HAAS Julien

Par Fernand Brem, Léon Strauss

Né le 27 avril 1925 à Husseren-Wesserling (Haut-Rhin) ; employé aux Mines domaniales de potasse d’Alsace, puis détaché comme expert en développement industriel (1954-1969), enfin consultant indépendant (1970-1985) ; syndicaliste CFTC puis CFDT, vice-président du syndicat chrétien des mineurs de potasse, président de l’UD-CFTC du Haut-Rhin (1946-1959), vice-président de l’Union régionale d’Alsace de la CFTC (1947-1959), vice-président de l’UD-CFDT du Haut-Rhin (1965-1966), membre du conseil confédéral de la CFTC en 1963, membre du conseil confédéral de la CFDT (1965-1967).

Julien Haas, fils d’Émile Haas, ouvrier fondeur puis gardien d’usine, militant social et politique catholique, et de Jeanne Manigold, cuisinière, avait trois frères. L’aîné, Pierre, séminariste au Grand Séminaire de Strasbourg replié à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), fut condamné à mort par un tribunal militaire allemand, gracié, interné au camp de rééducation de Schirmeck (Bas-Rhin), puis incorporé de force et envoyé sur le front d’Ukraine où il fut tué en septembre 1943. Son frère cadet, René, fut incorporé de force dans la division Waffen-SS « Das Reich » et tué sur le front de Normandie. Julien Haas, réformé à la suite d’un grave accident au pied droit, échappa au sort de ces Malgré-Nous. Après sa scolarité au village, Julien Haas commença en 1941 un apprentissage de comptable aux mines de potasse dans l’Alsace annexée de fait. Avec son père, il participa dans sa vallée à des réseaux d’évasion des prisonniers de guerre et de transport clandestin de courrier. Après la Libération, le jeune homme adhéra à la CFTC où il fut formé par François Vogel* et Henri Ulrich*. Plus jeune membre élu au comité d’entreprise en janvier 1946, il en fut membre jusqu’en 1956. Il devint rapidement vice-président du syndicat chrétien des Mines domaniales de potasse d’Alsace (MDPA) : il participa aux grèves des mineurs de 1947 et de 1953 et à la grève interprofessionnelle de 1949. En contact avec « Économie et Humanisme », il milita, sur le plan régional, au secrétariat social du diocèse de Strasbourg animé depuis 1952 par l’abbé Martin Hoffarth, qui devint ultérieurement (1970-1979) conseiller général Centre des démocrates sociaux (CDS), puis Union pour la démocratie française (UDF) du Bas-Rhin.

En 1954, Julien Haas fut détaché par les Mines domaniales au Comité d’action économique du Haut-Rhin (CAHR) et effectua un voyage d’études de deux mois aux États-Unis. En 1959, il fut chargé d’une mission longue (trois ans) en Tunisie par le Commissariat général au Plan : il s’agissait de promouvoir le développement industriel selon l’expérience acquise dans le Haut-Rhin. À son retour en 1963, toujours détaché des MDPA, il réintégra professionnellement le CAHR, mais resta membre des instances de la Fédération CFTC des mineurs, de l’Union départementale CFTC du Haut-Rhin et de l’Union régionale CFTC d’Alsace. En 1963-1964, il représentait les syndicats régionaux au conseil confédéral CFTC à Paris. Le 13 février 1964, au conseil de l’UD, il demanda un vote sur le maintien des statuts confédéraux de 1947 : il vota avec la majorité pour le maintien contre les partisans de « l’évolution ». En conséquence, il intervint au conseil confédéral des 20-23 février pour le maintien de la référence à la morale sociale chrétienne, avec Charles Farine et Charles Dillinger. Il fut mis en minorité. Au congrès confédéral extraordinaire de la CFTC des 6 et 7 novembre 1964, il fut scrutateur. À son retour à Mulhouse avec François Staedelin*, ils apprirent tous deux que certains de leurs amis avaient préparé la scission dans l’ombre. Le 9 novembre, à la réunion du bureau élargi de l’Union régionale à Strasbourg, l’affrontement fut violent, mais Haas rejoignit la majorité et approuva la proposition de Théo Braun : « conserver l’unité des syndicats de la région, c’est-à-dire de rester des syndicats chrétiens affiliés à la CFDT ». D’ailleurs, au conseil confédéral du 11 décembre 1964, il intervint à contre-courant ; pour lui, le congrès s’était soldé par un désastre : une majorité faible et une scission. Il proposait de limiter les dégâts en ne créant pas systématiquement des syndicats CFDT et en refusant d’exclure ceux qui avaient fait le choix de la CFTC. Lors de l’assemblée générale du syndicat chrétien des MDPA, certains orateurs furent pourtant particulièrement virulents à l’égard de Julien Haas : l’assemblée générale des 15 et 16 mai 1965 confirma la scission des mineurs et leur adhésion à la CFTC-Sauty, mais Haas resta à la CFDT. Il fut élu au nouveau conseil de l’Union régionale d’Alsace. Le 20 avril 1965, le conseil de l’UD du Haut-Rhin, confirma l’adhésion à la CFDT et élit un nouveau bureau présidé par François Staedelin ; Julien Haas fut élu vice-président comme Frédo Krumnow*. Haas siégea au Conseil confédéral de la CFDT de 1965 à 1967. À partir du 20 octobre 1965, il fit partie du groupe de travail idéologique, présidé par François Lagandré*, chargé de clarifier les concepts fondateurs de la CFDT.

De 1966 à 1970, Haas fut détaché par le Plan pour réaliser un certain nombre de programmes pour des pays africains, notamment en Côte d’Ivoire. En 1970, il se mit à son compte comme consultant indépendant et effectua tous les ans jusqu’en 1985 cinq ou six missions sur des problèmes de développement économique en Afrique. L’ancien syndicaliste était resté en contact avec certains anciens camarades, en particulier Gérard Espéret, ancien responsable à la CFDT des relations avec l’Afrique, expert pour les questions de développement auprès du Conseil économique et social de la CEE. De 1985 à 1990, il assuma la direction de l’Association des personnes âgées du Haut-Rhin. Il fut membre du Comité économique et social d’Alsace (CESA) de 1984 à 1988 au titre de représentant de l’économie sociale, membre du bureau de 1985 à 1988.

En 1986, avec M. Rudloff, Théo Braun et J.-L. Schaffhausser, il fut un des neuf co-fondateurs à Strasbourg de l’Institut régional de coopération développement, IRCOD (promotion et conduite de programmes de coopération de développement entre l’Alsace et des PVD) : membre du conseil d’administration, trésorier de l’institution de 1986 à 2002.

Il fut fait chevalier de la Légion d’honneur en 1990.

Julien Haas avait épousé le 10 juin 1954 Geneviève Maurer dont il eut trois fils.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76502, notice HAAS Julien par Fernand Brem, Léon Strauss, version mise en ligne le 4 mars 2010, dernière modification le 5 octobre 2010.

Par Fernand Brem, Léon Strauss

SOURCES : Entretiens de Fernand Brem avec Julien Haas en 2005 et 2010. — Archives de Julien Haas. — Archives de la CFDT, 1G16. — Frank Georgi, L’invention de la CFDT 1957-1970, Éditions de l’Atelier, 1995, p. 153, 266, 475. — De la CFTC à la CFDT- 1964, Colloque Almémos du 13 mars 2004, Strasbourg, 2004, particulièrement François Igersheim, « De la CFTC à la CFDT en Alsace », p. 94-144, et François Uberfill, « Les congrès régionaux », p. 145-164.

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