GRENUS Jacques

Né en 1751 à Genève, mort en 1818. Démocrate genevois.

Petit-fils d’un premier syndic de Genève, fils d’un colonel au service de Louis XIV, Jacques Grenus était d’une part patricien de Genève et d’autre part noble de France, du fait de l’anoblissement de son père, et d’un « arrêt de maintenu » pour la descendance, rendu en 1712.
Avocat, il fut banni de sa ville natale après l’émeute des « natifs » de 1782. Fixé dans le bailliage de Gex, en 1789, il adhéra à la Révolution française et devint maire du Grand-Saconnex (alors département de l’Ain, aujourd’hui canton de Genève). Il fonda bientôt à Genève le Club de l’Égalité qui prêchait, certes, à ses adhérents plébéiens, avant tout l’égalité politique et l’annexion à la France, mais aussi, dans une certaine mesure l’égalité sociale. Grenus tenta même, dans l’hiver de 1791, un coup de force contre les magistrats, qui lui valut un bannissement perpétuel, annulé par la révolution genevoise du 4 décembre 1792.
Établi à Paris, Grenus fut un des animateurs du Club Helvétique de 1792, d’accord avec le girondin Clavière, puis en 1793, avec les amis de Hébert.
Jacques Grenus, dont le département du Mont-Blanc (Savoie annexée) devint le centre d’action, et qui s’y fit élire député-suppléant à la Convention, continua en 1793 de vouloir faire entrer Genève dans la République française, malgré la politique contraire du grand Comité de Salut public (discours de Robespierre du 17 novembre 1793).
Grenus écrivait alors (lettre du 12 novembre 1793) : « Je crois que les principes [républicains ou jacobins] & le Maximum nous mènent à la Communauté, qui est peut-être le seul moyen conservateur du républicanisme, parce qu’il détruit l’ambition individuelle qui lutte sans cesse contre l’égalité, & qu’il tend toutes les facultés à la conservation générale. Vous verrez que pour établir le Maximum, il faudra établir des magasins nationaux pour recevoir l’excédent des consommations & des fabriques, pour être après cela réparti avec égalité, & alors on arrive à côté de la Communauté, où chacun porte le produit de son industrie pour le répartir entre chacun. Cela vous paraîtra très systématiquement philosophique ; mais voyez la force qu’en acquerrait la République qui réunit en elle toutes les ambitions individuelles. Ce serait la perfection de l’Égalité et de la Liberté. — Je vous dirais plus ; je ne conçois pas autrement la République ; ce n’est pas là la loi agraire qui ne peut durer 24 heures, dès l’instant que vous laissez à l’ambition individuelle son jeu. — La Communauté : voilà le grand principe de la République. On passeroit encore pour un fou de le dire, — mais on y viendra, & ce sera l’ordre du jour, ou je suis bien trompé, & de là naîtra la vraie régénération morale & politique. » (Correspondance..., t. I, pp. 2-3, lettre à Desonnas antérieure à la fin de 1793.)
Jacques Grenus était à ce moment, en privé du moins, très en avant de tous les démocrates égalitaires français, Babeuf compris.
Robespierriste affiché et employé dans les bureaux du ministère de l’Intérieur au début de 1794, il fut néanmoins arrêté en ventôse an II (le 16 mars 1794), mais relâché deux jours après. Dès lors, il renia Vincent, Hébert, voire son propre secrétaire, Domenget.
En avril, mai et juin 1794, Grenus s’occupa de l’installation dans les environs de Besançon des ouvriers horlogers « égalitaires » qui avaient été ses amis à Genève. Avec des horlogers de Neuchâtel conduits par Mégevand, les Genevois amis de Grenus furent à l’origine de l’horlogerie bisontine.
Condamné à mort par contumace après le 9 Thermidor, Grenus survécut et se consacra sous le Directoire à l’annexion de Genève, réalisée en 1798, puis à la défense de cette annexion, même après 1813 et 1815.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article31995, notice GRENUS Jacques , version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 février 2009.

SOURCE : Correspondance de Grenus et Desonnaz, ou État politique et moral de la république de Genève, vol. 1, Genève, 1794, p. 1-3. F. — Vermale, Figures du Temps de la Révolution en Savoie, Chambéry, 1929, pp. 87-122. (2e série). — Jacques Grandjonc, Communisme/ Kommunismus/ Communism. Origine et développement international de la terminologie communautaire prémarxiste des utopistes aux néo-babouvistes, Trier, Karl Marx Haus, 1989, p. 304-305. — Note de J. Grandjonc.

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