GOLDSTEIN ou GOLDSZTEJN Jean, Israël

Par Daniel Grason

Né le 15 novembre 1921 à Varsovie (Pologne), mort à Auschwitz (Pologne) ; tapissier ; communiste ; militant de la Main-d’œuvre immigrée (M.O.I.).

Fils de Salomon et de Dora, née Grodziki, Jean Goldsztejn orthographié Goldstein par la police était célibataire. Il vivait 13 rue du Cambodge à Paris (XXe arr.), exerçait la profession de tapissier. Il devint français par naturalisation. Militant de la Main-d’œuvre immigrée, des inspecteurs des Renseignements généraux le repérèrent lors de filatures, ils lui donnèrent le surnom de « Lunettes ». Il fut aperçu à différents rendez-vous avec Henri Krasucki, Renée Vilenski et Albert Toporeck. Les policiers le décrivait ainsi : « 28 ans, 1,72 m, épaules larges, cheveux blonds peignés raie sur le côté gauche, visage rasé et allongé teint rose, lunettes cerclées d’écailles, pardessus bleu foncé à martingale, pantalon à rayures, souliers jaunes, démarche lourde, nu tête, gants noirs. »
Les filatures furent très efficaces, elles étaient menées par des inspecteurs des Renseignements généraux, de la BS2, et des policiers de la BSi de Puteaux (Seine, Hauts-de-Seine). Elles permirent l’identification, puis l’interpellation d’une soixantaine de militantes et militants de la Main d’œuvre immigrée. Jean Goldsztejn fut repéré lors de filatures dans le XIe arrondissement. Le 22 février 1943 à 8 h 25, rue Faidherbe des Bruyères avec « Bertrand », Henri Krasucki). Le même jour, il était vu à 10 h avec « Gamine » (Rebecca Majzner) à l’angle du boulevard Richard-Lenoir et Saint-Sébastien ; à 19 h à l’angle de l’avenue Parmentier et de la rue Lacharrière avec « Galoche » (Gabriel Vachman), enfin à 19 h 15 dans un restaurant de l’avenue Parmentier en compagnie de « Gabardine » (non identifié). Le 23 février à 19 h 15, il rencontrait « Canadienne » Albert Toporeck.) à l’angle des rues des Pyrénées et des Prairies (XXe arr.). Le 24 février, il rencontra entre 9 h 50 et 13 h 45, cinq militants, un seul était connu des policiers « Galoche » (Gabriel Vachman). Entre le 26 février et le 15 mars, huit rencontres, deux militants étaient identifiés, le 27 février à 13 h 30 « Boulotte » (Renée Wilizynski) et le 3 mars à 12 h 15 « Réunion » (Henri Kurchand).
Jean Goldstein fut arrêté à son domicile de refuge 9 rue Saint-Ambroise à Paris (XIe arr.) le 23 mars 1943 dès 6 heures du matin. Il fut emmené au commissariat de Puteaux où il subit un interrogatoire musclé, puis transféré dans les locaux des Brigades spéciale à la Préfecture de Police, il fut comme tous les jeunes de la Main-d’œuvre immigrée battu à coups de nerfs de bœuf.
Incarcéré, puis interné quelques jours au camp de Drancy réservé aux Juifs sous le n° 793, Jean Goldstein était dans le convoi n° 57 le 18 juillet 1943 d’un millier de déportés à destination d’Auschwitz. Dès l’arrivée 440 déportés furent gazés, alors que 369 hommes et 161 femmes étaient sélectionnés à destination de Kommandos de travail. Le 27 janvier 1945 l’armée Soviétique libérait le camp, du convoi n° 57, il ne restait que 43 survivants dont 16 femmes.
Les 18 et 19 mars 1945 Lucien Bizoire, ex-commissaire principal de Puteaux, puis chef de la 3ème section des Renseignements généraux comparut devant la cour de justice. Il dégagea sa responsabilité sur la BS2, l’un de ses oncles, général, sous-chef d’État-Major certifia que son neveu était « tout ce qu’il y a de plus anti-allemand », qu’il avait rendu des services à un réseau de résistance dont lui-même était membre. Humour noir involontaire, un colonel, chef du 2ème bureau assura que Bizoire lui avait « fourni des renseignements sur la police française et allemande en ce qui concerne la répression des patriotes ».
Le Commissaire du gouvernement déclara que l’adjoint à la tête de la BS2, Pierre Gautherie : « Cent fois plus coupable » que Bizoire « a été gracié par le Général de Gaulle que je considère comme le premier Résistant de France ; je ne passerai pas outre, car il y aurait injustice et je demande une peine de travaux forcés à perpétuité. » Puis s’adressant à Bizoire, il lui lança : « Il faut que vous portiez le poids de votre châtiment jusqu’à votre dernier souffle ». Après délibération, la Cour condamna Lucien Bizoire à cette peine et à l’Indignité nationale.
Membre de la Jeunesse communiste, militant de la Main d’œuvre immigrée, Henri Krasucki déporté à Auschwitz dans le même convoi, fut affecté dans un camp de travail dans les mines de charbon à Jawischowitz, il rentra à Paris le 28 avril 1945. Il témoigna dans le cadre d’une commission rogatoire sur l’activité de Lucien Bizoire. Il le reconnut sur photographie, déclara : « Il m’a brisé un nerf de bœuf sur les reins et a montré une satisfaction évidente en ajoutant même que j’avais les reins solides ». Il porta plainte contre Bizoire et une dizaine de tortionnaires.
Le nom de Jean Goldstein figure sur le mur des noms rue Geoffroy-l’Asnier au Mémorial de la Shoah à Paris (IVe arr.), sous le nom de Israël Goldstein. Il se confond probablement avec Jean Goldsztejn né à la même date et homologué au titre de la Résistance intérieure française (RIF).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article173952, notice GOLDSTEIN ou GOLDSZTEJN Jean, Israël par Daniel Grason, version mise en ligne le 3 mai 2020, dernière modification le 15 mars 2022.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. GB 125, KB 10, BA 1849. – Bureau Résistance GR 16 P 261911. – Stéphane Courtois, Denis Peschanski, Adam Rayski, Le sang de l’étranger. Les immigrés de la M.O.I. dans la Résistance, Fayard, 1989. – Site internet CDJC.

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