SOLA Gaudérique, Étienne, François

Par André Balent

Né le 15 février 1888 à Sahorre (Pyrénées-Orientales), mort le 7 avril 1973 à Perpignan ; instituteur des Pyrénées-Orientales, syndicaliste ; secrétaire départemental du SNI ; mutualiste, secrétaire départemental de l’Union des mutuelles des Pyrénées-Orientales « La Roussillonnaise » en 1943 et 1944 ; maréchaliste et collaborateur, secrétaire départemental de la Légion des combattants.

Gaudérique Sola était le fils de Paul Sola, maréchal ferrant de Sahorre, village minier du Conflent, âgé de 25 ans en 1888 et de Thérèse Laporte, âgée de 23 ans en 1888. Il poursuivit ses études, sans doute à l’école normale d’instituteurs de Perpignan, car, au conseil de révision sa profession était déjà celle d’enseignant du premier degré.

Il fit son service militaire au 53e RI de Perpignan. Incorporé le 7 octobre 1909, sergent le 24 janvier 1911, il fut libéré le 24 septembre 1911 et versé en réserve aux services de santé de la 16e région militaire. Libéré, il occupa un poste d’instituteur à Saint-Estève, près de Perpignan. Le 7 mars 1912, il fut muté à Elne puis, le 2 août 1912 à Saint-Estève où il résidait à la déclaration de la guerre. Sa femme, Pauline Renalin, y résidait pendant la guerre car son premier fils y naquit en 1915. En 1921, alors qu’il fut recensé à Err avec sa famille, il n’avait encore qu’un fils unique.

Il fut mobilisé en 1914 à la direction des services de santé de la 16e région militaire, affecté ensuite à l’ambulance médicale n° 31du 16e Corps d’armée et, enfin, mis à disposition, le 18 novembre 1914, du service de santé de la 16e Région militaire à l’hôpital militaire temporaire d’Albi (Tarn). Promu à titre temporaire officier d’administration de 3e classe du cadre auxiliaire du 16e CA le 30 novembre 1914, il devint, le 16 janvier 1916, alors qu’il était toujours affecté à Albi, officier d’administration à titre définitif. Le 19 janvier 1916, il fut muté, à proximité des opérations sur le front de l’Ouest en qualité d’officier adjoint divisionnaire de la 133e Division d’infanterie. Une citation lui fut décernée car, du 16 au 19 décembre 1916, il quitta momentanément son poste au QG de la 133e DI pour participer à la relève des blessés « se faisant remarquer par son activité et son sang froid dans un poste violemment bombardé ». Un décret du 15 avril 1917 le promut à titre définitif officier d’administration de 2e classe. Il fut ensuite affecté à la réserve de la 4e armée à Troyes (Aube), et au 53e RI, le principal régiment perpignanais, du 31 au 22 septembre 1918. À l’hôpital militaire de Mulhouse (Haut-Rhin), le 25 février 1919, puis à celui de Luppach (Haut-Rhin) le 20 mars 1919, il fut muté à celui de Perpignan le 19 juin 1919 où il fut démobilisé le 26 juin 1919. Il fut nommé capitaine d’administration de réserve le 27 décembre 1929.

Le 21 octobre 1921, il fut nommé instituteur à Err, en Cerdagne, où il précéda Pierre Saury en poste en 1928. Il resta suffisamment de temps dans cette commune pour y laisser un souvenir, le plus souvent positif, quoique terni par ses engagements ultérieurs qui contrastèrent avec ceux de son successeur à l’école d’Err à partir d’octobre 1941, Gaudérique Malet. D’ailleurs, alors qu’il était à Perpignan et qu’il était devenu un militant syndicaliste actif, il favorisa (1936), en accord avec le maire socialiste d’Err, Barthélemy Lledos et Pierre Saury, instituteur, la création dans ce village de montagne d’une colonie de vacances mutualiste.Plus tard, il fut directeur de l’école Lavoisier à Perpignan. Il prit sa retraite le 5 février 1943.

Militant syndicaliste en vue, proche du Parti socialiste, il fut, en 1929 et en 1930, secrétaire de la section départementale des Pyrénées-Orientales du SNI. Il prit la succession de Victor Gruat. Léon Sors lui succéda.

Après la mise en place de l’État français, en 1940, il devint un maréchaliste militant, de plus en plus engagé dans la voie de la collaboration et d’autant plus actif que sa retraite d’enseignant lui laissa du temps libre. Dès janvier 1941, il acceptait le poste de secrétaire départemental de la Légion française des combattants et l’occupa jusqu’en décembre 1943. Mettant à profit ces fonctions, il fit en sorte que la Légion des combattants des PO essayât de prendre en main les mutuelles d’anciens combattants. La circulaire du 7 mai 1942 ayant interdit la direction de ces mutuelles aux Juifs et aux francs-maçons, la Légion en profita pour dénoncer comme dignitaire maçonnique de la loge perpignanaise « Saint-Jean-des-Arts-de-la-Régularité », Louis Coste, professeur à l’École normale, président départemental, depuis plus de dix ans de la Mutuelle de retraites des combattants victimes de la guerre (1914-1918), dont le bureau comprenait aussi Pierre Gineste instituteur socialiste et résistant très actif et Georges Dagneaux, instituteur à la retraite. Gaudérique Sola accéda, du fait des circonstances, à l’important poste de secrétaire général de l’Union départementale des mutuelles « La Roussillonnaise ». Il fut déchu de son mandat par arrêté du 16 avril 1945. Il est vrai que, entre temps, son attitude pendant les années 1940-1944 incitèrent les membres de la commission départementale d’épuration des personnels du ministère de l’Éducation nationale de se pencher sur son cas, qui plus de quarante ans plus tard, restait très présent à l’esprit de Lucette Justafré membre de cet organisme.

Durant cette même période, Gaudérique Sola chargé de la gestion des cantines de la ville de Perpignan, dut démissionner (1943) après que des biscuits caséinés et des suppléments alimentaires destinés aux enfants eurent été détournés. Cette affaire fut opportunément rappelée par les socialistes dans leur hebdomadaire, en novembre 1945.

Sa participation active aux activités de mouvements vichystes mit un terme à sa carrière publique dans le mouvement social, syndical ou mutualiste. Après la Libération, il fut d’abord interné à la citadelle de Perpignan puis au camp de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales) où il se trouvait encore le 8 août 1945. Il fut condamné à 30 ans d’indignité nationale pour ses activités collaborationnistes. Après avoir été examiné par la commission d’épuration administrative de l’enseignement des Pyrénées-Orientales, le cas de Gaudérique Sola fut traité par le conseil académique d’enquête de Montpellier (10 mars 1945) et le conseil supérieur d’enquête de l’Éducation nationale (6 juin 1945). Il lui fut reproché d’avoir été un "très actif propagandiste de la politique de Pétain et de la collaboration" et que son activité, "en étroite liaison avec Ruffiandis" [Louis], lui aussi instituteur, chef départemental de la Légion, "font peser sur lui les plus graves soupçons en ce qui concerne sa complicité dans la dénonciation de M. Thorent" (selon toute vraisemblance, Louis Thorent, le maire SFIO de Sahorre, le village natal de Sola). René Capitant, ministre de l’Éducation nationale entérina les propositions de sanctions administratives de ces deux organismes : la suspension de sa pension de retraite pendant cinq ans, du 1er octobre 1945 au 30 septembre 1950) et la radiation de la Légion d’Honneur (arrêté ministériel du 14 septembre 1945).

Il mourut, veuf, à Perpignan où il demeurait rue du Docteur Rives. Son enterrement religieux eut lieu en l’église Saint-Matthieu. Il fut inhumé à Sahorre, son village natal, dans le caveau familial. Le faire part de décès et l’avis de remerciement publiés dans L’Indépendant mentionnent qu’il était chevalier de la Légion d’Honneur, titulaire de la croix de guerre 1914-1918, de la médaille de Verdun et officier du Mérite social. La fiche nominative du registre matricule ne fait pas mention de ces décorations, militaires notamment, comme cela est le cas en règle générale. La commission d’épuration de l’enseignement public des Pyrénées-Orientales l’avait-elle radié de la liste de ces décorés (ce fut le cas, cependant, pour la Légion d’honneur dont il fut radié par le Conseil supérieur d’enquête de l’Éducation nationale, le 6 juin 1945) ? Y fut-il réintégré ultérieurement ?

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article76397, notice SOLA Gaudérique, Étienne, François par André Balent, version mise en ligne le 21 février 2010, dernière modification le 11 octobre 2022.

Par André Balent

SOURCES : Arch. dép. Pyrénées-Orientales, 6 M 291 ; 1 R 492, registre matricule ; 10 X 10 ; 89 W 16 ; 31 W 16 ; 26 W 42 ; 129 W 1. — Arch. com. Sahorre, état civil. — Arch. com. Perpignan, état civil. — André Balent, notice in Maitron, XLI, 1992, p. 348. — André Balent, « Societat i frontera a la Cerdanya francesa del segle XX : Er de 1914 a 1945 », Études roussillonnaises, XVIII, Perpignan, 2001, p. 209-229 [p. 221, note 78]. —Ramon Gual & Jean Larrieu, Vichy, l’occupation nazie et la Résistance catalane, II b, De la Résistance à la Libération, Prades, Terra Nostra, 1998, p. 634-636, p. 1037. — Edwige Praca, Les sociétés de secours mutuels et leur union dans les Pyrénées-Orientales (XIXe-XXe siècles), de la Roussillonnaise à la Mutualité française Pyrénées-Orientales, Perpignan, Trabucaire, 2000, p. 190, pp. 220-221, p. 227. — Le Cri catalan, 8 juin 1929, 7 juin 1930. —L’Indépendant, Perpignan, 12 janvier 1941. — Le Socialiste des Pyrénées-Orientales, 25 novembre 1944. — L’Indépendant, Perpignan, 8 avril & 10 avril 1973. — Entretiens avec Lucette Justafré, Ille-sur-Têt, juillet 1984 ; Raymond Imbern, Err, 1996 et 1997.

ICONOGRAPHIE : L’Indépendant des Pyrénées-Orientales, Perpignan, 12 janvier 1941. — Gual et Larrieu, op. cit., p. 636.

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