du-Rhône).

Il fut en même temps professeur associé à l’université de Sarre, sise à Sarrebruck, capitale de cette région de la République fédérale allemande (RFA) : il y prépara les épreuves de français en propédeutique et enseigna l’histoire de l’Allemagne, en complément de son service au lycée de Saint-Avold. Il fut ensuite de 1969 à 1976 professeur associé au Centre de formation des PEGC de Strasbourg, en complément de son service au lycée Kléber. Il avait soutenu en 1964 devant l’université de cette ville une thèse sur « Saint-Quirin au XVIIIe siècle » : cette verrerie fonctionna de 1741 à 1844 et fut alors rachetée par Saint-Gobain qui la transféra à Cirey (Meurthe-et-Moselle). François Clad avait épousé en 1952 Paulette Rémy qui était institutrice ; ils eurent trois enfants : deux filles, l’une sage-femme, l’autre professeur d’École ; un fils instituteur. Le père de Paulette Rémy, simple ouvrier devenu contremaître et acheteur de bois pour une scierie qui employait 49 personnes, n’était pas mieux loti que le père de F. Clad car lui aussi avait un salaire médiocre et pratiquement pas de congés.

François Clad, chef de scouts de France de 1945 à 1951, avait alors contribué à la relance du scoutisme après-guerre à Sarrebourg où habitaient ses parents. Il était en même temps co-responsable des « étudiants cathos » de la faculté des lettres de Strasbourg et présida en 1949-1950 la « corpo des lettres ». Son diplôme d’études supérieures l’orientait vers les questions sociales car il s’intitulait De Rerum novarum à Graves de Communi. Il montrait comment cette encyclique de 1901 était en retrait par rapport à la première parue en 1891. À la Libération, il lisait Témoignage chrétien et l’Aube, puis quand ce quotidien disparut en 1951, il devint lecteur du Monde. En outre la façon dont son père et son beau-père avaient été traités par les patrons l’incitait à adhérer à un Syndicat affilié à une centrale ouvrière : dès qu’il fut SE, il choisit donc le SGEN dont sa femme faisait déjà partie depuis plusieurs années. Il devint aussitôt responsable des surveillants du collège de Phalsbourg, puis des stagiaires du CPR l’année suivante. Secrétaire d’établissement lors de son arrivée au lycée de Saint-Avold, il le demeura jusqu’à son départ pour Strasbourg. Dès 1958 il fut membre du bureau départemental qui siégeait à Metz (Moselle) et y organisa la commission socio-pédagogique. Puis en 1968 quand le SGEN départemental créa des secteurs pour coordonner les sections locales d’arrondissement qui comprenaient le Premier degré, les CES et les lycées, F. Clad devint responsable du bassin houiller de Lorraine où il avait été l’un des animateurs des grèves de Mai 68.

Dès avril 1962, on le retrouva au congrès national où il intervint sur la réforme de Jean Berthoin qui avait instauré un cycle d’observation constitué par des classes de sixième et de cinquième : il soulignait qu’à Saint-Avold, l’association des parents d’élèves, présidée par un ingénieur des Houillères, s’efforçait d’en paralyser l’application en défendant les classes primaires du lycée alors que l’exiguïté des locaux ne permettait pas la création des classes de Seconde nécessaires pour accueillir les élèves des CEG. Aussi F. Clad fut-il un des militants qui animèrent à la session de Bierville de septembre 1962 l’option « démocratisation et réforme de l’enseignement » ; il avait lors de l’ouverture de la session présenté avec un militant confédéral un historique de la CFTC qui posait le problème de la déconfessionnalisation ; F. Clad fut le rapporteur de l’équipe mosellane chargé de réfléchir à cette option ; cette déconfessionnalisation fut effective deux ans plus tard. Il entra alors au conseil de l’Union départementale CFDT de Moselle et y demeura jusqu’à son départ pour Strasbourg.

Convoqué au comité national de février 1963 pour la réunion des responsables des commissions pédagogiques de province, F. Clad évoqua l’enquête faite en Moselle sur le passage du CM2 à la Sixième, enquête dont Syndicalisme universitaire publia le mois suivant la partie relative au français. Antoine Prost* le chargea de présenter lors de l’assemblée plénière du comité national, le 16 février 1963, le fonctionnement de la carte scolaire dans l’académie de Strasbourg. Dès lors F. Clad devint de fait membre du comité national où il fut élu au congrès de 1964 pour le Second degré. On comprend qu’il fît partie des membres choisis par le congrès de 1966 pour constituer la commission pédagogique nationale.

Élu en 1965 à la commission administrative paritaire académique (CAPA) des certifiés de Strasbourg, il fut, la même année, élu à la CAP nationale où il allait siéger pendant 20 ans, passant en 1979 à la CAPN des agrégés après sa nomination dans ce corps en 1976. Cela ne l’empêchait pas de se préoccuper des questions d’ordre général. Ainsi au comité national du 1er mai 1967, il soulignait la gravité des « pleins pouvoirs » demandés par le gouvernement qui voulait agir par ordonnances dans le domaine économique pour préparer la France à l’ouverture des frontières au sein du Marché commun le 1er juillet. Il y eut d’ailleurs le 17 mai une grève décidée par la CGT, la CFDT, FO et la FEN contre cette mesure qui, en supprimant le débat public, excluait toute possibilité d’intervention des organisations syndicales. Mais le projet fut adopté par l’Assemblée nationale qui rejeta la motion de censure.

En arrivant à Strasbourg en 1969, François Clad fut aussitôt secrétaire départemental général du Bas-Rhin car Alfred Stengel* était trop pris par ses fonctions de principal adjoint. Membre à ce titre du bureau académique, F. Clad se chargea en outre du Second degré de l’académie. Comme Gustave Hentz*, secrétaire académique depuis 1953, lui demandait de le remplacer, il accepta seulement au bureau académique du 27 novembre 1969 de devenir secrétaire académique adjoint car il ne voulait pas dans l’immédiat abandonner les lycées. C’est seulement au bureau académique du 21 janvier 1971 qu’il devint secrétaire académique, charge qu’il allait occuper pendant près de sept ans.

Les problèmes ne manquèrent pas. D’abord le statut scolaire local continuait à être attaqué par la FEN, la Ligue de l’enseignement et divers partis de gauche : ces organisations contestaient le fait que l’enseignement religieux était donné dans les locaux scolaires. Or le SGEN estimait satisfaisant le décret du 3 juillet 1974 qui avait pour les instituteurs substitué le volontariat à l’obligation d’enseigner la religion. Le Syndicat jugeait en effet qu’il avait seulement à se soucier de la liberté de conscience des maîtres et des élèves-maîtres, qu’il n’avait pas à prendre position sur les autres aspects du statut scolaire qui concernaient l’ensemble de la population. En même temps quand le SGEN national organisa, en 1971 et en 1974, des actions pour obtenir l’allégement des effectifs des classes, on réclama en Alsace l’abaissement des effectifs des écoles maternelles avec de grandes manifestations sur la voie publique à Strasbourg et à Mulhouse (Haut-Rhin).

Il fallut aussi lutter pour le maintien de la formation des apprentis (formation générale et technique théorique) dans les établissements de l’Éducation nationale, mais en même temps revendiquer le contrôle de leur formation pratique en entreprise par le corps d’inspecteurs de l’Éducation nationale, alors que le régime allemand avait confié ce contrôle à des employés des chambres consulaires. Le SGEN demandait en outre que la totalité de la taxe d’apprentissage (0,05 % de la masse salariale des entreprises) fût versée par celles-ci car le régime allemand avait exonéré l’Alsace et la Moselle d’une partie de cette taxe. Mais en 1999 seul le maintien de la formation des apprentis en CET, à raison de 8 heures par semaine, était acquis ; les autres mesures dues à l’occupation allemande subsistaient toujours. Enfin lorsque le 2 février 1973 furent créés les GRETA (groupement d’établissements associés) dotés d’un conseiller en formation continue, François Clad dut défendre le personnel qui s’occupait des GRETA, assurer la liaison avec le service chargé au Rectorat de ce secteur, veiller à la présence de délégués syndicaux au sein des conseils des GRETA. Bien entendu il coordonnait par ailleurs l’action des trois départements dont les positions étaient parfois divergentes car leurs populations avaient leur propre spécificité. Sa tâche toutefois s’allégea un peu lorsqu’en 1972 la Moselle fut rattachée à l’académie de Nancy (Meurthe-et-Moselle).

En 1977 François Clad eut un différend avec un membre du bureau académique. Il fut mis devant le fait accompli, étant remplacé par Gérard Wurtz, professeur au lycée d’enseignement professionnel (LEP) de Schiltigheim, dans la banlieue de Strasbourg. Mais il demeura un militant, assurant notamment ses fonctions tant à la CAPA qu’à la CAPN. En 1999 il était encore secrétaire de la section des retraités SGEN de l’académie de Strasbourg et il représentait le Syndicat à l’Union départementale interprofessionnelle des retraités CFDT (UDIR).

François Clad assuma en outre des responsabilités dans d’autres domaines. Membre du comité du club alpin de Strasbourg, il est depuis 1976 responsable de son camp familial d’été. Il devint en 1977 vice-président de l’Association pastorale de sa paroisse et le demeura jusqu’en 1994. Il fut alors élu président du Conseil de fabrique et l’est toujours en 1999. Par ailleurs, président de la Paroisse universitaire du Bas-Rhin de 1981 à 1988, il est encore en 1999, depuis seize ans, un des responsables de la session annuelle de cette association à Notre-Dame-du-Laus, sise à Saint-Étienne-le-Laus (Hautes-Alpes).

François Clad ne négligeait pas pour autant la vie politique. En 1989 il avait été élu conseiller municipal de Mittelhausbergen, petite commune de 1 500 habitants proche de Strasbourg. Réélu en 1995 sur une liste « apolitique » comme la fois précédente, il était en 1999 délégué spécial à l’information. En cette qualité, il ne dépendait que du maire et ne recevait pas d’indemnité comme les quatre adjoints. Il était également membre du Centre communal d’action sociale (CCAS).

François Clad était officier des Palmes académiques et avait la médaille de la Jeunesse et des Sports.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article20038, notice CLAD François, Joseph par Madeleine Singer, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 16 avril 2022.

Par Madeleine Singer

ŒUVRE : Thèse dactylographiée, biblio. nat. univ. Strasbourg, 1969, 223 p. — Lycée Kléber historique 1919-1994, assoc. des anciens élèves lycée Kléber Strasbourg, 1995, 61 p. — Lettenbach, maison d’enfants spécialisée Lettenbach-Saint-Quirin (Moselle), 141 p. — Saint-Quirin 2000 ans d’histoire, société hist. et archéol. lorraine, Sarrebourg (Moselle), 295 p.

SOURCES : M. Singer, Le SGEN 1937-1970, Th. Lille III, 3 vol. (Arch. Dép. Nord, J1471, spécialement le carton 25 pour l’académie de Strasbourg) ; Histoire du SGEN, Presses univers. de Lille, 1987, 669 p. ; Le SGEN. Des origines à nos jours, Le Cerf, 1993, collection « Histoire », 352 p. (Arch. dép. Nord, J1578). — Syndicalisme universitaire (1962-1984). — Pour l’apprentissage, lettre de Gérard Wurtz (SA des CET de l’académie de Strasbourg, 1974-1977, puis secrétaire de l’Union professionnelle régionale d’Alsace) à M. Singer, 19 février 1999. — Lettres de F. Clad à M. Singer, juillet 1998, 18 janvier 1999, 28 janvier 1999, 16 février 1999, 21 mars 1999 (AP).

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