TARNOW Fritz

Par Jacques Droz

Né le 13 avril 1880 à Rehme, près de Minden, mort le 23 octobre 1951 à Bad Orb (Hesse) ; leader syndical, social-démocrate de droite.

Compagnon menuisier, Fritz Tarnow fit sa carrière syndicale dans les travail­leurs du bois, fréquenta en 1908 l’École du parti et collabora activement avec Leipart, auquel il succéda en 1920 à la tête du syndicat des travailleurs du bois. Il fut élu en 1927 au Reichstag et devint en 1928 membre du Comité directeur du SPD. Considéré comme l’un des meilleurs économistes de son parti, il fut amené à rédi­ger en collaboration avec son collègue Fritz Baade et le statisticien Woytinski un programme connu sous le sigle WTB, destiné à combattre la crise dans l’esprit de Keynes et préconisant un « capitalisme organisé » où les problèmes de répartition prendraient une part égale à ceux de la production : thèse qui lui valut l’hostilité de la gauche du SPD, lorsqu’il se présenta au congrès de Leipzig en 1931 en tant que « médecin au chevet du capitalisme ».
Arrêté au moment de la dissolution des syndicats, Tarnow fut emprisonné à Berlin-Plötzensee. En décembre 1933, il émigra au Danemark d’où il resta en contact avec la SOPADE. Après une période d’inaction politique — on lui reprocha la capitulation de l’ADGB devant le nazisme —, il travailla avec Heinrich Schliestedt à la création d’une organisation syndicale à l’étranger (ADG) qu’il fit re­connaître par l’Internationale syndicale (IGB) en 1936 et dont il assura la direction après l’accident d’aviation qui coûta la vie à Schliestedt en 1938. Hostile à toute participation communiste, il prit contact avec les milieux de la résistance alle­mande, en particulier avec Wilhelm Leuschner, comptant d’ailleurs beaucoup plus sur les militaires et la grande bourgeoisie que sur les forces de gauche pour ren­verser le régime nazi, dont il n’envisageait pas la destruction totale et dont il retenait l’institution du Front de travail allemand (DAF), point de départ, selon lui, de la reconstruction du syndicalisme d’après-guerre. Dans la pensée de Tarnow, le communisme et l’URSS constituaient le danger majeur auquel il convenait immédiatement de se préparer. Mais cette orientation fut mise en question par les syndi­calistes de gauche, si bien qu’il fut impossible de constituer un Bureau central de l’AGD à Londres pendant la guerre. Un groupe indépendant fut formé sous la direction de Hans Gottfurcht.
Réfugié en Suède en avril 1940, il ne put obtenir un visa pour les États-Unis. Les projets qu’il développa comme représentant à Stockholm du groupe des sociaux-démocrates alliés à la SOPADE, en collaboration avec le journaliste Karl Raloff, se heurtèrent à l’opposition des autres milieux de l’émigration, particuliè­rement en Grande-Bretagne, du fait du maintien dans leur programme du DAF ; Tarnow ne se départit de cette prétention qu’en 1944, à la suite de la décision d’une conférence du groupe des syndicalistes allemands émigrés en Suède. Curieuse­ment, dans ce groupe, Tarnow joua l’alliance avec les communistes, en particulier avec Karl Mewis, au sein d’un Front populaire étendu aux chrétiens afin de contrer les groupes socialistes de gauche et dans l’espoir de pouvoir neutraliser ensuite les éléments communistes. Il garda à travers Theodor Steltzer des relations avec le cercle de Kreisau et les comploteurs du 20 juillet.
Revenu en Allemagne, il joua un rôle dans la réorganisation syndicale de la Bizone et fut appelé à siéger au Conseil parlementaire. Son souhait de parvenir à la direction du DGB ne se réalisa pas.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article217116, notice TARNOW Fritz par Jacques Droz, version mise en ligne le 23 juin 2020, dernière modification le 5 juin 2020.

Par Jacques Droz

ŒUVRE : Der Berliner Holzarbeiter, 1912. — Warum arm sein ?, 1928.

SOURCES : M. Rœder, Die deutschen sozialistischen Exilgruppen in Grossbritannien 1940-1945, Hanovre, 1968. — H. Müssener, Exil in Schweden. Politische und kulturelle Emigration nacb 1933, Munich, 1974. — D. Lange, « Fritz Tarnows Plane zur Umwandlung der faschistischen Deutschen Arbeitsfront in Gewerkschaften », in Zeitschrift für Gescbichtswissenschaft, 24,1976. — G. Beier, Schuiter an Schulter, Schritt fÜr Schritt. Lebenslaufe deutscher Gewerkschafter von August Bebel bis Theodor Thomas, Cologne, 1983. — Rœder et Strauss, op. cit. — Osterroth, op. cit. — Benz et Graml, op. cit.

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