VAN OVERSTRAETEN Edouard, dit War. Pseudonyme : VAN KAMPIN, PANIER (DBK)

Par José Gotovitch

Né le 8 janvier 1891 à Wetteren (Flandre Orientale), décédé le 9 décembre 1981 à Bruges ; artiste peintre ; fondateur de la Fédération communiste de Wallonie ; fondateur et premier secrétaire général du PCB ; délégué au IIe congrès de l’IC et membre du Comité exécutif de l’IC du IIIe au IVe congrès ; leader de la fraction trotskyste, exclu en 1928.

Fils d’un fonctionnaire des Ponts et Chaussées de Campine, War Van Overstraeten vint très tôt habiter chez sa grand-mère à Bruxelles où il acheva des études moyennes. À l’âge de seize ans, il exerça différents métiers et suivit en même temps les cours de dessin le soir à l’Académie. Il collabora à différents périodiques anarchistes sous le pseudonyme de Van Kampin. Artiste peintre, mobilisé, blessé puis réformé en 1914, il demeura en pays occupé et rejoignit les milieux anarchistes et nationalistes flamands. En 1917, il adhéra et anima un groupe des Jeunes gardes socialistes de Bruxelles qui prirent position en faveur de la paix et de la Révolution russe. À partir de 1919, le groupe se transforma en groupe communiste et proclama son ralliement à la IIIe Internationale. Leur organe, Socialisme devint en mars 1920 L’Ouvrier communiste aux côtés d’un homologue flamand et ce qui jusqu’alors portait le nom de Fédération communiste de Wallonie se transforma en Parti communiste, regroupant de jeunes socialistes, des anarchistes, des activistes
(nationalistes flamands ayant collaboré avec l’occupant), des intellectuels du Groupe Clarté. En août 1920, Van Overstraeten fut présent au deuxième congrès de l’IC et obtint l’affiliation de son Parti. Violemment hostile au groupe et à la personne de Joseph Jacquemotte qu’il traitait d’opportuniste et de centriste, Van Overstraeten dut s’incliner devant les directives du IIIe congrès qui imposa la fusion des deux entités communistes de Belgique. Van Overstraeten dut également accepter, la même année, la participation des communistes aux élections de 1921. Mais sa prééminence sur la fraction issue du POB Jacquemotte se traduisit à ce même congrès par son élection au Comité exécutif de l’IC. En route vers Moscou à cette occasion et bloqué avec ses compagnons à Berlin pendant plusieurs semaines, il dressa un portrait saisissant de la décomposition de la société allemande. Parvenu à destination, il envoya à l’un de ses proches une étonnante description du congrès. Dans la masse des délégués, les seuls Russes étaient parés de l’intelligence et de la maîtrise de l’analyse des forces sociales dans le monde. À eux « l’art politique supérieur » face à un « ramassis de vieilles marchandises de la IIe Internationale » ou alors la « stérilisation complète », « le révolutionnarisme abstrait » des gens du KAPD, le Parti communiste ouvrier d’Allemagne. C’est là sans doute que naquit l’admiration de Van Overstraeten pour Trotsky , le seul qu’il évoquait nommément dans sa missive : Trotsky qui « révèle cette année un art politique d’une admirable puissance, [...] à l’argumentation concise et claire qui va avec une sûreté incomparable au devant des hésitations et des faiblesses devinées ; [...] repoussant avec finesse et force les sottises, les mufleries et les révoltes petites-bourgeoises » (Van Overstraeten à Guillaume Vandenborre, 3 juillet 1921).

Agitateur hors pair, bon orateur, bon journaliste, extraordinairement présent sur le terrain dans tout le pays, il était alors le dirigeant reconnu du Parti. Présent à la conférence de Essen en janvier 1923, il fut arrêté et impliqué dans le « complot de 1923 ». Ses lettres de prison, notamment à sa compagne Nelly Rainchon, membre du CC, témoignent de son incessante préoccupation de l’activité politique du Parti, de sa soif de connaissance, de son ambition culturelle.
Mais, dans les années qui suivirent, l’opposition entre les deux groupes initiaux du PCB allait se couler dans l’opposition du Parti russe. En 1924, Jacquemotte le remplaça au comité exécutif de l’Internationale communiste (CEIC). L’ironie de l’histoire fit de l’opposant au parlementarisme l’un des deux premiers élus du Parti à la Chambre à Liège en 1925, l’autre étant son ennemi Joseph Jacquemotte, élu à Bruxelles. Il y fut le plus souvent absent. En 1926, il entra au conseil communal bruxellois. Présent au 5e plénum en 1926, Van Overstraeten prit clairement position pour l’Opposition russe et obtint le soutien de la majorité du comité central. Il fallut toute la mobilisation de l’IC en 1927 et 1928, dans les fédérations et à la conférence décisive (Waletski, Humbert-Droz, Togliatti…) pour mener à bien la minorisation, puis l’exclusion de cette « minorité » qui représentait en réalité la majorité des membres belges du PC.

Van Overstraeten ne put maintenir son autorité sur l’Opposition qui se fractionna. Il ne la suivit ni dans l’entrisme au POB ni dans la IVe Interna-tionale. Revenu à son métier de peintre, il s’illustra comme l’un des maîtres de l’animisme. Depuis l’après-guerre, on retrouvait sous sa plume des expressions fortement teintées de spiritualité. Il poursuivit son évolution vers le mysticisme chrétien, stigmatisant le « scientisme rationaliste qui avait fait tant de tort au socialisme ». En 1933, il considérait le fascisme comme l’expiation des fautes socialistes et communistes. Sous l’occupation, il fut des peintres flamands que n’effraya point la collaboration artistique avec les Allemands. Son parcours finit tout naturellement par un enterrement à l’église.
Ainsi s’acheva l’étonnante trajectoire du seul communiste belge auquel la Grande encyclopédie soviétique consacra un article et qui avait fait trembler la Justice et la police.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76096, notice VAN OVERSTRAETEN Edouard, dit War. Pseudonyme : VAN KAMPIN, PANIER (DBK) par José Gotovitch, version mise en ligne le 29 janvier 2010, dernière modification le 11 février 2022.

Par José Gotovitch

SOURCES : RGASPI, 495 93 220 (dossier très incomplet) ; 495 1 39. — Archives privées Vandenborre. — Groupe d’histoire et de sociologie des gauches, ULB, Archives Hennaut. — Nadya DeBeule, Het Belgisch trotskysme. De geschiedenisvan een groep oppositionele kommunisten 19251940. Gand, Jan Dhondt-stichting, Masereelfonds, 1980.

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