SIMON Jean [SIMON Maurice, Jean]

Par Alain Dalançon

Né le 11 septembre 1912 à Ferrières-en-Gâtinais (Loiret), mort le 31 mars 2012 à Cagnes-sur-mer (Alpes-Maritimes) ; professeur agrégé d’anglais ; militant syndicaliste du SNES, secrétaire de la commission pédagogique (1964-1966), membre du bureau national de la FEN, secrétaire pédagogique (1967-1971) ; militant du PSU ; militant de la Ligue de l’enseignement.

26 mai 1968, délégation de la FEN aux négociations de Grenelle 
26 mai 1968, délégation de la FEN aux négociations de Grenelle 
de gauche à droite, James Marangé, Georges Aulong, Jean Gouzy, André Bougreau, Jean Simon.

Jean Simon était élève de la khâgne du lycée Louis le Grand à Paris en même temps que Roger Ikor en 1930-1931. En 1937-1938, il enseignait comme professeur d’anglais au lycée Michelet de Vanves, puis fut reçu à l’agrégation d’anglais à la session de 1941. En 1945, il exerçait au lycée Pasteur à Neuilly-sur-Seine (Seine, Hauts-de-Seine) puis fut muté au lycée Charlemagne à Paris jusqu’à sa retraite prise en 1972.

Il participa à la constitution et au développement du Syndicat national de l’enseignement secondaire dès la Libération. En 1945, il collaborait à la commission pédagogique sans être encore membre de la commission exécutive puis commission administrative nationale, mais il siégeait à celle de la section académique de Paris. En février 1948, il signa l’appel à passer à la CGT-FO publié dans L’Université syndicaliste, puis se rallia à l’autonomie.

À ce titre il fut élu dès le début des années 1950, membre de la commission administrative de la section académique (S3) de Paris et signa son premier article dans L’US dans une tribune libre publiée le 15 mars 1953, titrée « Si on essayait de se comprendre ». Dans le débat houleux qui s’était instauré dans le syndicat entre militants d’Afrique du Nord et militants métropolitains sur la valeur de la colonisation, après le massacre du Cap Bon en janvier 1952 et la répression à Casablanca en décembre 1952, il essayait de convaincre les Algériens. Si Jean Bogliolo (secrétaire du S3 d’Alger) avait raison quand il distinguait deux colonialismes : celui des exploiteurs et celui des bâtisseurs, ce dernier ne voyait pas où était l’essentiel : les « vrais responsables sont les milieux réactionnaires coloniaux et les gouvernements réactionnaires de la France », et Jean Simon concluait : « Quel homme de bonne foi ne serait pas secoué d’indignation devant cette politique atroce et imbécile ? »

Il entra au bureau du S3 de Paris à la rentrée 1958 quand Louis-Paul Letonturier devint secrétaire général, et fut élu membre du Conseil académique à la fin des années 1950. En décembre 1957, après le congrès de la FEN qui vit le SNES s’opposer au Syndicat national des instituteurs au sujet du projet de réforme Billères que son syndicat combattait, il y défendit les actions de grève estimant que les enseignants étaient « attristés par la décadence de l’Université française », et que le SNES refusait les dépassements d’effectifs et l’enseignement dans des locaux vétustes.

Il apparut sur la liste « autonome » à la CA nationale à partir de 1962. Membre de la Société des agrégés, il occupa la très importante fonction de secrétaire pédagogique du SNES de 1964 à 1966, succédant à Jean Marchais, ancien président de la Société des agrégés. Du même coup, il fut élu membre de la commission administrative paritaire nationale des agrégés et du Conseil de l’enseignement général et technique et siégea au Conseil supérieur de l’Education nationale.

Il avait commencé à travailler auprès de Jean Marchais. Tous deux étaient militants du PSU et, à la veille du congrès d’avril 1963 à Toulouse, ils avaient déposé avec Pierre Sénécat, des motions très hostiles à la réforme Fouchet créant le collège d’enseignement secondaire et une unification du premier cycle du second degré. À partir de 1964, Jean Marchais et lui œuvrèrent cependant pour rapprocher les positions du SNES de celles du SNI, dans le cadre de la FEN et du CNAL (Comité national d’action laïque). Néanmoins Jean Simon défendait fermement les positions du SNES sur la formation des maîtres en demandant la licence pour tous les maîtres, conformément au Plan Langevin-Wallon, et soulignait sur ce point la persistance des désaccords avec le SNI tout en reconnaissant les efforts de Jeanne Lordon pour faire évoluer la position de son syndicat. Il soutint l’assouplissement de la position du SNES sur le latin en 6e avec André Drubay et Jean Petite et, quelques années plus tard, en 1968, il se félicita de l’abandon du latin en 6e, ce qui le conduisit à écrire en décembre à Roger Ikor, son condisciple à Louis-Le-Grand, qui s’était insurgé contre cet abandon dans le Figaro. Il eut aussi à mener la bataille contre le second volet de la réforme Fouchet, en 1965-1966, concernant le baccalauréat.

Après la démission de Pierre Dhombres du secrétariat général du SNES en avril 1966, consécutive au rejet du rapport d’activité de la direction nationale, le SNES dut organiser des élections avant la désignation de la première CA du nouveau SNES issu de la fusion avec le Syndicat national de l’enseignement technique, qui venait d’être entérinée par le congrès commun des deux syndicats. Lors d’une réunion interne au courant majoritaire, réunissant militants du SNES et du SNET, Jean Simon contesta à Robert Chéramy la conduite de la liste « autonome » aux élections propres au SNES et n’y figura qu’en 3e position derrière Chéramy et André Mondot. Cette liste fut battue par la liste « Unité et Action » ; les « autonomes » ne conservèrent la direction du nouveau SNES que grâce aux voix des élus de la liste « C » conduite par Joseph Berthélémy, qui imposèrent le retrait de Chéramy du secrétariat général, si bien que Louis Astre (pour l’ancien SNET) et André Mondot (pour l’ancien SNES) furent élus co-secrétaires généraux. Jean Simon resta alors secrétaire pédagogique dans le secrétariat permanent et devint membre de la CA fédérale, de novembre 1966 à novembre 1967, au titre de la section départementale de la FEN de la Seine.

Après la perte de la direction du SNES par les « autonomes » aux élections de mai-juin 1967, il demeura membre de la CA du SNES et de la CA fédérale, au titre du SNES cette fois, de novembre 1967 à 1972. Il fut surtout membre du bureau de la FEN de 1967 à 1971, en étant secrétaire de la commission pédagogique fédérale, prenant la succession de Julien Vacquier*. Louis Astre et Robert Chéramy étaient également membres du bureau fédéral, tout en étant minoritaires dans leur syndicat, ce qui suscitait des protestations continues de la part des responsables « Unité et Action » du SNES. Toujours anticolonialiste, il signa en janvier 1968 l’ « Appel aux intellectuels » contre la guerre du Vietnam avec les membres « U-A » du BN et un certain nombre de militants autonomes.

Très compétent dans son domaine de responsabilité, cherchant à trouver l’équilibre avec les positions du SNI, mais sans les épouser totalement, il chercha à dégager des positions fédérales. Il bénéficiait de la confiance du secrétaire général James Marangé ; aussi ce dernier l’intégra-t-il dans la délégation de la FEN qui participa aux négociations de Grenelle en mai 1968 (avec Georges Aulong, Jean Gouzy, Jean aubardet André Bougreau [voir photo]).

Jean Simon défendit le bilan de la FEN en mai-juin 1968 et mit en valeur dans L’Enseignement public les avancées des conclusions des commissions ministérielles sur la rénovation pédagogique, l’orientation et la formation des maîtres. Il vota pour la loi d’orientation sur l’enseignement supérieur au CSEN alors que Drubay, secrétaire général du SNES, s’abstint.

Il fut un des principaux artisans de la prise en compte de l’éducation permanente mise à l’étude par le congrès de 1969, qui allait être au cœur du projet de réforme du système éducatif de la FEN. Il s’intéressa aussi à l’enseignement du Français aux différents niveaux de la scolarité et lança un questionnaire sur le sujet aux SN et SD-FEN ; mit en œuvre un groupe de travail de la FEN et de ses alliés sur l’information et l’éducation sexuelle ; fit prendre position en faveur de la scolarisation des enfants de travailleurs immigrés.

Il n’était pas seulement un expert des questions pédagogiques. Après l’élection de Georges Pompidou à la présidence de la République en 1969, il critiquait sévèrement la politique générale d’un régime qui « essaie de résoudre par l’austérité la crise financière, refuse les réformes et prend des mesures réactionnaires ». Et il participait à l’élaboration de l’argumentation de la nouvelle tendance « Unité, Indépendance et Démocratie » dans la circulaire « Arguments, ripostes », pour contrer les progrès d’ « Unité et Action » assimilé aux communistes.

En 1971, James Marangé le fit remplacer progressivement par Albert Guillot, car il devait prendre sa retraite, mais il présida encore en décembre 1972 le colloque de la FEN sur « l’Art à l’école », qu’il avait largement contribué à organiser, notamment en lançant un questionnaire auprès des SD/FEN et des syndicats nationaux. Il avait été, selon le témoignage de Louis Astre, un « militant franc et résolu, sérieux et désintéressé ».

Après sa prise de retraite en 1972, Jean Simon milita durant une dizaine d’années à la Ligue de l’enseignement et disait être devenu « simple retraité de base » depuis septembre 1989.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article174472, notice SIMON Jean [SIMON Maurice, Jean] par Alain Dalançon , version mise en ligne le 11 juillet 2015, dernière modification le 20 août 2022.

Par Alain Dalançon

26 mai 1968, délégation de la FEN aux négociations de Grenelle
26 mai 1968, délégation de la FEN aux négociations de Grenelle 
de gauche à droite, James Marangé, Georges Aulong, Jean Gouzy, André Bougreau, Jean Simon.
Jean Simon au congrès du SNES en 1969.
Jean Simon au congrès du SNES en 1969.
coll. IRHSES

SOURCES : Arch. Nat., F17/17792. ). — Arch. IRHSES (dont C.r. des congrès du SNES, commission pédagogique, L’Université syndicaliste, L’Enseignement public). — Arch. FEN, ANMT Roubaix (commission pédagogique, congrès, « Arguments ripostes », lettre à R. Ikor de 1968). — Table ronde du CEVIPOF et du CRHMSS sur les négociations de Grenelle (3 octobre 1989), Matériaux pour l’histoire de notre temps, n°20, juillet-septembre 1990. — Ismaël Ferhat, « Le Parti socialiste unifié et le monde enseignant en région parisienne. 1961-1967 », in Tudi Kernalegenn, François Prigent, Gilles Richard et Jacqueline Sainclivier (dir.), Le PSU vu d’en bas, PUR, 2010. — Témoignage de Louis Astre. — Notes de Jacques Girault et Guy Putfin.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable