HUBERT René, Jean

Par Alain Dalançon

Né le 22 juillet 1885 à Dammartin-en-Serve (Seine-et-Oise, Yvelines), mort le 13 octobre 1954 à Strasbourg (Bas-Rhin) ; professeur puis recteur d’Académie ; résistant.

René Hubert, né dans le village de sa grand-mère maternelle, était fils d’Eugène, instituteur à Paris, et de Louise Augustine Lainé, sans profession. Il obtint le baccalauréat (lettres) en 1903. Il entra à l’École normale supérieure (lettres) en 1904. Inscrit à la Sorbonne, il réussit à la licence de lettres et à un certificat d’études physiques en 1906. Titulaire d’un diplôme d’études supérieures (1907), il fut reçu 1er à l’agrégation de philosophie en 1908, commença sa carrière de professeur de philosophie au lycée de Chartres (Eure-et-Loir) puis fut muté au lycée de Marseille (Bouches-du-Rhône) en 1912. Il épousa en mai 1909 à Arcachon (Gironde) Marie Germaine Rodier avec qui il eut trois enfants.

Mobilisé au 141e régiment d’infanterie comme sergent en août 1914, Hubert termina la Première Guerre mondiale comme lieutenant en octobre 1919. Il participa aux combats de l’Yser et de Verdun, commandait une compagnie de mitrailleurs depuis 1917 et fut blessé en septembre 1918.

Hubert, ayant bien avancé ses recherches pour une thèse de doctorat sur « Les sciences sociales dans l’Encyclopédie » qu’il soutint en 1921 ou en 1923, devint maître de conférences en philosophie et en sciences de l’éducation à la Faculté des Lettres de Lille de 1919 à 1923 et fut nommé professeur de philosophie, de morale et de sciences de l’éducation dans cette faculté en 1923. Il fonda en 1925 avec le germaniste Edmond Vermeil et l’économiste Bernard Lavergne la revue l’Année politique et étrangère, où la sociologie de Durkheim était utilisée pour l’élaboration d’une « philosophie politique nouvelle » inspirée par un patriotisme républicain très proche de l’idéologie du parti radical. En 1930-1931, il débuta un enseignement de psychosociologie de l’homme au travail, unique en France et un cours de pédagogie pour la préparation du concours d’inspecteur primaire. Il fut doyen de la faculté de 1931 à 1937.

Hubert fut nommé recteur de l’académie de Poitiers en juin 1937 par Jean Zay en raison de ses travaux en sciences de l’éducation et de son engagement en faveur de la réforme de l’enseignement secondaire.

Au début de l’Occupation, Hubert ne manifesta pas d’hostilité au régime de Vichy et appliqua la politique du Maréchal. Sans zèle particulier sans doute, il appliqua la loi excluant de la fonction publique les juifs et francs-maçons, qui au demeurant étaient extrêmement peu nombreux dans l’académie de Poitiers, s’étendant sur huit départements. Il rappela aux inspecteurs d’académie le 15 octobre 1941 la nécessité de donner « l’ordre que le discours du Chef de l’État soit lu dans toutes les classes, écoles, et établissements ». Avant la rentrée suivante, le 18 septembre 1942, il demandait à tous les personnels d’inspection, non admis dans les associations professionnelles, de venir à Poitiers prêter serment au Chef de l’État. Cependant il essayait de protéger enseignants et élèves des brimades et menaces de l’Occupant, avertissant le 25 juin 1941 les chefs d’établissement d’informer « discrètement les élèves et étudiants de s’abstenir de toute tenue pouvant manifester une opinion politique (cravate ou pochettes rouges) ». Il fut relevé de ses fonctions par Abel Bonnard le 15 juin 1943, et remplacé par Albert Chérel (professeur à la Faculté des Lettres de Bordeaux). Il avait en effet manifesté son hostilité à la Collaboration et aidé clandestinement les forces de la Résistance et notamment les premiers étudiants et jeunes enseignants réquisitionnés au Service du travail obligatoire (STO).

Membre du Comité départemental de Libération, Hubert fut réintégré dans ses fonctions le 10 octobre 1944 et demeura dans l’académie de Poitiers jusqu’en novembre 1946, date à laquelle il fut nommé recteur de l’Académie de Strasbourg. Il conserva ce poste jusqu’à son décès, et eut notamment pour première tâche la responsabilité de l’épuration dans le personnel alsacien et mosellan de l’Éducation nationale. En 1952, il signa une convention pionnière entre l’université de Strasbourg et le CNRS pour la création du Centre de recherche sur les macromolécules. Il fit aussi procéder à l’aménagement de l’enseignement religieux et du bilinguisme.

En 1945, Hubert fut nommé au Conseil supérieur de l’Éducation nationale et en démissionna en 1952 pour raisons de santé. Il écrivit dans cette période une série d’articles sur l’histoire « de l‘institution des assurances sociales en France », « Le droit de la paix et la Société des Nations » et « La philosophie de l’histoire et les événements du temps présent » dans diverses revues.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article88158, notice HUBERT René, Jean par Alain Dalançon, version mise en ligne le 29 mai 2010, dernière modification le 15 août 2010.

Par Alain Dalançon

ŒUVRE : Parmi une trentaine de titres : Les interprétations de la guerre, Paris, Flammarion, 1919 ; Le sens du réel, Paris, F. Alcan, 1925 ; L’organisation syndicale des travailleurs intellectuels, Paris, Marcel Rivière, 1921 ; Rousseau et l’Encyclopédie, Paris, J. Gambier, 1928 ; Manuel élémentaire de sociologie, Paris, Delalain, 1930 (nombreuses rééditions) jusqu’en 1949 ; Esquisse d’une doctrine de la moralité, Paris, Vrin, 1938 ; Histoire de la pédagogie, Paris, PUF, 1946 ; Traité de pédagogie générale, Paris, PUF, 1946.

SOURCES : Arch. Nat., F17/ 27491. – Arch. Dép. Vienne. — Antoine Savoye, « La science de l’éducation face à la réforme des lycées (France, 1920-1939) », Symposium, congrès international de l’AREF, 2007. — Johan Heilbronn, « Les métamorphoses du durkheimisme, 1920-1940 », Revue française de sociologie, XXVI, 1985, pp. 203-2037. — Françoise Olivier-Utard, « Les conventions entre le CNRS et l’université de Strasbourg », Revue pour l’histoire du CNRS, n° 11, novembre 2004. — Notes de Jacques Girault.

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