Par Jacques Droz
Né le 14 juillet 1913 à Berlin, mort le 22 février 1967 à Pforzheim ; parlementaire social-démocrate.
Fils d’un coiffeur et d’une couturière qui appartenaient tous deux à des familles socialistes, Fritz Erler adhéra aux Jeunesses socialistes, puis au SPD où il propagea la résistance armée dans le cas d’un coup d’État fasciste. Membre du groupe Neu Beginnen, il travaillait comme employé municipal, quand il fut arrêté par les nazis en 1938 et condamné à dix ans de prison. Après sa libération, les Français l’arrêtèrent par erreur dans leur zone d’occupation, pour avoir participé à l’évasion d’un membre de la Légion étrangère. Membre du Landtag de Wurtemberg-Hohenzollem en 1948, il entra au Bundestag en 1949 et fut, à partir de 1956, membre du Vorstand du SPD. Spécialiste des questions militaires, il contribua à faire renoncer son parti à ses positions d’origine sur le service obligatoire. Lors du congrès de Stuttgart (1958), il fit voter une résolution qui reconnut implicitement qu’aucun gouvernement démocratique allemand ne pouvait faire fi des obligations qui découlaient de la situation de l’Allemagne en Europe ; primitivement adversaire du réarmement, il était devenu partisan d’une politique de défense. Sur un autre plan, il apparut comme l’un des premiers sociaux-démocrates qui eût compris l’importance d’une nouvelle orientation. Avant même l’échec électoral de 1953, il dénonça le « byzantinisme » du Vorstand, rappelant que le pourcentage des ouvriers d’usine allait en diminuant, qu’il était nécessaire de tenir compte de l’attente de nouveaux électeurs, qui souhaitaient une attitude plus ouverte à l’égard des Églises et plus souple à l’égard des petits nazis, l’abandon de certaines formules marxistes et de slogans révolutionnaires (notamment l’usage du terme de Genossen), enfin une plus grande ouverture à l’idée patriotique. Bien qu’il ne jugeât pas nécessaire de donner à son parti une doctrine définie, il fut incontestablement l’un des inspirateurs du programme de Godesberg. Situé à la droite du parti, il fut en 1959 considéré comme candidat possible à la chancellerie avec Willy Brandt, dans l’équipe duquel il entra en 1960. En 1964, il fut désigné, avec Wehner, comme vice-président du parti et président de la fraction social-démocrate du Bundestag. Très estimé dans les capitales étrangères pour son caractère et l’ampleur de ses compétences, remarquablement informé des problèmes de politique étrangère, son décès prématuré — conséquence sans doute des sévices dont il avait été l’objet en prison —, fut pour la social-démocratie une perte sévère.
Par Jacques Droz
ŒUVRE : Sozialismus als Gegenwartsaufgabe, 1947. — Politik für Deutschland, 1968. — Demokratie in Deutschland, 1965.
SOURCES : H. Sœll, Fritz Erler. Eine politische Biographie, 2 vol. Berlin, Bonn, Bad Godesberg, 1976. — T. Meyer, Demokratischer Sozialismus. Eine Einführung, Bonn, 1982.