BRUNACCI Jean

Par Bernard Thiéry

Né le 24 octobre 1950 à Toul (Meurthe-et-Moselle) ; employé des PTT  ; militant à Nantes (Loire-Atlantique), militant d’un CAL, du Secours rouge, de la LC, membre du CC de la LCR, militant du NPA ; acteur de Mai 68 à Nantes, militant CFDT44, secrétaire départemental et membre du bureau fédéral de SUD PTT 44, co-fondateur d’AC ! Nantes ; secrétaire de l’UR Solidaire, membre du CESER, militant internationaliste.

Son père, Roger Brunacci, est né le 4 mai 1925 à Pagny-sur-Moselle (arr. de Nancy, Meurthe-et-Moselle). Il était chaudronnier dans la petite entreprise de son père. Il se maria en septembre 1949 à Paris avec Gisèle Coquelle. Gisèle Brunacci, mère de Jean Brunacci, née à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) le 7 septembre 1932, était issue d’une famille du Pas-de-Calais, de droite, très catholique. À l’âge de 18 ans à Toul, elle donna naissance à Jean. En avril 1951, avec Jean, leur bébé de six mois, Gisèle et Roger Brunacci s’installèrent à Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), chez la grand-mère maternelle de Gisèle. Elle était très pieuse, si bien qu’à l’âge de deux ans, Jean Brunacci fut baptisé à la basilique royale de Saint Denis (Seine-Saint-Denis).

Olindo Brunacci, le grand-père paternel de Jean Brunacci né en Toscane (Italie) en 1898, était l’un des responsables du Parti communiste italien (fondé en janvier 1921). Il dut quitter l’Italie au cours de l’été 1922, avant la marche paramilitaire du 22 octobre 1922 de Mussolini vers Rome. Réfugié en Lorraine, il y rencontra Louisa De Zani avec laquelle il eut deux enfants, Henri et Roger. Olindo Brunacci milita activement au PCF. Il mourut en 1944, à l’âge de 46 ans, après s’être engagé dans les FTP.

Roger Brunacci, père de Jean, adhéra et milita dès 1938 aux Jeunesses Communistes (JC), puis au PCF. Il en démissionna en 1984 par opposition à la participation communiste au gouvernement Mitterrand-Mauroy. Se définissant comme communiste sans parti, il resta fidèle jusqu’à sa mort, en avril 1994, aux valeurs qu’il considérait comme celles de la vraie gauche.

À l’été 1961, les parents de Jean Brunacci s’installèrent à Nantes (Loire-Atlantique), ville d’adoption de Jean Brunacci. Gamin aux origines sociales modestes, il fit ses études secondaires (de la 6e à Lettres Sup) au lycée Clemenceau, établissement très. Il se révéla très bon élève, y apprit le latin et le russe.

Dans son édition du mardi 26 novembre 2019, Presse Océan, quotidien nantais, départemental et régional à forte audience, publia un portrait titré « Jean Brunacci, ce révolté bien élevé ». Jean Brunacci y expliquait que, très tôt, bien qu’encore faiblement politisé, il ne supportait pas les brimades et les injustices, en particulier celles infligées aux plus faibles. Aussi, suivant l’exemple de son père, c’est tout naturellement qu’en début 1964, à l’âge de treize ans, il s’engagea, aux JC dont il fut militant jusqu’à l’automne 1967. Il fut alors sensibilisé à la guerre du Vietnam et marqué par l’assassinat de Che Guevara qu’il admirait pour son incarnation d’un romantisme révolutionnaire, auquel Jean Brunacci s’identifiait, au point de se qualifier lui-même de « trotsko-guévariste ». Avec un camarade de classe en contact avec la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR) de Paris, Jean Brunacci lança en janvier-février 68, au lycée Clemenceau, un CAL (Comité d’action lycéen). En mars 1968, en associant les élèves internes des classes préparatoires de l’établissement, le CAL mena une grève de la cantine de quelques jours, qui permit une nette amélioration de la qualité des repas.
Jean Brunacci et ses camarades suivirent fiévreusement à la radio le déroulement de « la nuit des barricades » du 10 mai. Le lendemain, le CAL organisa une manifestation de lycéens, la première du genre à Nantes. Elle fit le tour des lycées de la ville et rassembla deux mille jeunes dans le centre-ville aux cris de « Peyrefitte démission ! » et « A bas les lycées casernes ! » Fort de ce succès, le CAL structura un important cortège lycéen, précédé d’un grand portrait du Che, dans l’imposante manifestation interprofessionnelle qui marqua la grève générale du 13 mai.
En grève des cours jusqu’à la mi-juin, Jean Brunacci et ses amis du CAL, organisèrent l’occupation du lycée, soutenue par des enseignants alors syndiqués pour la plupart au SGEN-CFDT. Ils participèrent aux nombreuses manifestations à Nantes qui rythmèrent le mouvement, en particulier celle du 13 mai qui se conclut par l’envahissement de la Préfecture. A celle du 24 mai, des barricades furent érigées et de violents affrontements eurent lieu jusqu’à deux heures du matin au pied du Monument aux morts. Jean Brunacci découvrit alors une jeunesse ouvrière, dont la volonté d’en découdre l’impressionna.
Dans une brochure éditée par Ensemble !44, à l’occasion du 50e anniversaire de mai 68, Jean Brunacci, fit ce retour critique : « Le mouvement de Mai laisse un goût d’inachevé. Peut-être étions-nous naïfs ou portés par une ivresse de liberté ? Nous pensions confusément que le pouvoir était à portée de la main. On avait l’impression d’une lame de fond à laquelle rien ne résistait. Je n’avais pas conscience alors de la trahison des directions du mouvement ouvrier ».

Il obtint son baccalauréat en juillet 1968 avec la mention Très bien puis fit ses études supérieures en Histoire à l’Université de Nantes d’octobre 1968 à juin 1973. Mai 68 renforça ses convictions internationalistes. L’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du Pacte de Varsovie, le 21 août 1968, mettant fin au « Printemps de Prague » consomma sa rupture avec le PCF et le « communisme officiel ». Il rejoignit alors les « Cercles Rouges » mis en place par des étudiants venus de Rennes (Ille-et-Vilaine). Ces cercles devinrent la Ligue Communiste (LC) ; Jean Brunacci y adhéra à sa création en avril 1969. Il resta militant de la Ligue, devenue LCR en 1974, jusqu’à son auto-dissolution en 2009 à la veille de la création du NPA dans laquelle Jean Brunacci s’engagea très activement. En désaccord avec le cours du NPA qu’il jugeait sectaire, il le quitta en juillet 2012, à la Conférence nationale de Nanterre. Avec plusieurs centaines de militants, il créa la Gauche Anticapitaliste (GA) qui rejoignit le Front de Gauche puis, à partir de novembre 2013, le mouvement « Ensemble ! », considérant cet engagement comme la continuité de son action à la Ligue.
Durant ces quarante années de militantisme à la Ligue, il fut pendant quasiment trente-cinq ans membre de sa direction de ville à Nantes ; il fut membre du Comité central de la LCR, de 1978 à 1982, au titre de la Tendance 3 (la T3). Cette tendance animée notamment par Michel Lequenne s’opposa à la fusion avec l’OCI proposée par la majorité de la direction nationale et du Secrétariat Unifié de la IVe Internationale ; cette tendance craignait que s’en suive un repli sectaire ; elle s’opposa aussi à l’orientation de la direction nationale de soutien critique de l’intervention russe en Afghanistan. Aux élections législatives de 1978, dans le cadre d’un accord conclu entre la LCR, l’OCT et le CCA, sous le sigle PLS-PLT (Pour le socialisme, le pouvoir aux travailleurs), il fut le candidat choisi par la LCR dans la quatrième circonscription de Loire-Atlantique.

Mai 68 fut pour lui un révélateur du mouvement ouvrier et a déterminé ce qui sera son autre engagement, le syndicalisme d’abord à la CFDT puis à SUD/Solidaires. À Nantes, la LC se construisit, comme ailleurs, dans la jeunesse étudiante, particulièrement à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines où Jean Brunacci était inscrit et où la LC organisa la lutte contre la hausse des droits d’inscription universitaires. Elle devint la première force politique de cette faculté, en concurrence avec l’Alliance des jeunes pour le socialisme (AJS), organisation de jeunes de l’Organisation communiste internationaliste (OCI). Jean Brunacci fut l’un des dirigeants des mouvements étudiants de 1972 et 1973, portés par des Comités de lutte créés à l’initiative de la Ligue.
C’est à l’occasion du mouvement étudiant de 1972 que Jean Brunacci fit la connaissance de Christine Huet, née le 4 novembre 1952, étudiante en anglais ; elle était en cours de radicalisation ; il l’épousa le 25 mai 1974. Elle devint professeure certifiée ; elle exerça dans l’enseignement privé et pris diverses responsabilités dans la CFDT et milita pour la nationalisation de l’enseignement privé. Elle fut militante de la LCR de 1979 à 1984 ; elle resta « compagne de route » de la Ligue et fut enthousiasmée par les campagnes d’Olivier Besancenot aux présidentielles de 2002 et 2007. Ils n’eurent pas d’enfants et divorcèrent en 1983.

Le 24 octobre 1970, à Nantes, le jour de ses 20 ans, Jean Brunacci avait été arrêté, avec trente-sept autres manifestants dont plusieurs de la Ligue, pour avoir participé à une manifestation interdite par la préfecture ; elle était organisée par le Secours rouge dont il était membre actif, afin d’exiger la libération d’Alain Geismar, alors dirigeant de la Gauche Prolétarienne (GP) interdite en mai 1970. Il avait été condamné le 22 octobre à dix-huit mois de prison pour reconstitution de mouvement dissout et incarcéré à la prison de Fresnes (Val-de-Marne).
Après quelques échauffourées avec la police, la manifestation fut dispersée violemment. Dix-neuf manifestants, dont Jean Brunacci et deux autres militants de la Ligue, furent inculpés au titre de la première loi « anti casseurs » risquant entre six mois et deux ans de prison. Après huit jours de détention provisoire, commença le procès dit « du Secours rouge » qui dura plusieurs semaines, et eut un effet retentissant sur le plan local. Un grand meeting se tint avec des personnalités nationales et locales dont Bernard Lambert, dirigeant-fondateur du mouvement des Paysans-Travailleurs, ancêtre de la Confédération Paysanne. À cette période, le Secours rouge connaissait un développement rapide. Différents mouvements de militants incarcérés et des grèves de la faim dans les prisons suscitèrent en février 1971 la création du Groupe d’information sur les prisons (GIP). Les témoignages de soutien aux inculpés jeunes, étudiants, en très grandes majorité, affluèrent de partout ; tous les syndicats ouvriers et la LDH, publièrent un communiqué commun exigeant l’arrêt des poursuites et la relaxe des prévenus. Celle-ci fut prononcée à l’issue des plaidoiries des avocats diligentés par la LDH ; Jean Brunacci, au nom de l’ensemble des inculpés, fit une intervention dénonçant la répression sauvage de la manifestation et les lois liberticides promues par Raymond Marcellin, ministre de l’Intérieur de 1968 à 1974.

En 1973, après avoir dépensé beaucoup d’énergie dans l’organisation du mouvement de la jeunesse scolarisée contre la loi Debré, et après quatre semaines d’occupation active de la faculté des Lettres puis de celle des Sciences, Jean Brunacci échoua de peu à l’agrégation d’Histoire. Comme beaucoup d’autres camarades après la dissolution de la Ligue en juin 1973, il se fit plus discret. Pendant les vacances d’été, il entra aux PTT comme auxiliaire, à la Recette Principale de Nantes (Nantes RP). Il fit carrière à la Poste jusqu’à sa retraite, le 2 décembre 2010, à l’âge de soixante ans. Lorsque son contrat d’auxiliaire à la Poste fut reconduit, il se syndiqua à la CFDT en août 1973. Il mobilisa ses collègues en soutien aux travailleuses et travailleurs de Lip. Trois cars, affrétés par le « Comité de soutien à Lip » soutenu par l’UD CFDT de Loire-Atlantique et les Paysans-Travailleurs, partirent de Nantes pour la manifestation du 29 septembre 1973 à Besançon qui ressembla environ cent mille personnes.
Commença alors pour Jean Brunacci une autre activité militante, celle de militant syndical et selon la formule de la Ligue, « l’expérience du travail ouvrier ». Dans son centre, il s’impliqua fortement dans la grande grève des PTT d’octobre-novembre 1974, qui dura plus d’un mois, organisant massivement ses collègues auxiliaires dans une commission qu’il créa à la CFDT-PTT 44. À partir de cette date, Jean Brunacci fut de tous les combats marquants du mouvement ouvrier, combinant une activité politique toujours aussi aigüe et une activité syndicale intense, pendant dix-sept ans à la CFDT. Il s’opposa au « recentrage » de cette confédération dès 1979 imposé par la direction confédérale.
Jean Brunacci travailla à la construction d’une opposition à la ligne confédérale de la CFDT, dans la CFDT-PTT 44. La fédération CFDT-PTT était alors animée par le CERES et le « courant Héritier » qui se situait en opposition à l’orientation de la confédération. Il contribua à la construction de l’Union départementale (UD) CFDT de Loire-Atlantique. Un « courant lutte de classes » se mit progressivement en place dans cette UD à partir du début des années 1980, regroupant des militants des PTT, de la Santé, de la SNCF, de la métallurgie (chantiers navals de Dubigeon dont la section CFDT était animée par le PSU). Ce courant tenta de se structurer en tendance à l’échelle de cette UD qui comptait environ 30 000 adhérents et était alors la première de France en termes d’adhérents. Ces tentatives de constitution d’une tendance organisée à l’intérieur de cette grosse UD furent combattues avec énergie à la fois par la direction de l’UD CFDT 44 et par la Confédération.
La grève des « camions jaunes » PTT de la région parisienne en novembre 1988, fut menée par une coordination qui avait reçu le soutien de l’Union régionale Ile de France et était animée par l’opposition de gauche à la fédération CFDT PTT et à la Confédération. Au terme de cette grève, la direction de la CFDT décida de démettre de leurs mandats, donc d’exclure , quelques centaines de militants combatifs qui firent le pari de créer un syndicat anticapitaliste et autogestionnaire, reprenant en cela le meilleur des acquis de la CFDT des années 1970. Ce fut la naissance de SUD (Solidaires Unitaires Démocratiques) que Jean Brunacci rejoignit en mars 1990, lors de la grève contre la réforme Quilès (alors ministre des PTT), démantelant les PTT en deux entités distinctes, la Poste et France Télécoms, prélude à leur privatisation.

Jean Brunacci fut secrétaire départemental de SUD PTT 44 de 1992 à 2000, membre de son bureau fédéral national de 1992 à 1996. Il s’engagea très vite dans un travail interprofessionnel qui passa par le lancement d’A.C ! (« Agir Ensemble contre le Chômage ») en 1993, avec Aline Chitelman, militante de la CGT. AC ! organisa fin 1993 une manifestation sans précédent qui regroupa plus de cinq-cents chômeurs qui envahirent la cour de l’Hôtel de Ville de Nantes. En mai 1994, AC ! affréta trois cars, majoritairement rempli de privés d’emploi, à la manifestation nationale à Paris qui regroupa près de cent mille personnes.
En 1996, dans la continuité du mouvement de l’hiver 1995, massif et très combatif à Nantes et à Saint- Nazaire (Loire-Atlantique), avec des militants du SNUI (syndicat majoritaire aux Impôts), il jeta les bases de l’UD Solidaires de Loire-Atlantique, dont il fut secrétaire départemental de 1996 à 2014, et son porte-parole jusqu’à son dernier congrès, en novembre 2019. Jean Brunacci fut secrétaire de l’Union régionale Solidaires à partir de 2008. Il est membre du CESER (Conseil Économique Social et Environnemental) des Pays de la Loire depuis novembre 2013.

C’est aux PTT que Jean Brunacci rencontra Angèle Azzopardi. D’origine corso-sicilo-maltaise, elle était issue d’une famille de cheminots. Elle fut recrutée à la LC après la grande grève nationale d’octobre-novembre 1974, milita à la CFDT des Chèques Postaux de Nantes, et devint membre du bureau de la CFDT-PTT 44. Ancienne militante du PSU et de Révolution !, elle combattit le cours ‘droitier’ de la CFDT et fit partie du premier noyau dur qui créa SUD PTT en Loire-Atlantique en 1989 ; elle en fut dirigeante jusqu’à la prise de sa retraite anticipée en mars 1994, à l’âge de 47 ans, en tant que fonctionnaire, mère de trois enfants. Féministe et internationaliste convaincue, en retraite professionnelle, Angèle Azzopardi, s’investit plus particulièrement dans la solidarité avec les sans-papiers, à la suite de l’évacuation brutale de l’église Saint Bernard à Paris, le 23 août 1996. À Nantes, elle accompagna l’occupation de l’église Sainte Thérèse à l’été 1997. De 1998 à 2000, elle joua un rôle majeur dans l’hébergement de deux-cents sans papiers, très majoritairement africains, à l’ancienne Bourse du travail de Nantes, en lien avec l’UD CGT, et l’un de ses principaux responsables, Peter Dontzow. Elle aussi fut de l’aventure du NPA et en restait membre en 2021. Mariés en mai 1984, Angèle et Jean Brunacci adoptèrent une fratrie malgache en 1989. David, Jean-François et Lise étaient alors respectivement âgés de 9, 8 et 5 ans. En 2021, Angèle et Jean avaient deux petits-enfants, fils de Lise et de son compagnon Grégory : Simon né en janvier 2011 et Yanis né en juin 2013.

Sensibilisé depuis 1967, à la guerre du Vietnam, à partir de 1971, il s’engagea à Nantes, dans la Construction du FSI (Front Solidarité Indochine) qui regroupa plusieurs centaines de militants et sympathisants. Il combinait les mobilisations en soutien au combat des peuples indochinois face aux bombardements et à la puissance de l’impérialisme US, et les opérations « coups de poing » se matérialisant par des rassemblements surprise. Au cours de ceux-ci eurent lieu des actions telles que l’incendie d’effigies de l’oncle Sam, de Richard Nixon et du drapeau étoilé, l’accrochage d’énormes banderoles en haut d’églises et de grands magasins dans l’hyper-centre de Nantes, et sur le fronton de la Faculté des lettres et sciences humaines de Nantes portant des slogans tels que « US go home ! A bas Thieu, fasciste et assassin ! ».

Avec sa première épouse Christine Huet, Jean s’investit dans les comités « Irlande libre » en 1981-1982, à l’occasion de la grève de la faim de Bobby Sands. Les comités soutinrent activement la lutte des prisonniers républicains irlandais, pour la plupart combattants de l’IRA. Ils luttèrent pour la restauration du statut de prisonnier politique abrogé en 1976 par le gouvernement travailliste de James Callaghan et pour la fermeture des H-blocks, quartiers de haute sécurité où ils étaient incarcérés dans des conditions innommables ; ils exigèrent leur libération des geôles britanniques en Irlande du Nord. Jean Brunacci fit plusieurs séjours en Irlande, toujours attaché qu’il était à la sortie de l’Ulster du Royaume Uni et à la réunification de l’Irlande dans le cadre d’une république démocratique et socialiste.

Dès le coup d’État du général Jaruzelski le 13 décembre 1981, Jean Brunacci s’engagea dans la création, à Nantes et sa région, d’un Comité de Soutien au syndicat libre Solidarnosc. Le développement de ce comité permit l’envoi de plusieurs convois de solidarité avec le peuple polonais en lutte à la dictature du POUP (Parti Ouvrier Unifié Populaire) appuyée par la bureaucratie stalinienne du Kremlin et les troupes du Pacte de Varsovie. Du 20 au 26 mai 1982, sous couvert d’aide humanitaire Jean Brunacci avec cinq de ses camarades, partit en Pologne, alors sous loi martiale. Il était à la tête d’un convoi de trois fourgons, remplis de médicaments, de vivres et de vêtements et aussi de deux radio-émetteurs conditionnés dans les commandes du véhicule, de rouleaux de machines à écrire, d’un appareil photo performant, d’une somme de mille dollars US, et de littérature subversive ( « La révolution trahie » de Léon Trotski, Inprecor, revue de IVème Internationale, en polonais). Jean Brunacci remit cet équipement à des camarades polonais trotskistes, pour l’organisation Solidarnosc, à Varsovie et à Lublin, grande ville du Sud-est de l Pologne. Il y retourna, en avril 1983, avec deux autres camarades, séjournant à Lodz, Wroclaw, Cracovie, Lublin et Varsovie pour aider des militants de la gauche de Solidarnosc dans leur combat contre la junte militaire au pouvoir.

Jean Brunacci, consacra à partir de 2014, beaucoup de temps et d’énergie au soutien aux migrants, venus principalement d’Afrique et accueillis pitoyablement en France, y compris à Nantes. Cette ville était sous mandat socialiste sans discontinuité depuis l’élection de Jean Marc Ayrault en 1989 que Jean Brunacci avait connu à l’Université ; Nantes est membre de l’ANVITA (Association nationale des villes et territoires accueillants).
Suite à l’évacuation musclée d’une centaine de migrants d’un squat nantais en juillet 2014, Jean Brunacci, avec la LDH et le Gasprom, antenne nantaise de la FASTI, créa un Comité de Soutien aux migrants qui, en 2021, restait vivace au sein de l’inter-collectif « Personne à la rue ! » regroupant une quarantaine d’associations. Parallèlement à ce collectif, Jean Brunacci, en tant que porte-parole de l’UD Solidaires 44, œuvra à la mise en place au début de l’année 2015, d’une intersyndicale de soutien aux migrants, regroupant Solidaires, le CGT et la FSU mais aussi la CFDT et l’UNSA, faisant de cette intersyndicale, un cas unique en France. Cette intersyndicale, était d’autant plus importante qu’elle a permis, en crédibilisant le collectif de soutien aux migrants, avec lequel elle travaillait en permanence et en parfaite harmonie, d’initier des mobilisations de masse, s’appuyant sur un puissant réseau de solidarité dans la métropole nantaise et d’obtenir des victoires significatives. En septembre 2018, deux manifestations de deux mille personnes chacune, aboutirent à la mise à l’abri, par la municipalité nantaise de sept cents migrants qui avaient érigé un campement dans un square en plein cœur de Nantes. En décembre 2020 et en mars 2021, toujours sous l’impulsion du collectif de soutien aux migrants et de l’intersyndicale, la pression exercée sur les institutions a contraint la mairie, en lien avec la préfecture, à mettre à l’abri quatre cents migrants, survivants dans deux squats précaires.
En 2021, le réseau de solidarité avec les migrants faisait partie intégrante du mouvement social à Nantes et sa métropole, ainsi qu’à Saint-Nazaire ; son activité était reconnue, y compris par les institutions, comme étant « d’utilité publique » , marque de reconnaissance d’une activité en profondeur qui, selon Jean Brunacci, n’aura de cesse tant qu’il restera des personnes de toutes origines et conditions à la rue.
Jean Brunacci était toujours en 2021 membre de la IVe Internationale, à laquelle il était affilié depuis son adhésion à la LC.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article242442, notice BRUNACCI Jean par Bernard Thiéry, version mise en ligne le 7 septembre 2021, dernière modification le 9 septembre 2021.

Par Bernard Thiéry

SOURCES : Documents fournis par Jean Brunacci. —Témoignage de Jean Brunacci, lycéen, Nantes Mai 68, 50 ans après, 2018, article de Christophe Patillon, du Centre d’Histoire du Travail-CHT de Nantes, entretien avec Yannick Guin, brochure éd. Ensemble ! 44 . — Jean-Paul Salles, La Ligue communiste révolutionnaire 1968-1981 Instrument du Grand soir ou lieu d’apprentissage ?, Presses universitaires de Rennes, décembre 2005. — Hélène Adam et François Coustal, C’était la Ligue, Syllepse, novembre 2018. – François Coustal, L’incroyable histoire du Nouveau parti anticapitaliste, Demopolis, Janvier 2009.

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