BOUSCAND Jean

Par Pierre Lévêque, Jean Belin

Né le 17 février 1893 à Bagnot (Côte-d’Or), mort en déportation le 10 août 1942 au camp d’Auschwitz (Pologne) ; cheminot ; militant syndicaliste CGTU et communiste ; secrétaire régional du PC pour la Côte-d’Or et l’Yonne avant 1939 ; responsable clandestin du PC en Côte d’Or (1940-1941).

Fils naturel de Marie Bouscand, manouvrière, après sa scolarité, Jean Bouscand travailla comme domestique de culture. Le 29 octobre 1912, il s’engagea volontairement pour quatre ans au 12e régiment de hussards. La guerre fut déclarée le 2 août 1914. Le 11 octobre 1914, il fut blessé par éclats d’obus à la nuque et au ventre lors de l’attaque de Foncquevillers (Pas-de-Calais). Le 3 avril 1915, il fut nommé brigadier. Il changea de régiment en 2016. Il termina le conflit avec le grade de maréchal des logis. Le 8 septembre 1918, il fut cité à l’ordre de son régiment pour son « grand courage » et reçu la croix de guerre. Le 13 janvier 1919, il fut mis à la disposition de la Compagnie des chemins de fer du PLM, « affecté spécial » en qualité d’homme d’équipe à Dijon. Le 9 février, il fut embauché par la compagnie du PLM. 
Il se maria une première fois avec Suzanne Simonnet le 8 septembre 1920 à Dijon, veuf, il se remaria le 28 décembre 1922, toujours à Dijon avec Jeanne Collin qui décéda en 1925. Après avoir été wagonnier, le 25 avril 1927, il entra en fonction comme conducteur à Dijon. Jean Bouscand devint Chef de train au PLM, et en 1928, secrétaire général du syndicat CGTU des cheminots de Dijon. Il fut élu délégué du personnel aux élections de la compagnie du PLM en août 1929. Sur 26 sièges à pourvoir, la CGTU remporta 25 sièges, Jean Bouscand fut le mieux élu. Il fut parmi les principaux orateurs avec Lucien Midol, Adrien Langumier, Auguste Heinimann, lors de meetings organisés par la CGTU dans le département.
Dès 1925, il fut membre du Parti communiste, cellule 26 de Dijon, dont Valentin Rabier était secrétaire. Par la suite, gérant du journal communiste Le Travailleur, secrétaire du comité départemental du PC et du rayon communiste de Dijon, il fut candidat communiste aux élections législatives de mai 1932 (à Châtillon-sur-Seine) et d’avril-mai 1936 (2e circonscription de Dijon), aux élections cantonales d’octobre 1934 (Dijon-Sud), enfin tête de liste aux élections municipales en 1934 et 1935. En 1935, il arriva en deuxième position sur la liste communiste derrière Auguste Heinimann, obtenant 912 voix sur 23 679 inscrits et 17926 votants.
Très actif pendant la période du Front populaire comme secrétaire régional du PC (Côte-d’Or et Yonne), Jean Bouscand prit la parole dans de très nombreux meetings et écrivit les éditoriaux du Travailleur de Bourgogne dont il était administrateur. En 1939, il se remaria avec Jeanne Thibeau, sœur de Jean Thibeau, militant syndicaliste et communiste. Il fut à ce moment-là chef de dépôt auprès du parc d’infirmerie.
Lors de la mobilisation, il fut « affecté spécial » à son poste de travail. Le syndicat des cheminots de Dijon fut dissout sur ordre du préfet. Le 29 décembre, la police municipale de Dijon perquisitionna au domicile de Jean Bouscand. Elle saisit des documents syndicaux. Il fut dénoncé le 13 avril 1940 par une lettre anonyme envoyée à la mairie de Dijon et la préfecture, ainsi qu’au commissariat spécial de Dijon comme se livrant "à la propagande soviétique auprès des permissionnaires. Un arrêté préfectoral du 10 juin 1940 stipula qu’il fut astreint à résider au Fort d’Hauteville, « vu le décret du 18 novembre 1939 relatif aux mesures à prendre à l’égard des individus dangereux pour la Défense Nationale et la sécurité publique ». Sa présence dans le département fut considérée comme dangereuse.
La SNCF le mit en retraite le 1er novembre 1940 en raison de « son activité anti-nationale » (loi du 17 juillet 1940), puis le révoqua en février 1941. À l’automne 1940, il participa à la reconstitution du PCF clandestin en Côte d’Or avec Jean Mahon, Jean Cêtre et Maurice Cêtre, Juliette Dubois, Gabriel Lejard, Marcel Chalon, etc. Il fut arrêté le 21 juin 1941 à son domicile au 12 chemin des Lentillières à Dijon, avec 23 autres responsables communistes de Côte-d’Or. Torturé au siège de la Gestapo et interné à la prison de Dijon, il fut rapidement transféré comme otage au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise). Après un an d’internement, Jean Bouscand fut sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation fut été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande.
Il fut déporté ensuite dans le convoi du 6 juillet 1942 avec 13 autres militants syndicalistes et communistes de Côte-d’Or, entassés dans des wagons de marchandises avec d’autres détenus vers Auschwitz. Il fut enregistré le 8 juillet au camp souche sous le numéro 45292. Le 10 juillet, il fut envoyé au travail dans un Kommando. Malade, il mourut un mois après l’arrivée de son convoi. Le 5 juin 1948, Gabriel Lejard, rescapé du convoi, signe un article dans le journal communiste L’Avenir de la Côte-d’Or, intitulé « En souvenir de mes camarades de misère, et pour rafraîchir la mémoire à ceux qui ont déjà oublié ». Il y présenta les clichés anthropométriques retrouvés de 5 de ses 13 camarades du département, prises à Auschwitz le 8 juillet 1942, dont celui de Jean Bouscand. Le titre de Déporté politique lui fut attribué en 1962. Une salle de la Bourse du travail de Dijon porte son nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article17644, notice BOUSCAND Jean par Pierre Lévêque, Jean Belin, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 26 avril 2023.

Par Pierre Lévêque, Jean Belin

Jean Bouscand déporté.

SOURCES : RGASPI, 495 270 760. — Arch. Nat. F7/13686. — Arch Dép. Côte d’Or, 1630 W 252. —Travailleur de Bourgogne, 1933-1939. — L’Avenir de la Côte-d’Or, 2 juin 1945. — Fondation pour la mémoire de la déportation, 1997. — Notes de Jean-Pierre Besse. —Arch. Dép. Côte-d’Or, état civil, recensement de la population, fiche de recrutement militaire. — Arch. HIS CGT 21. — Cheminots victimes de la répression, 1940-1945, Mémorial, édition Perrin-SNCF, 2017. — La Bourse du travail de Dijon et le syndicalisme CGT en construction de 1890 à 1930, Jean Belin, novembre 2016. — AD 21, fiches des résistants communistes suivis par la police de Marsac en 1941, côte 40M309. — Mémoire vive des convois des 45000 d’Auschwitz-Birkénau. — Triangles rouges à Auschwitz, le convoi politique du 6 juillet 1942, Claudine Cardon-Hamet, pages 363 et 397, édition de 2005. — Les communistes dans la Résistance en Côte-d’Or, édition de 1996. — Résistance en Côte-d’Or, Gilles Hennequin, tomes 1 et 4, éditions de 1981 et de 1997.

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