SARAVELLI André

Par Antoine Olivesi

Né le 29 janvier 1863 à Calenzana (Corse), mort le 8 mai 1929 ; commerçant ; conseiller général socialiste de Marseille (Bouches-du-Rhône).

Fils d’un laboureur, André Saravelli dut travailler dès l’âge de douze ans. Il fut, tour à tour, journalier et débardeur. Après son service militaire, il vint s’établir à Marseille où il monta un commerce de vins. Son affaire prospéra assez vite et il posséda bientôt plusieurs magasins ainsi qu’un entrepôt à la Joliette, avec un personnel exclusivement composé de Corses. Il milita dans les cercles socialistes des quartiers portuaires, qui comptaient beaucoup de Corses, aux côtés d’Antoine Cerati* et de Noël Massabo*. En 1898, il fit partie du comité électoral de Maximilien Carnaud* (POF), alors député de la première circonscription. Comme les allemanistes et les guesdistes marseillais, il fut, à cette époque, opposé à Siméon Flaissières* qu’il combattit aux élections municipales de 1900 ; il le qualifia « d’autocrate », et condamna sa « politique antisociale ». Cela ne l’empêcha pas, deux ans plus tard, d’être candidat, sans succès, sur sa liste aux élections municipales.

En 1901, André Saravelli fut élu, comme socialiste révolutionnaire, conseiller d’arrondissement du 4e canton. Aux élections législatives de 1902, il soutint de nouveau Maximilien Carnaud, puis, en 1904, il fut réélu conseiller d’arrondissement mais dans le 3e canton cette fois, c’est-à-dire les quartiers populaires du Panier, de la Major et de Saint-Jean, entre le Vieux-Port et la Joliette, où les Corses étaient particulièrement nombreux.

En août 1907, André Saravelli fut élu conseiller général du 3e canton, contre un autre Corse, Ausilia, protégé de Chanot, qui était devenu entre temps maire de Marseille ; Saravelli s’était présenté, cette fois, avec l’étiquette SFIO, mais il quitta ce parti l’année suivante, pour soutenir, aux élections municipales, une liste de concentration républicaine conduite par Maximilien Carnaud, dans la troisième section. Il combattit donc la liste SFIO où se trouvaient Gabriel Baron* et Henri Tasso* et qu’appuyait Dominique Duverger*. Le résultat de cette division fut la victoire de la liste Chanot.

En 1910, les mêmes divisions entraînèrent les mêmes conséquences. André Saravelli, revenu à la SFIO, se présenta aux élections législatives contre son ancien chef de file, Maximilien Carnaud, mais Dominique Duverger étant également candidat unifié, Saravelli n’arriva qu’en troisième position avec 1 761 voix sur 15 580 inscrits, mais avant Duverger, et, au second tour, ce fut Chanot qui fut élu député, malgré le désistement de Saravelli et de Duverger pour Carnaud. Duverger accusa Saravelli d’avoir été « l’adversaire le plus résolu [...] le détracteur le plus acharné » du parti au cours de cette consultation.

André Saravelli fut réélu conseiller général en 1913 contre Ausilia. On l’avait accusé, l’année précédente, d’avoir favorisé l’introduction d’éléments étrangers à la 3e section SFIO pour mieux préparer sa candidature aux élections législatives de 1914. Quant aux étrangers proprement dits, Saravelli pouvait compter sur l’appui des Italiens fraîchement naturalisés, Henri Tasso*, d’origine italienne, étant le conseiller d’arrondissement de son canton et le soutenant, du moins à cette époque.

Au conseil général, dont il fut le vice-président, André Saravelli fit preuve de beaucoup d’activité. Il présida également la commission départementale en 1911 et 1912. Il défendit surtout les intérêts des marins, notamment lors des grèves de 1912, des pêcheurs, des capitaines de cabotage, des petits commerçants, des sociétés de secours mutuels. Il fut aussi administrateur du bureau de bienfaisance de la rue Caisserie, mais abandonna cette fonction à un de ses proches, en 1910, parce qu’on l’accusait de trop distribuer de bons de secours.

André Saravelli était surtout populaire en raison « des petits services » qu’il rendait. L’échéance électorale de 1914 fit rebondir la querelle des clans corses dans la première circonscription, entre les 3e et 4e sections SFIO, donc entre Saravelli et Dominique Duverger. Après de longues discussions, le congrès fédéral SFIO qui se tint à Salon le 5 janvier 1914 trancha en faveur de Saravelli qui fut désigné pour affronter Chanot, député sortant et maire en exercice. Mais il y avait aussi un candidat républicain socialiste, le notaire Bergeon, avec qui il fallait compter.

La campagne pour le premier tour fut très animée, émaillée de polémiques, d’incidents et de bagarres. André Saravelli attaqua surtout Chanot sur sa politique municipale, tout en défendant les thèmes du programme général de la SFIO. La chasse à l’électorat corse — qui représentait 23,5 % des inscrits de la première circonscription — fut particulièrement active, mais il semble que le « clan Duverger » ait préféré soutenir Bergeon, tandis que Chanot possédait de son côté un éventail de partisans insulaires, s’étendant des radicaux modérés jusqu’aux bonapartistes.

Les résultats du premier tour donnèrent l’avantage à Chanot (4 720 voix) devant Bergeon (3 284) et André Saravelli (2 995), pour 16 076 inscrits et 11 529 votants. Saravelli manifesta sa rancœur à l’égard de Tasso et de Duverger, qui, cette fois, ne l’avaient pas suffisamment aidé, selon lui, et demanda même, lors d’une réunion tumultueuse de la commission exécutive de la Fédération SFIO, le 29 avril, l’exclusion de ces deux derniers. Néanmoins il se désista pour Bergeon, fit campagne pour lui et contribua, au second tour, à la défaite de Chanot.

Pendant la Première Guerre mondiale, André Saravelli fit partie des socialistes modérés et fut même blâmé, en mai 1918, pour « sa tiédeur » par la Fédération SFIO. L’année suivante, il fut réélu conseiller général du 3e canton, sans difficulté. En janvier 1921, il signa au nom de la 3e section l’appel de fidélité des élus de la SFIO. Mais, lors du congrès fédéral qui se tint le 21 janvier 1922 à Marseille — auquel il ne participa pas — Saravelli fut exclu du parti pour « divers manquements à la discipline ». On reprochait en fait à André Saravelli, conseiller général, de soutenir aux élections pour le conseil d’arrondissement le candidat républicain-socialiste Bouissin qui fut élu. En 1924, aux élections législatives, il fut candidat sur la liste socialiste-communiste Torrès-Sabiani dans la première circonscription de Marseille avec l’étiquette de républicain-socialiste et la mention professionnelle de négociant. Il obtint 13 350 suffrages.

Peu de temps après, le 3 juillet, il dut démissionner de son poste de conseiller général parce qu’il avait été impliqué dans une affaire de bourses scolaires attribuées un peu trop facilement à des enfants d’électeurs influents. Selon le témoignage de François Guidicelli, Léon Bon* aurait grossi et exploité cet incident pour éliminer Saravelli et s’emparer de son siège. Effectivement, lorsque ce siège fut à pourvoir, en août 1924, Léon Bon* fut élu, André Saravelli n’ayant pas été candidat ; en revanche, l’année suivante, en juillet, lors du renouvellement normal, Saravelli se présenta contre Bon dans le 3e canton et polémiqua violemment avec lui, mais dut s’incliner après avoir obtenu seulement 1 164 suffrages.

Sa carrière politique s’acheva pratiquement à cette date.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article130479, notice SARAVELLI André par Antoine Olivesi, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 30 novembre 2010.

Par Antoine Olivesi

SOURCES : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, II M3/44, 45, 46, 47, 49, 50, 51 et 55 ; III M/32, 36, 43, 50 et 56 ; V M2/188 à 191, et 282. — Le Petit Provençal, entre 1901 et 1925. — Le Radical, 11 avril 1914 et 1924-1925. — Massalia-Théatra, 23 juillet 1924. — Le Bavard (caricatures) et autres périodiques locaux. — E. Caste, Historique du conseil général, op. cit. — Compère-Morel*, Encyclopédie socialiste, op. cit. — Anne Agostini, Luttes municipales à Marseille, op. cit. — J.-A. Vaucoret, Les Corses et les élections législatives à Marseille, op. cit.

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