BRENTANO Lujo

Par Jacques Droz

Né le 18 décembre 1844 à Aschaffenburg, mort le 19 novembre 1931 à Munich ; économiste partisan du socialisme de la chaire.

Dès sa jeunesse, Lujo Brentano fit plusieurs voyages en Angleterre, où il fréquenta les milieux libéraux de gauche et acquit une connaissance remarquable des syndicats de ce pays, auxquels il attribuait la paix sociale qui y régnait. Frappé profondément, en 1866, par la défaite de son pays natal, il refusa d’entrer dans l’administration de la Bavière vaincue comme de la Prusse victorieuse et préféra aborder une carrière intellectuelle qui fut exceptionnellement brillante : habilité à l’Université de Berlin, il enseigna l’économie politique, les finances et l’histoire économique à Breslau, Strasbourg (où il se créa des amitiés alsaciennes), Vienne, Leipzig et Munich. L’événement principal de sa vie fut la création, en 1872, aux côtés de Gustav Schmoller et d’Adolph Wagner, du Verein für Sozialpolitik d’où sortit l’école des Kathedersozialisten (socialistes de la chaire), hostiles à l’individualisme et au manchestérianisme et qui voyaient dans l’intervention législative de l’État le remède à la crise sociale. Pourtant Brentano n’ avait avec ses collaborateurs politiques que peu de points communs : il se distinguait par sa vaste culture littéraire et artistique, par son attachement au romantisme et à la tradition catholique qu’il devait à sa famille. Plus qu’eux il était favorable à la libre organisation des travailleurs, au droit de coalition, à l’action syndicale, qui devait entraîner l’élévation des salaires et l’amélioration des conditions de travail, enfin au libre échange dont il attendait l’abaissement du prix de la vie. L’instruction de la classe ouvrière lui tenait particulièrement à cœur et c’est pourquoi il créa à Munich les Volkswirtschaftskurse. Théoriquement cependant, vers le début du XXe siècle, en présence des crises sociales qui ébranlèrent l’économie allemande (grève des mineurs en 1905), il se rabattit sur les solutions étatiques et, renonçant aux idées libérales qui avaient été les siennes, il reconnut la constitution des cartels comme une contribution possible à la prospérité générale. Si les idées de Brentano furent à une époque retenues par Naumann et son groupe, il n’eut qu’une influence limitée au sein du SPD.
Au début de la Première Guerre mondiale, Brentano fut l’un des rares universitaires qui eût fait savoir sa réprobation à l’égard de la violation de la neutralité belge et de l’incendie de Louvain ; il fit partie du Bund Neues Deutschland, fondé en novembre 1914, qui condamnait le pangermanisme et la politique d’annexion. En 1918, il organisa à Munich un groupement de « travailleurs intellectuels » qui s’interposait entre Eisner et la réaction.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article215991, notice BRENTANO Lujo par Jacques Droz, version mise en ligne le 23 juin 2020, dernière modification le 14 février 2020.

Par Jacques Droz

ŒUVRE : Mein Leben im Kampf um die soziale Entwicklung Deutschlands, 1931.

SOURCE : J.J. Sheehan, The Career of Lujo Brentano. A Study of Liberalism and Social Reform in Impérial Germany, Chicago, Londres ,1966.

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