DELABRE Auguste, Alexandre dit Alexandre [pseudonyme dans la Résistance : Max]

Par Jean-Pierre Besse, Claude Pennetier, Jean-Marie Guillon

Né le 22 juillet 1912 à Lyon (Rhône), mort en avril 1944 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; ouvrier serrurier ; militant communiste ; résistant mouvement Combat, puis des Mouvements unis de la Résistance (MUR) dans les Bouches-du-Rhône.

Fils de Joseph Delabre, vitrier d’art, et d’Antoinette Porcherot, ménagère, Alexandre Delabre habitait à Marseille, 18 rue des Petites-Maries. Il s’était marié à Marseille le 4 avril 1938 avec Marie Marguerite Donadio. Militant communiste, il participa à l’aide à l’Espagne républicaine pendant la guerre civile et aurait fait partie de la compagnie France-Navigation. Frank Boujard, qui était son ami, venait loger chez lui quand il passait par Marseille. Il intégra l’OS (Organisation spéciale) quand Joseph Gabalda, ancien de la Guerre d’Espagne, fut chargé de la mettre en place à Marseille. Il fit partie du petit groupe de militants communistes avec Raymond Vincent alias Dick, René Maisons et Alphonse Dumay qui firent de l’entrisme au sein du mouvement Combat, puis des MUR, en constituant un Groupe franc (GF). C’était pour eux un moyen de procurer des ressources et des armes aux Francs-tireurs et partisans (FTP) auxquels ils appartenaient aussi. Pour les mêmes raisons, ils fournissaient une protection à deux réseaux (Jean-Marie Buckmaster et réseau américain de Fred Brown). Delabre fut vraisemblablement le chef régional GF de Combat puis des Mouvements unis de la Résistance (MUR) avant de passer dans le réseau OSS (Office of Strtegic Services) de Fred Brown dont il devint le bras droit en mars ou avril 1943. Il fut alors remplacé aux GF par son adjoint, René maisons alias Neuville, autre communiste. Comme Raymond Vincent, il figure parmi les résistants repérés par Ernst Dunker dit Delage, pivot de la section IV de la Sipo-SD de Marseille. Ils ont été dénoncés par Charles Brown, chef régional GF, arrêté au cours du vaste coup de filet lancé entre mars et mai 1943 contre la Résistance non communiste et devenu un agent du Sipo-SD. Le nom de Delabre se trouve au numéro 16 des résistants identifiés consignés dans le rapport Flora qui fait le bilan de l’opération. Delabre y est donné, avec pour pseudonyme Berger, comme le chef départemental GF. Il était en réalité l’adjoint de Raymond Vincent qui en était le chef départemental. Les deux hommes étaient très activement recherchés par Dunker et le Sonderkommando AS. Delabre était soupçonné de plusieurs attentats et, en particulier, de la destruction sur la route, près de Bollène (Vaucluse), d’une voiture goniométrique avec ses trois occupants. Vincent, Delabre, Dumay et leurs hommes participaient aussi à la protection de plusieurs réseaux de renseignement ou d’action, anglo-américains, assurant la sécurité de leurs opérateurs radios ou celle de leurs liaisons maritimes ou de leurs parachutages. Ils étaient particulièrement liés au premier réseau de l’OSS (Office of Strategic Services) créé à partir de février 1943 par Fred Brown, dont le frère de Raymond Vincent, Gaston alias Azur était l’un des radios. L’arrestation de Max Delabre le 14 septembre 1943 découlait probablement des informations recueillies lors du démantèlement du réseau de l’abbé Blanc fin août. Elle aurait eu lieu lorsqu’il se rendait dans un garage situé dans la rue d’Italie. Interrogé au siège du Sipo-SD, au 425 de la rue Paradis, et enfermé dans les cellules du 7e étage, il s’y trouva avec le sous-lieutenant Viger, de l’Organisation de résistance de l’Armée (ORA) qui le décrivit ainsi : un garçon « fort sympathique et dont l’allure, le regard laissent deviner énergie, force, dynamisme. Il ne parle pas beaucoup, observe, réfléchit… C’est du solide ». D’après lui, il prépara et dirigea l’évasion qui, dans la nuit du 3 au 4 octobre 1943, permit à Viger, à un radio des services britanniques et à la maîtresse de Fred Brown, Lily Méré, de s’échapper. Cette évasion inquiéta Dunker Delage. Craignant des représailles, il partit pour quelque temps en mission à Lyon. Delabre se serait réfugié dans le maquis Ventoux (Vaucluse), avant de revenir à Marseille en février 1944. Il fut retrouvé abattu d’une balle dans la nuque vallon de Chaumery, à La Barasse, dans la banlieue est de Marseille. Il aurait été exécuté le 26 avril 1944. Son corps fut découvert quinze jours après. Le dossier fut classé sans suite. Tout laisse penser qu’il fut exécuté par ses camardes de Résistance qui le suspectaient d’avoir parlé durant sa détention. Le dossier fut classé sans suite. Raymond Vincent avait été arrêté peu après et, blessé au cours de son interpellation, était mort à l’hôpital. D’après Blanche Di Méglio, agent de Dunker, et le radio de l’OSS Bini (retourné), Delabre aurait été conduit gare Saint-Charles à un rendez-vous pour le reconnaître.
Le nom d’Alexandre Delabre a été donné à un boulevard du quartier des Goudes à Marseille (8e arrondissement) par délibération du 23 juillet 1945.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article21884, notice DELABRE Auguste, Alexandre dit Alexandre [pseudonyme dans la Résistance : Max] par Jean-Pierre Besse, Claude Pennetier, Jean-Marie Guillon, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 6 avril 2022.

Par Jean-Pierre Besse, Claude Pennetier, Jean-Marie Guillon

SOURCES : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, 55 W 50 et 58 W 20 (Dossier Dunker, interrogatoire de Dünker le 23 juillet 1945). — Madeleine Baudoin, Histoire des Groupes Francs (M.U.R.) des Bouches-du-Rhône de septembre 1943 à la Libération, Paris, P.U.F., coll. "Esprit de la Résistance", 1961. — Marcel-Pierre Bernard, Les communistes dans la Résistance, Marseille et sa région, Université de Provence (Aix-Marseille I), thèse 3e cycle Histoire, 1982. — Fabrizio Calvi, OSS, la guerre secrète en France. Les services spéciaux américains, la Résistance et la Gestapo 1942-1945, Paris, Hachette, 1990. —Robert Mencherini Résistance et occupation (1940-1944), tome 3 de Midi rouge, ombres et lumières, Paris, Syllepse, 2011.— Sapin et quelques autres, Méfiez-vous du toréador. Des soldats sans uniforme témoignent de leur combat pour chasser l’occupant…, Toulon, AGPM, 1987 (témoignage du sous-lieutenant Viger, p. 158 et suiv.). — Guillaume Vieira, La répression de la Résistance par les Allemands à Marseille et dans sa région (1942-1944), Aix-en-Provence, Université d’Aix-Marseille, 2013. — Sylvain Villard, Les sacrifiés de La Fournache ou l’affaire de Thines, chez l’auteur, 2011. — Notes d’Antoine Olivesi. — état civil.

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