CAMPANA Paul

Par Madeleine Rebérioux

Militant « épisodique » de la fédération socialiste de l’Yonne (1908 à 1912).

Paul Campana naquit dans une famille protestante. Il expliquait plus tard en partie par là son hostilité au catholicisme : « Quelle fripouille que ce Dieu catholique ! Heureusement, comme insinuait spirituellement le Rochefort d’antan, il a une excuse, celle de ne pas exister » (Travailleur socialiste de l’Yonne, 5 février 1910). D’une culture très au-dessus de la moyenne, il fit une carrière de publiciste qui débuta, ou peu s’en faut, avec La Réforme universitaire, organe officieux de l’Association des maîtres-répétiteurs des lycées de Paris et de province, dont il fut, depuis sa fondation le 30 mai 1882 jusqu’en 1892, l’actif directeur.
C’est alors qu’il se lia d’amitié avec Alfred Naquet et que le mépris de la République bourgeoise finit par se confondre à ses yeux avec celui de la République tout court. Eut-il des liens précis avec les organisations monarchistes ? En tout cas, il collabora au Figaro et se présenta aux élections législatives dans la 2e circonscription d’Auxerre, en 1906, sous l’étiquette « libéral ». Il obtint près de 1 500 voix au premier tour et se maintint au second où il tomba à 870 voix alors que Camélinat était élu avec près de 4 700 suffrages.
On ne sait ce qui le décida en 1908 à adhérer à un groupe socialiste de l’Auxerrois. Il a dit un peu plus tard que c’était la conscience alors acquise qu’il n’y avait plus que deux partis en présence, la Révolution et la Conservation sociale, et que la République était « une fantaisie ». Il avait d’ailleurs commencé à collaborer au journal de la fédération socialiste de l’Yonne à partir du 15 juin 1907 et sa femme y publia, sous le pseudonyme de C. Pelletier d’Escamps, un roman-feuilleton intitulé : « Histoire d’une femme ». Pour sa part, il développait les principaux thèmes anarchistes, sans grande originalité, mais avec une certaine virulence : antipatriotisme, malthusianisme, peinture au vitriol de la famille et du mariage.
Des incidents électoraux mirent un terme à son bref passage dans le socialisme. En février 1910, arguant de son adhésion trop récente, il avait refusé de poser sa candidature pour l’arr. de Joigny comme le lui demandait le groupe de Fournaudin. En juillet de la même année, au lendemain de la mort de Chauvière, il s’opposa dans le XVe arr. de Paris à la candidature de F. de Pressensé présentée par la fédération de la Seine, et celle-ci introduisit contre lui une demande de contrôle auprès de la fédération de l’Yonne. En juin 1911, il fut mêlé à l’affaire du groupe d’Auxerre qui se retira de la fédération devenue à ses yeux trop « modérée » et il tenta, mais en vain, d’entraîner avec lui François Duporc. En décembre, enfin, le comité fédéral finit par lui demander des explications sur son attitude dans le XVe arr. Il maintint ses exigences : il voulait le siège de Chauvière. Pour en finir, le comité fédéral dut le considérer comme démissionnaire, formule élégante qui évitait l’exclusion. « Nous le regrettons pour nous et pour lui », déclara le communiqué fédéral. Ainsi s’achevait son bref transit par la SFIO.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article78551, notice CAMPANA Paul par Madeleine Rebérioux, version mise en ligne le 30 mars 2010, dernière modification le 19 avril 2022.

Par Madeleine Rebérioux

COLLABORATIONS : La Réforme universitaire, Le Figaro, Le Travailleur socialiste de l’Yonne.

SOURCES : Le Travailleur socialiste de l’Yonne. — P. Gerbod, « Associations et syndicalismes universitaires de 1828 à 1928 », Le Mouvement social, avril-juin 1966.

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